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L'Équipe
12-07-2025
- Sport
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« Chaque matin, j'ai une boule au ventre » : à Avoine-Beaumont, la tension monte d'un cran
Les témoignages de Kaylia Nemour et de licenciés d'Avoine-Beaumont s'inscrivent alors que l'enquête judiciaire se poursuit autour du club de Marc et Gina Chirilcenco. Après trois ans de bras de fer, la Fédération française de gymnastique semble jouer l'apaisement avec le club d'Avoine-Beaumont, multiple champion de France. Gina Chirilcenco, qui y officie avec son mari Marc, a ainsi été réintégrée au staff de l'équipe de France dès les Championnats d'Europe juniors 2024, où deux de ses protégées avaient participé au titre collectif, Elena Colas étant même sacrée en individuel. Quelques mois plus tard, un autre joyau du club, l'Algérienne Kaylia Nemour, devenait championne olympique aux barres asymétriques. Une performance majuscule qui aurait dû rejaillir sur ses entraîneurs... Si la jeune femme de 18 ans n'avait choisi de s'éloigner d'Avoine. Victime de nombreuses attaques par son ancien club, elle a décidé de s'exprimer. Une voix qui porte sans doute plus que les quelques anonymes qui avaient jusque-là osé lever le voile sur un environnement clos et dur. Début 2022, le médecin fédéral Pierre Billard alertait sur « des situations de mise en danger d'autrui » et « une suspicion d'emprise générale », la Fédération avait alors effectué un signalement à la mi-mai 2022, entraînant l'ouverture de plusieurs procédures, dont une enquête administrative menée localement et qui a absous le club et ses entraîneurs, cette dernière concluant même à un « acharnement de la Fédération française de gymnastique » contre Avoine. Mais, dans l'interview qu'elle nous a accordée, Nemour ose utiliser ce terme d'emprise. Alors qu'un livre sera publié en fin d'année, qui racontera son histoire, elle parle déjà d'humiliations. Et si elle réfute les violences physiques, d'autres gymnastes ou leurs parents affirment qu'elles existent. Plusieurs ont évoqué de tels faits dans le cadre d'une enquête judiciaire qui se poursuit depuis trois ans. Les gendarmes multiplient les auditions, même si Marc et Gina Chirilcenco n'auraient toujours pas été convoqués à ce jour. La procureur de Tours n'a pas souhaité faire de commentaire. Des SMS édifiants Le couple de techniciens sait souffler le chaud et le froid : jeudi, ils avaient invité plusieurs de leurs gymnastes chez eux, pour profiter de leur piscine et du jacuzzi. Les sourires sur les visages juvéniles tranchent avec d'édifiants SMS que l'on a pu consulter : « Chaque matin, j'ai une boule au ventre », écrit une jeune internationale ; « Rappelle-toi que c'est une secte », insiste une maman ; « Peur de la compétition, peur de Marc et la douleur, moi, maman, je ne dors plus », s'inquiète une autre. « Ma fille écrivait qu'elle avait envie de sauter du balcon » La maman d'une jeune gymnaste La mère d'une petite fille de 11 ans, sous couvert d'anonymat, confie : « Un jour, elle fait un stalder (élément aux barres asymétriques), elle m'a expliqué qu'elle a ressenti "comme si (sa) peau se déchirait sur la fesse". Elle l'a dit aux entraîneurs qui ne l'ont pas cru : "ça suffit, c'est dans ta tête." Elle ne pouvait même plus s'asseoir sur sa chaise à l'école ou à la cantine. Ma fille écrivait qu'elle avait envie de sauter du balcon. Je l'ai emmenée voir la psychologue. J'ai pleuré pour avoir une échographie qui a révélé une déchirure à l'insertion de l'adducteur, avec un épanchement de sang. Aucun entraîneur ne s'est excusé de ne pas l'avoir crue, juste qu'ils allaient s'adapter. Quand ils lui ont dit qu'elle pouvait quand même faire des barres, elle est restée devant, tétanisée et mutique. Et l'entraîneur a mis ses maniques à la poubelle. » Des situations comme celle-ci ne sont pas uniques. Une enfant souffre d'une fracture du coude, une technicienne lui retire son attelle et la force à tendre son bras ; une autre multiplie les crises d'angoisse quotidiennes, Gina Chirilcenco convainc sa maman de se taire : « Elle m'a dit que ce qui se passait dans la salle devait y rester, qu'il ne fallait pas que ma fille pleure à l'école, parce qu'il y avait une nouvelle directrice, qu'elle ne devait pas parler à la maîtresse, parce qu'elle ne voulait pas perdre ce sport-études qu'elle a mis tant de temps à construire. J'avais fini par me sentir coupable de l'impact que mes paroles pourraient avoir sur les autres gymnastes. Alors je fâchais ma fille. » Jusqu'à cette ultime crise d'anxiété : par peur d'aller au gymnase, la petite s'était enfermée dans les toilettes de l'école. Un membre du staff du club, qui l'a quitté depuis, a alors dit à la mère que tout était lié à la gym, qu'elle devait retirer sa fille pour la protéger. Aucune plainte déposée à ce jour Comment est-il possible que rien n'ait réellement filtré, que tout le monde accepte ces méthodes d'un autre âge ? Ici, on inculque aux enfants et leurs parents que ce qu'ils vivent est normal et nécessaire pour accéder au haut niveau. Présidents successifs du club, les pères de Youna Dufournet, de Carolann Héduit, puis la mère de Kaylia Nemour, toutes médaillées européennes et/ou mondiales, ont défendu le club. «Je culpabilise de ne pas avoir protégé mes filles, de ne pas avoir vu et de ne pas avoir protégé les autres enfants alors que j'étais présidente » Stéphanie Nemour, ancienne présidente du club Quand sa fille lui a parlé en début d'année, Stéphanie Nemour a été bouleversée. « Depuis huit ans, j'ai défendu corps et âme les entraîneurs, j'ai confié mes enfants avec une telle confiance. Je culpabilise de ne pas avoir protégé mes filles, de ne pas avoir vu et de ne pas avoir protégé les autres enfants alors que j'étais présidente », souffle-t-elle. Elle a récemment démissionné, comme trois membres du bureau, et c'est désormais le beau-frère de Marc Chirilcenco qui occupe le poste de président. Le 12 mai, Stéphanie Nemour a été convoquée par le major qui diligente l'enquête judiciaire, elle a été entendue pendant six heures et demie et risque de potentielles poursuites. Elle aurait aussi pu porter plainte, ne l'a pas fait. D'ailleurs, s'il y a eu des signalements, aucune plainte n'a été déposée à ce jour. À lire aussi Nemour : «Je n'oublierai jamais d'où je viens, ni ce que j'ai vécu» De Jesus Dos Santos : «J'aurais tellement aimé être moi-même» Viktor Gyökeres: «Je suis à la table des meilleurs attaquants du monde» Merlier-Milan, un duel entre finesse et puissance


Le Parisien
11-07-2025
- Sport
- Le Parisien
Gym : « Emprise », « humiliations », la championne olympique Kaylia Nemour charge son ancien club d'Avoine-Beaumont
La championne olympique de gymnastique aux barres asymétriques Kaylia Nemour a pris la parole ce vendredi. Elle en avait besoin. Depuis le 14 mai et l'annonce par son coach de son départ du club d'Avoine-Beaumont (Indre-et-Loire), un torrent de haine et de rumeurs en tout genre vise la Franco-Algérienne. « Je ne suis pas la première, et je ne serai pas la dernière à quitter un club. Dans mon esprit, les choses étaient claires : j'avais dit au revoir et merci, a-t-elle déclaré auprès de L'Equipe et du média Spot Gym . Seulement, tout le monde m'a tourné le dos, on attaque ma maman. J'ai besoin d'évacuer ce que j'ai en moi pour rétablir ma vérité et me concentrer sur mes prochains objectifs. Et qu'on laisse ma maman (ancienne présidente du club, NDLR) tranquille ! » Sa vie aujourd'hui, elle la mène du côté de Dijon , auprès d'une nouvelle coach, Nadia Massé, son ancienne chorégraphe. Une femme qui lui donne les clés pour être « fière d'elle ». Loin, très loin des méthodes vécues pendant sa première vie à Avoine, et qu'elle compare à de « l'emprise ». L'adolescente de 18 ans donne un certain nombre de détails et d'anecdotes effrayantes sur le traitement que lui réservait le couple Chirilcenco. Horaires d'entraînement à rallonge, « cris », « humiliations » publiques, blessures mal suivies, surveillance généralisée... « La phrase préférée de Marc et Gina, c'est : La gym de haut niveau, c'est comme ça . Quand on rentre à la maison, on ne se plaint même pas à nos parents, on est persuadé que ce sont effectivement les contraintes du haut niveau (...) J'ai vu, ailleurs, des gymnastes rigoler avec leurs entraîneurs, sans que ça les empêche de performer. » Kaylia Nemour raconte aussi n'avoir pas pu célébrer sa médaille d'or olympique obtenue sous bannière algérienne au terme d'un incroyable imbroglio . « Mes parents avaient proposé qu'on aille tous manger ensemble, mais Marc a refusé en prétendant que je n'avais pas le droit de sortir du village. Ils ont menti à ma famille, à mes amis, ça me fait tellement de peine pour eux. » Celle qui dit avoir « pensé à arrêter » la gymnastique se fixe désormais pour objectif les JO de Los Angeles. Avant cela, elle participera cet automne aux Mondiaux, du 19 au 25 octobre à Jakarta. Et encore avant au Moreau Sport gym les 13 et 14 septembre à Paris. De son côté, le couple Chirilcenco a refusé de répondre aux accusation de Kaylia Nemour. Auprès de l'Equipe, le mari explique ne pas avo ir « de désaccord avec Kaylia, elle est partie en bons termes avec nous ». La Fédération française de gymnastique a effectué plusieurs signalements ces dernières années auprès du club d'Avoine pour « mise en danger d'autrui » et « suspicion d'emprise générale ». En décembre 2023, la préfecture d'Indre-et-Loire a conclu « qu'il n'y avait pas lieu de proposer de mesures de police administrative à l'encontre des entraîneurs ». Cette décision avait mis fin à la procédure administrative mais pas à l'enquête judiciaire. Lancée en 2022, celle-ci est, selon nos informations, toujours en cours.