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Pas tuable, la vie
Pas tuable, la vie

La Presse

time6 days ago

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Pas tuable, la vie

Cette chronique a été publiée le dimanche 29 mars 1987, en page A1. Nous la republions sans altérer les mots que l'auteur a utilisés à l'époque. Pas tuable, la vie. Le Liban en donne la démonstration chaque jour, depuis 12 ans. C'est bien là mon plus grand étonnement : j'allais voir la guerre, mais l'évènement à Beyrouth, c'est la vie. La vie malgré tout. La vie ordinaire, le quotidien des petites gens, pas si loin du train-train qu'on connaît chez nous, mais qui devient, sous les bombes, pure subversion, admirable refus des contraintes politiques, religieuses et militaires… À ce quotidien des petites gens, jamais ne se réfère la savante presse qui comptabilise pourtant avec grand souci d'exactitude chaque mort, chaque obus, chaque enlèvement (surtout quand c'est un Occidental qui est enlevé). Or, justement, après deux ou trois jours à Beyrouth-Est, ce qui frappe, si j'ose dire, ce ne sont pas les traces qu'a laissées la guerre, mais exactement le contraire : l'extraordinaire santé, l'incroyable solidité du tissu social après 12 ans de totale folie guerrière. On peut bien parler de miracle. Douze ans de guerre, l'appareil de l'État paralysé, des dizaines de milliers de réfugiés et de déplacés, pas de services : courrier, communications, transports, santé publique, tout est perturbé, pas de ramassage d'ordures régulier, pannes d'électricité qui durent parfois plusieurs jours, et pourtant, tout marche quand même ! Ne demandez à personne pourquoi et comment, personne ne comprend, mais c'est un fait : en plein cœur de Beyrouth cent fois bombardée, la vie continue presque sans heurts, les enfants vont à l'école, les gens vont à leur travail, font leurs courses, et apprennent ce qui se passe au Liban, comme vous et moi, et à peu près en même temps : par le journal et la télé ! Cela a l'air fou à dire, mais on circule en toute sécurité dans Beyrouth, y compris la nuit. À moins de bombardements, évidemment… En sortant du restaurant très tard l'autre soir, j'ai croisé des dames qui marchaient seules, et un couple de vieux qui allaient à petits pas en promenant leur chien. Un matin, je suis allé me perdre dans les ruelles en terre, défoncées par les pluies, du quartier populaire de Nabaa où personne ne parle français, seulement l'arabe et l'arménien. J'ai joué au football avec des enfants, j'ai goûté aux brochettes qui rissolent dehors et qu'on badigeonne de pâte d'ail avant de les rouler dans des galettes… On ne m'a pas laissé sortir d'une pistacherie avant que j'aie essayé toutes les noix et les amandes et, bien sûr, je n'ai pas pu payer… Dix fois on s'est proposé de m'aider. On m'accompagnait un bout de chemin. Canadien ? Ils étaient bien contents que je sois Canadien, ils l'eussent été tout autant si j'avais été Suédois, Grec ou Papou… Dans leur espace qui rétrécit, les étrangers leur ouvrent des fenêtres sur des ailleurs de plus en plus inaccessibles… – Et qu'est-ce qu'on pense du Liban au Canada, monsieur ? – Rien, je crois… C'était au Café de Verre, dans l'ancien quartier des souks, une manière de taverne où les vieux messieurs vont jouer au jacquet, en fumant leur narguilé et en buvant un café noir et affreusement sablonneux… – Rien c'est bien ! C'est mieux que mal ! Il y en a tant de par le monde qui croient que nous sommes les méchants chrétiens qui faisons la guerre aux bons musulmans… – Alors que c'est le contraire, bien sûr ! Le sarcasme ne lui a pas échappé. – Je suppose que vous êtes journaliste puisqu'il n'y a pas d'autres étrangers en ville en ce moment… Vous écrirez ce qu'il vous plaira, cela ne me regarde pas, mais si vous pouviez au moins établir un point, un seul, vous feriez plus pour ce pays que la majorité de vos confrères qui ont écrit de subtiles analyses sur notre conflit. Ce point le voici : dites bien, soulignez très fort, que c'est à cause de la guerre que les musulmans et chrétiens se détestent et se tirent dessus aujourd'hui, et non le contraire… – Le contraire ? – Ce n'est pas parce qu'ils se détestaient qu'ils se sont fait la guerre. Ils ne se détestaient pas du tout, chacun priait le dieu qu'il voulait, mais une guerre est venue d'ailleurs, qui a tout empoisonné en nous dressant les uns contre les autres… – D'ailleurs, dites-vous. Mais d'où ? – Vous avez le choix. D'Amérique et d'URSS, de Syrie et en plus, maintenant, d'Iran. Et naturellement d'Israël. Surtout d'Israël… Comme le font tous les Libanais en public (musulmans comme chrétiens), le vieux monsieur égrenait son chapelet tout en parlant… Aussi n'ai-je pas osé ajouter que, d'après moi, cette guerre venait un peu aussi du ciel où Allah et Dieu se chicanent pour savoir lequel est le plus grand. Si c'est beau ? Non, ce n'est pas très beau le Liban. Et ce n'est pas une belle ville, Beyrouth. Mais chut, il ne faut pas le dire, encore moins dire que la magnifique montagne environnante est lamentablement saccagée par des constructions tape-à-l'œil, et des péteuses tours à condos toutes en hauteur… Ce ne sont pas les gravats ni les trous qui font la laideur de Beyrouth, ce ne sont pas ses ruines, ce sont plutôt les horribles boîtes carrées de béton qu'on a construites dessus. Ça sent à plein nez la magouille immobilière, ça sent le fric vite fait sur le ciment encore frais… Justement, parlons-en de fric. Un poulet gros comme ça pour 2 $ US, la baguette de pain à 7 sous et la grande bouteille de Coke à 15 sous… Ah ! pour ça oui, en dollars américains, c'est la vie de pacha à Beyrouth ! Mais en livres libanaises, c'est peut-être un peu moins économique… Disons d'abord que le salaire minimum (qui vient d'être augmenté de 40 % !) est de 3200 livres libanaises par mois, c'est-à-dire 50 de nos dollars canadiens… Un prof de secondaire touche 65 $ par mois. Quant à Juliette Khouri, qui est vendeuse dans un magasin de chaussures, place Sassine, elle gagne le salaire minimum, 3200 livres… – Avant aussi je gagnais le salaire minimum, mais avant, quand le dollar valait trois livres au lieu de 107 comme aujourd'hui, avant, je pouvais m'acheter un peu d'or tous les mois… Je pourrais vendre mon auto, aujourd'hui, exactement dix fois le prix que j'ai payé il y a trois ans. Sauf qu'aujourd'hui je n'ai plus les moyens d'acheter des pneus… Avant, en plus, je sortais beaucoup, je m'habillais, fini tout ça… Pas tout à fait. Pas fini, fini. Pas encore. Il reste à Juliette à faire fondre l'or qu'elle achetait chaque mois… Toute la classe moyenne libanaise en est là : à puiser dans ses très confortables réserves. Ce qu'elle fait frénétiquement d'ailleurs. Il y a dans l'air une rage d'acheter, un besoin compulsif de consommer. Fierté de vouloir paraître jusqu'au bout, mais aussi va-tout du joueur qui joue son tapis… Les files s'allongent à la porte des bons restaurants comme le Retro, ''Os, et le Vieux Quartier. Le trafic est lourd de Mercedes et de BMW (je n'ai jamais vu, même en Allemagne, autant de Mercedes de ma vie). Décadence et dolce vita dans les boîtes de Joûnié où la jeunesse chromée mène grand train. Les gens, les femmes surtout, sont super bien habillées, look Paris, look New York… Je marchais dans la rue avec un milicien qui venait de m'expliquer qu'une balle de Kalachnikov vaut 5 $ : « C'est cher oui, mais tu vois en revendant les chiffons que celle-là porte sur son cul, on pourrait tirer toute la nuit… » Bien sûr, il y en a pour qui c'est fini depuis longtemps. Les réfugiés de la montagne, les déplacés, et même la toute petite bourgeoisie qui ne peut plus se payer l'indispensable, ni le pain, ni le médecin. Mais là non plus, ce n'est pas encore la grande grande faim (sauf dans les camps palestiniens, mais c'est une autre histoire dont je reparlerai). C'est que le pays est prodigue malgré tout. Les oranges, les avocats, les légumes, les fraises poussent entre les tours de la banlieue de Beyrouth. Non, ce n'est pas encore la grande faim. C'est seulement, pour l'instant, la très grande honte. Fier comme il est (et aimant épater), le Libanais supporte mal d'être dévalué… Et ce pourrait bien être le début de la fin du miracle. Ce que les obus n'ont pas réussi – détruire le quotidien – la crise va le faire. Le pire s'en vient. Quand ils ont l'habitude de ne manquer de rien, les hommes se font plus volontiers martyrs que pauvres.

Déballage
Déballage

Le Parisien

time6 days ago

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  • Le Parisien

Déballage

« Familles d'influenceurs ». Un nouveau terme pour signifier un grand déballage. Celui d'une intimité qui nous est étrangère, et qui devrait plus encore nous laisser indifférents. Quel est donc ce besoin de se mettre en scène perpétuellement ? Comment imaginer que le moindre de nos faits et gestes, du plus banal au plus idiot, peut intéresser notre voisin ou notre collègue de bureau ? Et se figurer que l'insignifiance de notre quotidien mérite qu'on s'y penche chaque jour ?

Foglia pour les non-initiés
Foglia pour les non-initiés

La Presse

time31-07-2025

  • Politics
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Foglia pour les non-initiés

La mort du chroniqueur Pierre Foglia suscite tristesse et nostalgie chez son fidèle lectorat, mais son œuvre est moins familière aux jeunes générations qui ont peu connu les journaux papier. En quoi son style était-il si mémorable ? Qui était Pierre Foglia ? Né en France en 1940, Pierre Foglia s'est établi au Québec dans la vingtaine. Il a d'abord été typographe, avant de travailler pour les journaux La Patrie, le Montréal-Matin et enfin pour La Presse, où il a surtout écrit dans la section des Sports. Il est ensuite devenu chroniqueur à La Presse en 1978, un poste qu'il a occupé pendant plus de 35 ans. Au fil de ses chroniques, il s'est doté de toute une série d'expressions qui ont fait sa marque, comme les « mon vieux » qu'il insérait dans nombre de ses titres et textes. PHOTO BERNARD BRAULT, ARCHIVES LA PRESSE Pierre Foglia à une manifestation du Printemps érable, en 2012, à la place Émilie-Gamelin Ses chats, le cyclisme, la politique et la religion sont autant de sujets récurrents qui ont habité ses textes. Après avoir écrit sur la vie quotidienne, les Jeux olympiques et huit Tours de France, et après avoir livré maints coups de gueule où il ne ménageait pas les personnalités publiques, Pierre Foglia a pris sa retraite en 2015, deux ans avant que La Presse ne publie sa dernière édition papier. Le banal magnifié Avec son regard aiguisé et légèrement décalé, Pierre Foglia faisait briller l'ordinaire, un trait qui a fait de lui un véritable chroniqueur du quotidien. « Foglia se rendait toujours à destination, mais il ne passait jamais par la porte d'en avant », souligne Jean Brouillard, lecteur assidu du chroniqueur, dont il republie les textes dans un groupe Facebook appelé Merci, Monsieur Foglia. « On le voit dans les reportages qu'il a faits en tant que journaliste. Il allait rencontrer Muhammad Ali en Afrique, mais il ne parlait presque pas de boxe. Le reste, c'était sa famille, la religion, la société. C'est pour ça qu'on lisait Foglia ! », ajoute-t-il. À la rencontre de l'autre Pierre Foglia était avant tout un chroniqueur de terrain qui osait sortir des sentiers battus. Il l'a notamment démontré en 2013, quand il a parcouru Bagdad à vélo afin d'offrir un regard inédit sur la ville à ses lecteurs. Un reportage qui a marqué Ariane Mukundente, fidèle lectrice du chroniqueur. « Il est en Irak pour nous raconter la guerre, il nous emmène chez l'habitant : sa vie, ses craintes, ses joies, ses fantasmes, ses chèvres, ses femmes. On comprend la guerre et ses origines dans quatre ou cinq paragraphes », se souvient-elle. PHOTO ARCHIVES LA PRESSE Pierre Foglia en reportage à Bagdad, en Irak Cette approche demandait du courage, souligne Isabelle Audet, directrice de l'information à La Presse. « Ça prenait aussi un grand désir d'aller au-delà de l'information contrôlée et d'aller chercher une vérité qui n'était pas accessible autrement », estime-t-elle. Pierre Foglia osait aller à la rencontre de l'autre, souligne-t-elle. « Ça nous rappelle l'importance d'éclairer nos angles morts et d'aller voir la vie qui grouille en dessous d'une grosse nouvelle. » La chronique, plus qu'une opinion Dans ses chroniques, Foglia ne faisait pas que donner son opinion : il montrait sa vision des choses. Une compétence rare qui s'acquiert avec l'expérience, souligne Kathleen Levesque, professeure de journalisme à l'Université du Québec à Montréal (UQAM). « Aujourd'hui, on est inondés des gens qui donnent leur opinion surtout sur Instagram, TikTok et compagnie, explique-t-elle. Mais ce n'est pas la même chose que de défendre une idée en se basant sur les faits. » Et Pierre Foglia argumentait avec style. « On ne lisait pas les chroniques de Pierre Foglia, on lisait Foglia. Il y a une nuance là », ajoute Kathleen Levesque, selon qui le chroniqueur a inspiré à des générations de jeunes journalistes le désir de marcher dans ses pas. Les coudées franches Pierre Foglia a bénéficié d'une liberté de parole hors norme, selon Kathleen Levesque. « C'était une époque où on prenait moins de gants blancs pour s'exprimer et où les avocats ne faisaient pas encore partie de l'infrastructure médiatique », explique-t-elle. Résultat : le chroniqueur n'hésitait pas à écorcher les sujets de ses textes. « Il était lui-même, sans censure, souligne Jean Brouillard. Ça se traduisait parfois par un message très doux, et parfois par une savate à la jugulaire. » Aux yeux de plusieurs stagiaires à La Presse, Pierre Foglia est le symbole d'une période foisonnante du journalisme québécois. « C'est un chroniqueur phare de son époque, souligne Marek Cauchy-Vaillancourt. Je me rappelle l'avoir lu dans la dernière édition papier de La Presse. C'est à ça que je l'associe. » Même si les plus jeunes ne connaissent que sommairement l'œuvre de Pierre Foglia, la plupart sont bien conscients de la marque qu'il laisse sur le paysage médiatique québécois. « Personne n'a repris le flambeau de cette plume et de cette liberté d'opinion depuis qu'il est parti », estime Thomas Emmanuel Côté.

Garmin Venus 3S : cette montre connectée tendance perd 100 euros sur Amazon
Garmin Venus 3S : cette montre connectée tendance perd 100 euros sur Amazon

Le Figaro

time16-07-2025

  • Le Figaro

Garmin Venus 3S : cette montre connectée tendance perd 100 euros sur Amazon

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