
Série sur Apple TV / Canal +: Smoke se consume à force d'intensité
L'excellent dramaturge Dennis Lehane enfume ses fans sur la piste d'un mystérieux pyromane. Apple TV/Canal +, 9 x 40 min. Publié aujourd'hui à 13h44
Quand il se range du côté des séries, le romancier Dennis Lehane privilégie la source du réel. Comme «Black Bird» qui basait son suspense sur un très réel psychopathe, «Smoke» trouve sa densité dans les confidences d'un authentique pyromane.
Riche matériel… Avec une délectation morbide qui suinte encore dans «Smoke», John Leonard Orr a révélé dans le podcast «Firebug» ses motivations criminelles – 2000 incendies volontaires en trente ans. De quoi étaler par le détail le fonctionnement de sa psycho détraquée.
En dramaturge finaud, Dennis Lehane noie les scènes dans une abondance de précisions fascinantes. A priori, l'expert Dave Gudsen (Taron Egerton), ancien pompier, mène l'enquête avec une sagacité indiscutable. Il est flanqué d'une détective fouineuse elle aussi.
La façade se lézarde assez vite d'excentricités pointées, une arrogance blessée, une ambition d'écrivain de best-seller, un goût pour les jeux sexuels brûlants. D'autres vies cabossées apparaissent, Freddy l'ouvrier de fast-food brimé qui colle au profil du coupable idéal, un pompier frustré aux penchants tordus, etc.
Face à «Smoke», les aficionados de Dennis Lehane retrouveront la maîtrise de l'écrivain puissant tout autant que scénariste inspiré – «Mystic River» de Clint Eastwood, «Shutter Island» de Martin Scorsese ou «Gone Baby Gone» de Ben Affleck . Mais une légère déception perce face à de la «belle ouvrage» où chaque pièce du puzzle s'emboîte un peu trop bien.
Lui qui a longtemps collaboré sur la mythique série « The Wire » connaît les rouages de la police américaine, ses mérites et turpitudes. Dans son cauchemar urbain, «Smoke» n'en manque pas. Le scénario brille par sa mécanique, qui valdingue pourtant entre plusieurs cas, implique des parenthèses psychologiques qui s'enchevêtrent, pointe ici et là des chronologies distinctes.
Manquent ces atmosphères lourdes de secrets, ce climat surréaliste tissé d'opacités ambivalentes que le natif de Boston réussit d'habitude à susciter. Voir le flottement démoniaque qui agitait «Black Bird» en un regard. Le comédien Taron Egerton était déjà de l'aventure mais dans une performance beaucoup plus fine.
C'est d'ailleurs comme si le feu avait rongé les ambitions à l'œuvre. Concentré à restituer le drame qui brûle dans des scènes spectaculaires d'incandescence narrative, Dennis Lehane frappe par son audace mais échoue à canaliser ses envies de subtilités artistiques. Rien de déshonorant mais pour un maître de la série noire, ça sent le pétard mouillé.
Notre note: 3,5 étoiles
Cécile Lecoultre, d'origine belge, diplômée de l'Université de Bruxelles en histoire de l'art et archéologie, écrit dans la rubrique culturelle depuis 1985. Elle se passionne pour la littérature et le cinéma… entre autres! Plus d'infos
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