a day ago
La nouvelle réalité dans l'œil d'un agent
Gavin McKenna a choisi de rejoindre la NCAA avec l'Université Penn State à l'aube de sa saison de repêchage dans la LNH, une décision qui a eu des répercussions partout dans le junior majeur canadien.
Depuis que la NCAA a ouvert ses portes aux joueurs de la Ligue canadienne de hockey (LCH), ce sujet a fait abondamment jaser dans l'univers sportif, encore plus quand le jeune prodige Gavin McKenna a délaissé les Tigers de Medicine Hat pour se joindre à l'Université Penn State. Aux yeux de l'agent Charles Blais-Dionne, représentant de la Creative Artists Agency (CAA) du réputé Pat Brisson, tout le monde peut sortir gagnant de cette nouvelle réalité.
Matthew Vachon
Le Nouvelliste
De passage à Los Angeles pour le camp annuel de perfectionnement de CAA, Blais-Dionne n'a pas hésité à poser beaucoup de questions à ses nouveaux collègues. Après tout, l'agence CAA représente justement McKenna, et elle a été au centre de ce coup de tonnerre qui a résonné très fort partout à travers la LCH.
Selon les discussions qui ont été tenues au cours de ce séjour en Californie, le nombre de matchs s'est révélé au cœur de la décision d'un point de vue sportif. L'accessibilité à une multitude de services directement sur le campus s'avère également un point qui est revenu.
« Quand on parle de l'encadrement des athlètes, la plupart des campus le proposent clés en main. Pour les autres, avec les nouvelles règles, il y a certains programmes qui injectent de l'argent pour offrir plus de services et encore mieux paraître sur le plan du recrutement », a indiqué Blais-Dionne, un ancien du Séminaire Saint-Joseph à Trois-Rivières.
C'est sans oublier la coquette somme (NIL Money) obtenue par McKenna qui serait, selon ESPN, dans les six chiffres et la plus importante dans l'histoire du hockey universitaire américain. Ça, personne ne peut donner ça dans la LCH…
PHOTO FOURNIE PAR CAA HOCKEY
Charles Blais-Dionne a rejoint l'agence CAA de Pat Brisson il y a un peu moins d'un mois.
La dernière étape avant les pros
Ce qui semble désormais acquis, c'est que dans une perspective de cheminement pour potentiellement atteindre les rangs professionnels, la dernière phase avant d'y arriver, c'est la route des universités américaines.
Dans les plus récentes décennies, la NCAA et la LCH pouvaient être perçues comme deux avenues distinctes, mais qui étaient plus ou moins à égalité quand il était question d'accéder aux différents circuits professionnels nord-américains.
Avec le changement de règle, la LCH se positionne un peu malgré elle comme une étape qui précède la NCAA et ensuite l'accession à la Ligue nationale de hockey (LNH), la Ligue américaine de hockey (LAH) ou l'ECHL.
« Désormais, ça [passer dans la NCAA] semble venir des directeurs du développement des joueurs. Après avoir fait trois ou quatre ans dans le junior, ils vont parfois dire que ce serait mieux pour leurs espoirs d'aller dans la NCAA dans le but de les confronter à un autre niveau de compétition afin de les rendre encore plus complets », explique Blais-Dionne.
Ce dernier a laissé savoir que CAA travaillait présentement à examiner avec chacun de ses protégés qui en sont à ce carrefour ce qui sera le mieux pour eux à l'automne 2026.
« Nous sommes en contact avec les directeurs du développement et les recruteurs. C'est beaucoup de temps d'analyse pour voir où l'athlète en est rendu. Au final, le plus important, c'est le développement du joueur. Le but n'est pas de faire payer le club junior ou le programme NCAA, mais de lui permettre d'avoir le plus de succès possible dans le hockey professionnel dans sa carrière. »
Dans les dernières semaines, la sélection du premier tour en 2025 des Blues de St. Louis, Justin Carbonneau, qui est représenté par Olivier Fortier de l'Agence Wasserman, a eu à choisir entre le junior (l'Armada de Blainville-Boisbriand) et la NCAA. Il a finalement opté pour retourner dans les Laurentides pour sa campagne de 18 ans.
PHOTO DAMIAN DOVARGANES, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS
Justin Carbonneau, à gauche, en compagnie du commissaire de la LNH, Gary Bettman, a récemment été repêché par les Blues de St. Louis. Il a dû décider s'il revenait dans la LHJMQ ou s'il allait dans la NCAA dès 18 ans.
« Suivant le dossier un peu de loin, c'était intéressant de voir comment ça s'est dessiné. CAA étudie beaucoup ce qui se fait ailleurs pour prendre les meilleures décisions dans le futur. Là, il y a une grosse vague de départs vers la NCAA. Il faut calmer le tout et analyser ce qui va se passer en équipe », dit Blais-Dionne.
La LCH beaucoup plus jeune
Si la LCH se positionne désormais comme un circuit de transition et non plus comme le dernier tremplin vers les rangs professionnels, ça va inévitablement amener des changements dans la manière de procéder des organisations. Que ce soit dans l'Ouest, en Ontario ou dans la Ligue de hockey junior Maritimes Québec (LHJMQ), la façon de construire les équipes ne sera plus jamais la même. C'est l'évidence même.
Prenons l'exemple des Cataractes de Shawinigan qui, en 2022, avaient le privilège de compter sur Mavrik Bourque, 19 ans, qui a mené l'équipe jusqu'à la conquête du trophée Gilles-Courteau. Dans le contexte d'aujourd'hui, Bourque, vu son statut de premier choix et l'état de sa progression, aurait très probablement pu se retrouver dans la NCAA à la demande des Stars de Dallas pour parfaire son développement.
PHOTO OLIVIER CROTEAU, ARCHIVES LE NOUVELLISTE
Au printemps 2022, Mavrik Bourque dominait la LHJMQ et a mené les Cataractes de Shawinigan au championnat au terme de sa saison de 19 ans.
En poursuivant cet exemple, ça aurait pu inciter le directeur général Martin Mondou à raccourcir son cycle et à foncer pour le titre à la saison des 18 ans de Bourque. Ce sera d'ailleurs une situation que les Saguenéens de Chicoutimi vont expérimenter alors que le prometteur défenseur Alex Huang rejoindra l'Université Harvard à 19 ans.
Tout cela permet d'illustrer le fait que les cycles de performance du junior sont amenés à se rétrécir, car les hockeyeurs d'élite de 19 ans qui font la différence dans la conquête des championnats partiront bien souvent une ou même deux saisons plus tôt. La ligue deviendra ainsi plus jeune et elle n'aura d'autre choix que de s'appuyer sur les talents de 16 à 18 ans qui s'y aligneront.
« Dans les cycles du junior, les équipes repêchent dans l'optique que le jeune joueur arrive à son sommet à 19 ans. Mon impression personnelle, c'est que les cycles vont devoir rapetisser et on devra miser sur la saison où les joueurs auront 18 ans. Dans le cas des élites, il faudra parler de 17 ans même.
« Ceux-là, ils voient ce que McKenna a fait. Il y aura de l'analyse à faire chez les familles. Le junior va devenir très talentueux, mais à un plus jeune âge. Les joueurs auront plus de place pour briller, d'ailleurs [vu les départs des plus vieux]. Si, grâce à ça, il y a plus de gars de la LHJMQ qui sont repêchés dans la LNH, la ligue sera gagnante. »