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L'école Pigier fête son 175e anniversaire : «Pour la formation de ses élèves, le fondateur avait créé de faux magasins»

L'école Pigier fête son 175e anniversaire : «Pour la formation de ses élèves, le fondateur avait créé de faux magasins»

Le Figaro15 hours ago
Paris, 1850. La France est en pleine révolution industrielle. Paris, son cœur battant, voit son activité commerciale et financière exploser, comme l'illustre Émile Zola avec son roman Au Bonheur des Dames, qui décrit l'ascension sociale fulgurante d'un modeste employé de commerce. Les usines tournent à plein régime, le commerce se développe, mais les entreprises peinent à recruter du personnel qualifié, capable de maîtriser les arcanes de la comptabilité. Face à ce constat, Gervais Pigier, un chef comptable, a une idée qui va révolutionner le paysage de la formation. Au lieu de se lamenter sur le manque de main-d'œuvre compétente, il décide de former lui-même les salariés dont il a besoin. Il ouvre alors « l'École pratique de commerce et de comptabilité ». Le concept est novateur : mettre les élèves en situation réelle. L'objectif est clair : former des employés immédiatement opérationnels. L'initiative est un succès. Rapidement, l'école se fait un nom. Et Pigier ne s'arrête pas là. Dès 1877, l'école lance les cours par correspondance. Trois ans plus tard, en 1880, elle innove encore en utilisant le phonographe pour l'enseignement des langues étrangères, une première pour l'époque. L'école s'adapte aussi aux évolutions sociétales : en 1890, elle ouvre une école destinée aux jeunes filles, où elles apprennent notamment le secrétariat, et s'offrent ainsi une voie d'émancipation professionnelle. L'école ne cessera d'innover et de se développer.
Aujourd'hui, après avoir été rachetée par la société Eduservices en 2010, elle fête ses cent soixante-quinze ans, et elle est donc la deuxième école privée la plus ancienne de France, après l'ESCP, fondée en 1819. Jean-Francis Charrondière est aujourd'hui directeur national de la marque. Après une maîtrise de droit à l'université Jean Moulin de Lyon, il rejoint directement Pigier en 1999, où il débute comme conseiller de recrutement avant de gravir les échelons pour devenir directeur adjoint en 2010. Il fait alors un détour formateur par d'autres écoles (MB Way et Win Sport Shool) avant de retourner chez son employeur initial en 2018 pour diriger Pigier Lyon avant d'accéder à de nouvelles responsabilités au niveau national. Il retrace les cent-soixante-quinze ans d'histoire de la marque.
LE FIGARO-ÉTUDIANT - Vous fêtez donc vos 175 ans, mais ce qui est curieux, c'est que je croyais que vous n'existiez plus… Je me souviens de vos publicités dans le métro pour les cours de secrétariat Pigier, mais on n'en voit plus aujourd'hui ?
JEAN-FRANCIS CHARRONDIERE -Aujourd'hui, l'École Pigier est bien vivante. Ce sont 13 500 étudiants répartis dans une trentaine d'écoles, dont la vocation professionnalisante est très forte. Grâce à l'apprentissage, la formation est gratuite mais aussi rémunérée. Cette particularité est si forte que nous nous présentons souvent comme 'la business school de l'alternance'. Alors oui, effectivement, nous avions l'habitude de mettre des affiches dans le métro, mais aujourd'hui notre communication est essentiellement numérique. Elle est vue principalement par les publics concernés, et moins par ceux qui ne le sont pas.
Pouvez-vous nous retracer les étapes-clé des 175 ans d'histoire de cette école ?
Elle a donc été fondée à Paris en 1850 par Gervais Pigier. C'était un chef comptable qui avait des difficultés à recruter d'autres comptables, et qui donc a créé une école pratique de comptabilité à Paris, devenue une école de comptabilité et de commerce. Ensuite, son fils Émile a développé l'entreprise sur toute la France. Il avait bien remarqué que l'État favorisait alors les formations pour jeunes filles. Et c'est donc à ce nouveau public qu'il a proposé des cours de sténographie et de dactylographie. Puis l'école continue de se développer, et, en 1970, il y a eu jusqu'à une centaine d'écoles Pigier en France et en Afrique du Nord. Au siècle dernier, le système était alors celui des 'concessions', qui ressemblait au modèle actuel des 'franchises', qui est d'ailleurs celui de notre société actuellement.
Si vous deviez expliquer l'essor de l'école grâce à un seul mot, quel serait ce mot ?
Si je devais expliquer d'un mot l'essor de nos écoles, je rappellerais que Gervais Pigier était un visionnaire. Il avait par exemple créé de 'faux magasins' pour améliorer la formation des élèves. Chaque école avait un 'bureau commercial' pour les exercices pratiques, avec des espaces de vente factices, avec leurs linéaires, une caisse enregistreuse qui fonctionnait réellement, un espace pour les stocks, et même des formateurs qui jouaient le rôle de clients pour simuler les processus de vente ! Donc, dans ces 'bureaux commerciaux', ces magasins factices, les étudiants mettaient en pratique ce qu'ils avaient appris en théorie. Ensuite, les Pigier ont continué d'innover, avec l'invention du 'Speedwriting', une sorte de sténographie 'maison', et Studial, une méthode pour taper efficacement et rapidement sur les claviers d'ordinateurs. Aujourd'hui, d'autres cours ont remplacé ces deux enseignements. Ce qui est normal, puisque les métiers d'assistant de direction et de secrétaire ont évolué : la prise de note rapide, c'est fini, les dirigeants tiennent eux-mêmes leur agenda et utilisent la dictée vocale pour prendre des notes ou même rédiger des textes.
Aujourd'hui, quels sont vos projets pour l'école Pigier ?
À court terme, nous allons ouvrir une trente-et-unième école à Clermont-Ferrand, à la fin de l'année 2025. Sinon, d'une manière générale, il se trouve que nous étions surtout centrés sur les formations Bac +2, comme les BTS, mais nous avons aussi lancé les Bachelors en trois ans, et les MBA en cinq ans. Bien entendu, nous sommes aussi très engagés sur l'intelligence artificielle : nous formons notamment nos élèves à écrire des prompts efficaces, et l'enseignement est graduel : initiation à l'IA en année 1, jusqu'à la formation à l'art de manager grâce à l'IA en année 5. Il faut souligner que l'IA bouleverse la formation : puisque les connaissances sont facilement accessibles, les professeurs doivent enseigner différemment, en misant sur leur charisme ou encore sur la «gamification», c'est-à-dire le fait d'apprendre en utilisant les codes du jeu. Nous organisons donc souvent des challenges, des 'business games', comme le Challenge Performance pour les Bac +3, avec des groupes de travail qui font interagir les élèves de plusieurs filières : comptabilité, RH, communication… Ces exercices sont très formateurs pour le travail en équipe et la pluridisciplinarité.
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La loi Duplomb en partie censurée par le Conseil constitutionnel, « inacceptable » pour la FNSEA

LOI DUPLOMB - La FNSEA et la Coordination rurale se sont insurgées ce jeudi 7 août contre la décision du Conseil constitutionnel de censurer la réintroduction de l'acétamipride, pesticide interdit, prévue par la loi Duplomb, tandis que la Confédération paysanne a salué une « victoire d'étape ». « C'est un choc, c'est inacceptable et incompréhensible », a déclaré jeudi à l'AFP Jérôme Despey, vice-président du puissant syndicat agricole, la FNSEA, alliée aux Jeunes agriculteurs. « C'est inacceptable que le Conseil constitutionnel continue à permettre des surtranspositions » du droit européen qui autorise l'acétamipride jusqu'en 2033 dans l'Union européenne, a-t-il ajouté. Le texte adopté au Parlement prévoyait cette réintroduction « pour faire face à une menace grave compromettant la production agricole », sans limite dans le temps ni de restriction sur les produits concernés, mais avec une clause de revoyure « à l'issue d'une période de trois ans ». Les Sages ont estimé que « faute d'encadrement suffisant » sur la durée, le type ou la technique de traitement et sur les filières concernées, cette mesure était contraire à la Charte de l'environnement, qui a valeur constitutionnelle et affirme notamment « le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé ». Un « abandon » Pour Jérôme Despey, cette censure est due à un « manque de précisions » dans l'écriture de loi et il a appelé le président Emmanuel Macron et le Premier ministre François Bayrou à « trouver un cadre législatif » pour concrétiser leurs promesses aux agriculteurs. Il a toutefois salué la validation des « allègements administratifs » pour construire des bâtiments d'élevage et des ouvrages de stockage de l'eau. « Cette décision marque l'abandon pur et simple de certaines filières de l'agriculture française, alors même que notre dépendance aux importations s'accentue au détriment de nos exigences sociales et environnementales », a ajouté Arnaud Rousseau, président du syndicat, sur X, en référence entre autres aux betteraviers qui voulaient notamment combattre la jaunisse des plantes avec l'acétamipride. « 400.000 agriculteurs face à 2 millions de pétitionnaires » Les Jeunes Agriculteurs se disent « exaspérés car certains en ont profité pour relancer une énième guerre de tranchées visant à opposer agriculture et écologie dans un débat qui se radicalise », a complété leur président Pierrick Horel dans un communiqué. La Coordination rurale, deuxième syndicat agricole, a vivement réagi dans un communiqué : « L'agriculture n'est rien pour eux (les juges du Conseil constitutionnel, ndlr) par rapport à l'environnement. Les 400.000 agriculteurs ne sont rien par rapport à 2 millions de pétitionnaires ». « Peu importe pour eux si les standards sanitaires, sociaux et environnementaux des produits étrangers que nous consommerons demain sont largement inférieurs à ceux imposés à l'agriculture française », ajoute la Coordination rurale, appelant à « favoriser les produits français ». Une « victoire d'étape » pour d'autres À l'inverse, la Confédération paysanne, troisième syndicat agricole, qui prône une « réelle » transition agroécologique, militait avec de nombreux ONG et scientifiques contre le retour de ce pesticide qualifié de « tueur d'abeilles ». Son porte-parole Stéphane Galais a salué auprès de l'AFP une « victoire d'étape », appelant à « continuer de mettre la pression pour obtenir une réorientation des politiques agricoles ». « On espère que la mobilisation ne s'éteindra pas », a-t-il ajouté en référence au succès inédit d'une pétition qui a réuni plus de deux millions de signataires contre la loi Duplomb et la réintroduction de ce néonicotinoïde. Cette décision « n'est qu'une victoire en demi-teinte (...) Les articles restants annoncent la fin d'une agriculture indépendante, familiale et transmissible », a ajouté la Confédération paysanne dans un communiqué. Entre « ingérence des juges » et « victoire pour l'écologie » « En se comportant comme un législateur alors qu'il n'en détient pas la légitimité démocratique, le Conseil constitutionnel scie la branche sur laquelle il est assis », a estimé Marine Le Pen après la censure des « Sages » quant à la réintroduction de l'acétramipride. 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