02-08-2025
«Un souvenir qui va nous marquer à vie» : unijambiste, un Bordelais parcourt 70 km dans le désert de la Cappadoce
Pierre Borgella, un Bordelais qui a perdu une jambe dans un accident de moto, s'est mis au défi de terminer le marathon des sables en Cappadoce (Turquie). Une aventure haute en couleur durant laquelle il a pu s'appuyer sur son cousin, Léo Lefebvre.
Il ne croyait pas que c'était impossible, alors il l'a fait. À 24 ans, Pierre Borgella croque la vie à pleines dents malgré le terrible accident de moto qui l'a conduit à perdre sa jambe gauche, le 13 octobre 2019. Contre toutes attentes, contre les avis médicaux qui prédisaient qu'il ne marcherait plus jamais, le jeune homme refuse de voir son amour pour le sport se terminer. En juin, muni d'une paire de béquilles sur mesure et accompagné de son cousin, il a donc terminé le marathon des sables en Turquie. Une aventure hors norme, qui l'a conduit à parcourir à pied 70 kilomètres en quatre jours et en autosuffisance dans le désert de la Cappadoce.
«Je fais du sport et je ne me refuse rien. Je ne veux pas qu'on me prenne en pitié à cause de mon handicap. Je voulais aussi me prouver à moi-même et montrer à tous que rien ne m'est impossible malgré mon accident», nous explique d'emblée Pierre Borgella. Un mantra que le sportif assume : il a refusé que l'organisation du marathon des sables lui permette d'adapter son parcours. Il a aussi porté son matériel et sa nourriture comme tous les autres participants.
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«Exceptionnel»
Pour mettre toutes les chances de son côté, le jeune homme a consacré une année à la préparation de ce défi sportif. Renforcement des bras, des épaules et de sa jambe valide, pratique de trails en montagne, suivis médicaux pour trouver la paire de béquilles adaptée... Pierre Borgella était arrivé en Cappadoce avec l'ambition ferme de réaliser le parcours de 100 kilomètres. Cependant, il reconnaît avoir souffert. «J'ai eu des ampoules aux mains dès le premier jour et avec les fortes températures conserver mes gants était pire que tout. Mon moral était au plus bas», se remémore-t-il. Léo Lefebvre, le cousin qui l'a épaulé dans cette aventure, complète : «J'ai été impressionné qu'il ne baisse pas les bras. À la fin du premier jour, c'est moi qui lui ai dit qu'on ne ferait pas 40 kilomètres le lendemain. Je ne doutais pas de lui, mais je me demandais dans quel état il allait arriver sinon», explique son cadet, âgé de 21 ans. La décision est donc prise de se rabattre sur le parcours (plus raisonnable) de 70 kilomètres.
Quand nous avons veillé Pierre en soins intensifs, jamais nous n'aurions imaginé que l'horizon s'éclaircirait autant Geneviève Artigue, la grand-mère de Pierre et Léo
Les jours suivants de la course ont exigé autant d'abnégation. «Mon cousin m'a beaucoup aidé. Il tenait mes béquilles pour que je puisse grimper à la force de mes bras dans les endroits incessibles et il m'encourageait», décrit Pierre Borgella. Léo Lefebvre précise : «Pierre s'excusait beaucoup d'être lent et de faire des pauses jusqu'à ce que je lui dise d'arrêter. Je suis parti à ce marathon avec l'intention qu'il en profite à 100%. Je m'étais préparé à être patient et j'ai pris du plaisir à être là pour lui. Ce qu'il a fait, c'est exceptionnel.»
Vertus familiales
Pour Geneviève Artigue, leur grand-mère, cette aventure vécue entre cousins représente bien plus qu'un défi sportif. «J'ai porté ma croix au moment de l'accident de Pierre et j'ai eu très peur durant leur aventure. Le ciel nous a offert un cadeau exceptionnel en faisant jaillir la lumière de ce grand mal. Quand nous avons veillé Pierre en soins intensifs, jamais nous n'aurions imaginé que l'horizon s'éclaircirait autant», confie la septuagénaire. En pèlerinage à Rome durant l'excursion de ses petits-fils, cette catholique a «fait courir le bruit de leur aventure» pour qu'ils soient «portés et poussés par la prière».
Cette grand-mère a aussi été très émue de les voir prendre soin l'un de l'autre. «Sans Léo, qui a aidé Pierre gentiment et discrètement, cela aurait été impossible. C'est d'autant plus beau que petits, ils étaient jaloux l'un de l'autre et se bagarraient sans cesse», détaille-t-elle. Avant de nous souffler : «Ce sont les vertus de la famille qui se révèle dans cette épreuve. Je suis âgée maintenant, mais j'en suis fière : si j'ai réussi quelque chose dans ma vie, c'est bien cela.»
Une famille, dont les cœurs unis se sont élargis durant cette aventure. Les deux cousins, qui ont monté l'association «Un pas plus loin», ont reçu de nombreux dons, messages de soutien et de félicitations tout au long de leur projet. Ils ont aussi été tout particulièrement encouragés durant l'épreuve. «À l'arrivée, l'organisation avait réuni tous les participants et les enceintes jouaient une musique que Pierre adore. Il pleurait et avançait sous les applaudissements», s'émeut encore Léo Lefebvre. Et Pierre Borgella de conclure : «Je pense que c'est un souvenir qui va nous marquer à vie.»