
Qui sont les druzes, minorité du Moyen-Orient victime d'exactions en Syrie ?
Israël a bombardé mercredi le quartier général de l'armée syrienne à Damas, après avoir menacé d'intensifier ses frappes contre les forces gouvernementales si elles ne quittaient pas la ville à majorité druze de Soueida, après trois jours de violences qui ont fait près de 250 morts.
Les druzes forment une minorité au Moyen-Orient, répartie entre Israël, le Liban et la Syrie, qui cherche à préserver son identité. «Les druzes sont une communauté supra-tribale qui transcende l'espace et la géographie», explique Makram Rabah, professeur adjoint d'histoire à l'Université américaine de Beyrouth.
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Les plus d'un million de druzes du Moyen-Orient «ont joué un rôle très important» dans la région, ajoute M. Rabah, précisant qu'ils font partie «des communautés fondatrices» au Liban et en Syrie. Voici un aperçu de cette communauté que des heurts ont opposé ces derniers jours à des bédouins dans le sud de la Syrie.
Religion et traditions
La pensée druze est apparue en Égypte au début du XIe siècle comme une secte au sein du chiisme. Elle reste perçue comme un courant ésotérique par l'islam dominant. Entourée d'une forme de secret, elle intègre des éléments mystiques comme la croyance en la réincarnation dans l'homme. «On ne sait pas qu'ils sont druzes tant qu'ils ne le disent pas», selon Makram Rabah.
La communauté n'accepte pas de nouveaux convertis et décourage les mariages hors de la communauté. Les fêtes religieuses druzes coïncident avec le calendrier musulman. La tenue traditionnelle druze est noire. Les hommes portent des bonnets blancs ou des turbans, et les femmes se couvrent la tête et une partie du visage avec un long voile blanc.
Où sont-ils ?
«Là où des frontières ont été tracées, les druzes ne les ont pas vraiment reconnues», affirme Makram Rabah, notamment parce que l'on se marie volontiers entre druzes de toute la région. «Les religieux jouent un rôle très important pour maintenir ces liens», souligne-t-il.
Avant le début de la guerre civile en 2011, la Syrie comptait, selon des estimations, environ 700.000 druzes, parlant l'arabe, la langue commune à tout le pays qui abrite une mosaïque de communautés. Selon l'universitaire, poète et calligraphe Sami Makarem (1931-2012), les druzes ont commencé à migrer vers le sud de la Syrie au XVIe siècle, dans une région aujourd'hui dénommée Jabal al-Druze, dans la province de Soueida.
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Les druzes syriens sont principalement concentrés dans ce bastion de Soueida, la province voisine de Qouneitra et la banlieue de Damas, notamment à Jaramana et Sahnaya, touchées au printemps par des violences confessionnelles. Au Liban, quelque 200.000 druzes vivent principalement dans le centre montagneux du pays et le sud, près des frontières israélienne et syrienne, selon des estimations.
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En Israël, environ 153.000 druzes sont citoyens israéliens, habitant principalement dans le nord. Contrairement aux autres Arabes israéliens, les druzes sont soumis à l'enrôlement obligatoire dans l'armée. Sur le plateau syrien du Golan, annexé par Israël, plus de 22.000 Druzes ont un statut de résident permanent. Seuls 1600 ont accepté de prendre la nationalité israélienne, les autres restant attachés à leur identité syrienne.
L'annexion du Golan par Israël a séparé des familles, bien que les druzes du Golan annexé aient souvent pu se rendre en Syrie pour étudier ou assister à des mariages. Certains druzes du sud de la Syrie se sont également installés en Jordanie voisine, où la communauté est estimée entre 15.000 et 20.000 personnes. Hors du Moyen-Orient, la diaspora druze a essaimé en Amérique du Nord, Amérique latine et Australie.
Politique
Les dirigeants druzes sont un ferment du nationalisme au Proche-Orient depuis l'empire ottoman. En Syrie, le druze Sultan Pacha al-Atrache, à la tête d'une insurrection en 1925-27, a été précurseur de l'indépendance de la Syrie face à la France, finalement obtenue en 1946. Au Liban, le leader druze Kamal Joumblatt a eu un rôle clé à partir des années 1950 jusqu'à son assassinat en 1977 commandité par la Syrie pendant la guerre civile.
Depuis la chute du président Bachar el-Assad en décembre, Israël a multiplié les gestes d'ouverture envers les druzes en Syrie, une solidarité diversement appréciée dans la communauté. Walid Joumblatt, 76 ans, qui a pris sa relève de son père, a exhorté les druzes de Syrie à rejeter «l'ingérence israélienne» et les leaders druzes de Syrie ont réaffirmé leur loyauté envers une Syrie unie, certains appelant cependant à une protection internationale après les violences du printemps.
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En Israël, le chef spirituel druze, cheikh Mowafaq Tarif, a lui appelé l'État hébreu à protéger les druzes de Syrie.

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