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Vérification de l'âge sur les sites pornos : comment la technique du double anonymat va être testée en France
Va-t-on bientôt pouvoir contrôler l'accès aux contenus « problématiques » en ligne pour les autoriser aux seuls adultes ? Véritable serpent de mer, la mise en place d'un système
de vérification de l'âge des internautes
, comme l'appelle depuis de longues années de ses vœux le gouvernement français, vient de profiter d'un sérieux coup d'accélérateur.
Légal d'abord. Le Conseil d'État a en effet
invalidé ce mardi 15 juillet la suspension de l'arrêté interministériel
imposant aux sites pornos de demander l'âge de leurs utilisateurs. La décision avait été prise en mars par le tribunal administratif de Paris qui souhaitait attendre de savoir si le texte était compatible avec le droit européen.
Technique ensuite. Ce lundi 14 juillet, la Commission européenne a annoncé la mise en place, dans cinq pays de l'UE dont la France, d'un test grandeur nature pour une application de vérification de l'âge des internautes. « Une belle avancée, estime Justine Atlan, directrice générale de l'association e-Enfance spécialisée dans la protection des enfants et adolescents sur Internet. Cela va permettre de couper le sifflet des professionnels du porno en ligne qui pouvaient jusqu'à maintenant argumenter que la loi française n'était pas validée par les règles européennes. »
Dans quelques semaines au mieux et « avant la fin de cette année si la volonté politique suit » espère Justine Atlan, une application pourra être utilisée par les internautes adultes afin qu'ils puissent prouver avoir plus de 18 ans. « Le dispositif concernera tous les sites qui devront mettre en œuvre la vérification de l'âge, notamment
les plates-formes les plus à risques qui proposent des contenus inadaptés aux moins de 18 ans, sites pornographiques
, jeux de paris, de vente d'alcool ou de tabac en ligne », explique un conseiller de la ministre chargée du Numérique Clara Chappaz. De quoi, de facto, « protéger les enfants des contenus inappropriés », démontre Henna Virkkunen, commissaire européenne chargée des questions technologiques.
Encore à l'état de prototype, l'application appelée « mini-wallet » utilisera un système à double identification protégeant les données personnelles des utilisateurs, que les spécialistes en cryptologie numérique connaissent également sous l'acronyme « ZKP » pour « preuve à connaissance zéro » ( « zero knowledge proof » en anglais). La technique, largement utilisée dans
le monde des cryptomonnaies
, est sensiblement la même que lorsqu'une banque envoie un code à l'un de ses clients qui souhaite valider un achat en ligne, et prouver son paiement, sur un site marchand.
L'avantage réside dans la faculté de prouver son âge sans avoir à dévoiler son identité ou des informations comme sa date de naissance directement sur le portail d'entrée. L'application « mini-wallet » jouera le rôle de tiers de confiance ou de site passerelle, indiquant au site ciblé que l'internaute qui souhaite s'y promener en a bien le droit.
La technique,
recommandée par l'Arcom
(Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique), sera commune à l'ensemble des pays européens qui souhaiteront la mettre en place. Elle pourra également être déclinée
pour vérifier l'âge des mineurs souhaitant s'inscrire sur des réseaux sociaux
comme le souhaitent les pouvoirs publics français en les interdisant aux moins de 15 ans.
Il faudra toutefois attendre que Bruxelles termine ses enquêtes sur Facebook, Instagram et autre TikTok dans le cadre de son nouveau Règlement sur les services numériques (DSA), avant de transposer la règle européenne en une loi nationale.