7 days ago
« J'ai cru que j'allais mourir » : le témoignage d'un marin philippin attaqué par des houthis en mer Rouge
« Nous sommes attaqués ! » Le message du capitaine retentit dans les haut-parleurs du Magic Seas, navire battant pavillon libérien, pris pour cible en
mer Rouge
. Cocoy, 38 ans, matelot
philippin
à bord depuis peu, comprend vite que ce n'est pas un exercice. Le bruit qu'il perçoit est celui des tirs : l'équipe de sécurité du cargo échange des coups de feu avec des assaillants
houthis
approchant à bord de plusieurs petites embarcations.
C'est la première attaque revendiquée par les
houthis
contre un cargo en 2025, après plus de six mois d'interruption. L'assaut a duré cinq heures. « C'était la panique, mais nous savions qu'il fallait bouger », raconte Cocoy, « C'était comme si nous étions en pilotage automatique. » L'équipage suit le protocole de sécurité en se regroupant dans le poste de rassemblement, l'endroit le plus protégé du navire.
Selon les informations de l'équipe de sécurité, trois gardes sri-lankais, le Magic Seas était encerclé : « des bateaux à droite, à gauche et à l'arrière », témoigne Cocoy. « Une embarcation plus grande avec une quinzaine de membres a tenté de monter à bord, mais heureusement, nos gardes armés ont pu les repousser. »
Le navire transportait 22 personnes, dont 17
philippins
. Ces derniers représentent près de 30 % de la main-d'œuvre mondiale de la marine marchande. En 2023, ils ont généré près de 7 milliards de dollars de transferts vers leur pays.
« J'ai perdu le compte du nombre de tirs que nous avons reçus », dit Cocoy, marin depuis plus de 15 ans mais pour qui la
mer Rouge
était une première. Pendant l'assaut, les visages de sa femme et de son enfant ne quittent pas ses pensées : « Je n'arrêtais pas de me demander : comment ils pourront vivre sans moi ? J'ai cru que j'allais mourir. »
Un missile a perforé la coque du Magic Seas. Dès que l'inondation est signalée, l'équipage évacue à bord d'un canot de sauvetage. Pendant trois heures, ils patientent avant d'être secourus par un porte-conteneurs panaméen. « C'étaient les heures les plus longues de ma vie », confie Cocoy.
Le lendemain, l'Eternity C, un autre navire dont l'équipage est majoritairement
philippin
, est coulé. Quinze marins sont morts ou portés disparus, dix ont pu être secourus. C'est l'attaque la plus meurtrière en
mer Rouge
depuis mars 2024, lorsque le missile tiré sur le navire True Confidence avait fait trois victimes.
Les rebelles Houthis
, soutenus par
l'Iran
, justifient leurs attaques contre la marine marchande en affirmant agir par solidarité avec
les Palestiniens
de
Gaza
. Leurs frappes visent des navires
« liés à Israël »
, affirment-ils.
Début juin, ils ont revendiqué avoir « secouru » des membres d'équipage de l'Eternity C, provoquant des accusations d'enlèvement de la part des
États-Unis
. Selon le journal d'actualité maritime Lloyd's List, six marins philippins pourraient être retenus en otage, mais
Manille
ne l'a pas confirmé.
« Je suis terrifié pour leur équipage », confie Cocoy. « Nous avons eu de la chance, nous avons tous survécu... Je prie pour que de nombreux membres de leur équipage puissent être retrouvés vivants. » Il en appelle aux armateurs : « Ce qui nous est arrivé n'était pas normal. » Il est convaincu qu'il faut trouver des itinéraires qui évitent la
mer Rouge
. « C'est une expérience que personne ne devrait vivre. »