
«Une lente descente aux enfers» : la ministre de l'Agriculture Annie Genevard au chevet des caves coopératives
Les caves coopératives produisent toujours la moitié du vin français, mais confrontées à la crise générale du secteur, certaines peinent à tenir leur rôle d'amortisseur social, et déjà des rapprochements s'annoncent. «C'est une lente descente aux enfers», décrit Joël Boueilh, président des Vignerons Coopérateurs de France, qui tiennent jeudi à Paris leur 52e congrès avec pour mot d'ordre «Cap sur la transformation». Climat, recul de la consommation, droits de douane menaçants : les nuages s'amoncellent pour la viticulture.
Les quelque 550 coopératives du pays, réunissant près de 60% des vignerons français, sont traditionnellement «un tampon, un amortisseur» pour leurs adhérents, dont elles achètent, vinifient, écoulent le raisin, souligne Joël Boueilh. Pendant quatre années d'aléas météo, «on a peu produit mais on a essayé de garder les revenus des vignerons. En 2025, on va avoir une récolte normale mais désormais on se demande : qui va boire ce vin ?» Au cours de ces années «on a consommé de la trésorerie, si bien qu'aujourd'hui des caves n'ont plus de ressources pour leur gestion quotidienne», poursuit le vigneron gersois.
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«On arrive au bout d'un système»
Déjà 2024 a vu des défaillances, avec «quelques plans sociaux», alors que les coopératives, qui réunissent 35.000 vignerons, emploient aussi en propre 17.000 salariés. À cela il faut ajouter la campagne d'arrachage de 27.000 hectares de plants : «des cuves resteront vides, tandis que les charges seront identiques, cela va être plus dur pour ceux qui restent», souligne Joël Boueilh pour qui «on arrive au bout d'un système dans pas mal d'endroits». Selon le syndicat, une centaine de coopératives sont en difficulté et «vont devoir envisager sérieusement regroupements, fusions...», en tout cas une «mutualisation de charges», et pas seulement dans le Sud et les régions productrices de vin rouge. «Il y a toujours eu des mouvements de fusions, mais on est à la veille d'une accélération notable», prévient Joël Boueilh : on s'éloigne toujours plus du «une cave par village» du début du 20e siècle.
En Alsace, terroir de blancs et de bulles, les coopératives ont un autre avantage, note Pierre-Olivier Baffey, président de la cave Bestheim : depuis les années 1950 elles mettent en bouteille et vendent elles-mêmes aux clients. Pour autant il note un «petit tassement de la performance», et depuis deux ans il a fallu fournir un «complément de revenu» aux 310 adhérents. Alors Bestheim, déjà issue de la fusion de 4 entités dans les années 2000, discute aujourd'hui d'un rapprochement avec une cave voisine. Objectif : développer des équipements pour le crémant, et aussi soutenir le développement commercial, y compris en France, explique-t-il.
Une «vision moderne» qui marche
Dans le Luberon, Michel Isouard, de la cave Louerion, abonde : «On a peut-être un peu trop laissé le négoce aux négociants», dit l'administrateur, dont la cave vend beaucoup en direct et a diversifié son offre, blanc, bio et rosé. À leur congrès, les Vignerons coopérateurs recevront jeudi la ministre de l'Agriculture Annie Genevard qui leur a promis 10 millions d'euros d'aide à la restructuration (dépollution des sites, transport des matériels etc), dont ils attendent toujours le déblocage. «Le ministère fait tout ce qu'il peut pour ne pas avoir à les débloquer d'ici la fin de l'année, pour cause de restrictions budgétaires», s'agace Joël Boueilh. La ministre a expliqué en mai en commission des finances de l'Assemblée avoir dans l'immédiat confié à ses services «une mission sur la restructuration des caves coopératives».
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Pour Vincent Creton, directeur de la cave de Sancerre (76 vignerons), la forme «coopérative a un très grand avenir, c'est une vision extrêmement moderne du vin et de l'entreprise, contrairement à ce qui a été véhiculé dans les années 70-80». La cave née en 1963 s'est lancée dans une «modernisation des outils et de son image» : conquête de marchés aux États-Unis mais aussi au Japon, repositionnement dans «le luxe abordable» en France, recrutement d'un maître de chais, nouveautés comme le rosé non millésimé. «On casse les codes, on propose d'autres choses, on veut que ce soit bon et aussi valorisé parce que derrière, l'objectif est la juste rémunération des coopérateurs», dit M. Creton. En deux ans, son chiffre d'affaires est passé de 11,4 millions d'euros à plus de 15 millions.
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