29-07-2025
Michel Audiard, roi des dialogues et des menteurs sur Paris Première
À l'occasion de son centenaire, le documentaire « Le Terminus des prétentieux » revient sur la vie et l'œuvre de cet auteur atypique.
À l'élite du septième art qui se moquait un jour de ses dialogues, Michel Audiard avait répondu du tac au tac : « De mauvaises langues me reprochent de ne pas savoir écrire, ce qui me paraît tout à fait normal puisque je n'ai jamais appris. » Néanmoins, moralement touché par ces critiques, il assurait qu'il serait plus célèbre mort que vivant… La postérité lui a donné raison.
Des formules dont il avait le secret sont entrées dans le langage courant. Parmi elles figurent « Les cons, ça ose tout, c'est même à ça qu'on les reconnaît » ou « Aux quatre coins d'Paris qu'on va l'retrouver, éparpillé par petits bouts, façon puzzle », respectivement lancées par Lino Ventura et Bernard Blier dans Les Tontons flingueurs. Un autre titre avait été envisagé pour ce film par Georges Lautner : « Le Terminus des prétentieux ». Il est devenu celui d'un documentaire racontant le scénario qu'Audiard n'a jamais écrit, par manque de temps, mais surtout par pudeur, sur son propre parcours.
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Un dialoguiste d'exception
Après avoir vendu des journaux dans la rue puis signé des chroniques de cinéma dans la presse, il est devenu un dialoguiste d'exception. Il ne l'imaginait pas quand, pour rendre service, il débute en corrigeant anonymement certains scripts. Sa rencontre avec Jean Gabin est déterminante. L'osmose est telle qu'écouter parler l'homme va lui suggérer des textes sur mesure. L'acteur va affectueusement le surnommer « le Petit Cycliste ». Audiard travaille ensuite pour Delon, Belmondo et beaucoup d'autres. Démontrant qu'il est aussi à l'aise comme auteur de films dramatiques (Un taxi pour Tobrouk) que dans les comédies, il fidélise un large public et finit par obtenir que son nom figure sur les affiches dans les mêmes caractères que celui de la star.
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Capable de boucler un scénario et des dialogues en moins de deux semaines, il a parfois signé jusqu'à 15 films par an. Et a également répondu systématiquement présent à l'appel de copains en difficulté sur un plateau, modifiant en quelques instants une scène ou des répliques, moyennant deux verres de vin blanc. Incapable de dire non à un producteur, il a mille fois accepté des réunions de production auxquelles il ne s'est jamais rendu. Il a donné d'innombrables rendez-vous dans un hôtel proche des Champs-Élysées où il a souvent brillé par son absence.
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Doué d'une imagination débordante dans l'art du mensonge, il est parvenu à se sortir de situations impossibles dans lesquelles il s'était embourbé en promettant, pour la fin du week-end, des textes dont il n'avait pas écrit le moindre mot le vendredi soir. Quelques instants après avoir appris la mort de François, l'un de ses fils, dans un accident de voiture, il a dissimulé son désespoir en travaillant sur un film pendant trois semaines d'affilée. Il a fini par évoquer ce drame intime dans La Nuit, le Jour et toutes les autres nuits, un roman où il a démontré qu'il était aussi, et peut-être avant tout, un grand écrivain.