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L'amitié qui nous grandit
L'amitié qui nous grandit

La Presse

time13-07-2025

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L'amitié qui nous grandit

Une fois par mois, notre journaliste nous entraîne dans sa quête de réflexions philosophiques pouvant mener au bonheur. L'amitié mène à un bonheur que rien d'autre ne peut procurer et il vaut la peine de la cultiver. Combien d'entre nous, dans des moments de joie comme de peine, ont souhaité une seule présence, celle de leurs amis les plus proches ? Bien souvent, ils ont été à la source même des instants les plus heureux de nos vies. Ou du moins, ils en ont fait partie. Ils ont aussi été présents pour panser nos malheurs, indispensable compagnie pour traverser les épreuves. Pensez à ceux envers qui vous ressentez la plus profonde amitié. Ils se comptent souvent sur les doigts d'une seule main. Sans eux, un vide. Grâce à eux, les conversations qu'on ne peut avoir avec personne d'autre, les silences confortables, les échanges enrichissants… Les tenir pour acquis serait une grave erreur, car l'importance de nos amis pour une vie heureuse est éminente. Lorsque je me prête à l'exercice, je compte une main complète. Cinq personnes. Lorsque je pense à elles, un sentiment me comble : l'apaisement. Elles m'apportent sécurité, écoute, compréhension, mais aussi différentes perspectives et idées. Quelle ne fut pas ma satisfaction lorsque j'ai lu pour la première fois que la philosophie aristotélicienne considère qu'un véritable ami représente un « autre soi-même », un complément qui nous permet de tendre vers plus de bonheur. C'est cela que je ressens pour mes amis les plus proches. « Pour Aristote, l'autrui est un autre soi-même dans l'idée où l'être humain veut se rapprocher le plus possible d'une parfaite autosuffisance », explique Étienne Rouleau, doctorant au département de philosophie de l'Université de Montréal (UdeM). « Puisque l'être humain ne peut pas atteindre cet idéal d'autarcie, il ne peut qu'y aspirer, dans la mesure du possible. Aristote fait donc de la place pour autrui comme un complément : puisqu'il faut être autosuffisant pour être vraiment heureux, selon lui, autrui devient alors un autre soi-même. » Lorsqu'on se penche sur la définition que le penseur en avait, cette idée d'autre soi-même perd toutefois quelque peu en poésie. Pour Aristote, le bonheur ultime représente ce qu'on ressent lorsque l'on contemple le monde pour en obtenir une meilleure compréhension et une plus grande appréciation. Un humain est également plus heureux lorsqu'il penche le plus possible vers une complétude intérieure. Le véritable ami, dans cette optique, devient alors un partenaire de contemplation, tout comme une aide à l'épanouissement. Nos grandes amitiés nous permettent donc d'avoir une sorte d'autonomie de groupe, de mieux naviguer dans la vie, d'en faire un peu plus de sens, sur le chemin vers le bonheur. Aristote décrivait également l'ami comme une passerelle vers une meilleure connaissance de soi. « On est limités dans notre recherche pour se connaître soi-même, alors l'autre vient boucher les trous dans notre compréhension de qui on est », avance Étienne Rouleau. L'expert mentionne l'importance du « connais-toi toi-même » dans la tradition philosophique de Socrate et de Platon dans laquelle évoluait Aristote. En comprenant ses forces, ses faiblesses, ses désirs, on peut atteindre la sagesse et le bonheur, selon lui. Sur ce chemin, la présence d'amis est essentielle. Décupler ses joies Aristote s'est longuement penché sur le thème de l'amitié. Le terme « philia », qui désigne ce que l'on définit aujourd'hui comme l'amitié, est l'un des quatre mots grecs que l'on utilise pour parler de l'amour. Il est l'opposé de « phobia », la peur ou l'aversion. Ainsi, il n'y a rien de plus plaisant que l'amour, auquel participe grandement l'amitié. Mais rien n'est simple lorsqu'il est question de relations interpersonnelles. Et l'effort qu'il faut donner pour entretenir les amitiés n'est pas à sous-estimer. Il faut consacrer du temps à nos quelques véritables amitiés pour pouvoir jouir de ce qu'elles ont à nous offrir. Étienne Rouleau, doctorant au département de philosophie de l'Université de Montréal Si l'idée mise de l'avant jusqu'ici semble insister sur ce que l'on retire de nos amitiés, il n'est pourtant aucunement question de relations intéressées ici, au contraire. La véritable amitié, celle que valorise Aristote et que nous devrions tous prioriser aujourd'hui, est celle qui se déploie dans sa réciprocité. Tout ce que mes amis m'offrent, je le leur donne en retour. Tous les efforts qu'ils nécessitent, je les déploie. « Le point le plus frappant, c'est [qu'Aristote] nous dit qu'en plus de se percevoir dans autrui, lorsque je jouis de notre amitié, il y a une plus-value parce que je constate son plaisir aussi, ce qui m'amène plus de plaisir », note le doctorant de l'UdeM. Par nos amis, l'on partage et décuple nos joies. Rappelons que la vertu (sagesse, justice, douceur, générosité, etc.) est pour Aristote le moyen d'atteindre le but ultime de la vie : le bonheur. « Les relations qui nous mènent à des comportements vertueux nous approchent de la quête de bonheur, tout comme l'inverse est vrai, mentionne Étienne Rouleau. C'est une leçon intemporelle. »

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