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5 days ago
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Recul du soutien aux communautés LGBTQ+
Le Québec résiste encore au recul du soutien aux communautés LGBTQ+ observé en Amérique du Nord, écrit le chroniqueur. Nous sommes en 2025 après Jésus-Christ. Sous l'impulsion des politiques antidiversité de Donald Trump, toute l'Amérique du Nord est frappée par un recul du soutien aux communautés LGBTQ+. Toute ? Non. Car une petite province résiste encore et toujours à ce triste ressac. Cette province, c'est le Québec. C'est la belle (et vraie) histoire que je veux vous raconter aujourd'hui. Certes, tout n'est pas rose en matière d'ouverture à la diversité sexuelle ces temps-ci, même ici1. Mais en plein festival Fierté Montréal, lui-même secoué par une crise interne2, cette belle histoire a de quoi nous rendre fiers d'être québécois. C'est d'abord un article du New York Times qui a attiré mon attention. « Nous avons atteint la fin du capitalisme arc-en-ciel », a titré le quotidien new-yorkais3. J'avoue que je ne connaissais pas l'expression. Le capitalisme arc-en-ciel, ce sont ces entreprises qui courtisent la clientèle gaie de manière plus ou moins subtile. Pensez : peindre son logo aux couleurs du drapeau gai et tartiner des arcs-en-ciel un peu partout. Aux États-Unis, l'assaut des mouvements conservateurs contre les initiatives d'équité, de diversité et d'inclusion (EDI) a considérablement refroidi la tendance. Des marques comme Bud Light et Jack Daniels ont été victimes de boycottage après s'être associées à des personnalités queers. Depuis, plusieurs entreprises ont mis la hache dans leurs politiques EDI et craignent désormais d'afficher leur soutien aux communautés LGBTQ+. Mon collègue Mario Girard a récemment rapporté que le mouvement a gagné Toronto, où trois commanditaires ont largué Pride Toronto4. Fierté Montréal, pourtant, est épargné. Comment cela s'explique-t-il ? Les mouvements qui gagnent du terrain ailleurs sont-ils présents chez nous ? C'est ce que je voulais explorer. Du côté de Fierté Montréal, le directeur général Simon Gamache m'a expliqué plus tôt cet été, avant de s'absenter pour un congé de maladie, que le festival dépend très peu des grandes multinationales américaines. « On s'est développés en mettant de l'avant des entreprises canadiennes et québécoises, dit-il. C'est un choix qu'on a fait depuis longtemps et qui fait en sorte qu'on est moins dépendants de ce qui se passe au sud de la frontière. » La bonne nouvelle est que les entreprises locales ne montrent pas la frilosité observée aux États-Unis. Résultat : le financement de Fierté Montréal, loin d'être en recul, est en progression. « Quand le mouvement est arrivé aux États-Unis, certains commanditaires nous ont appelés pour nous demander si on était corrects, si on avait besoin de plus d'argent. Et ils ne cherchaient pas plus de visibilité. Quand ça arrive, je me dis qu'ils sont là pour les bonnes raisons. Je me dis qu'on a de bons commanditaires », dit-il. Moins d'arcs-en-ciel, plus d'engagement Ce qui nous amène au fameux « capitalisme arc-en-ciel ». Aux États-Unis, la communauté LGBTQ+ déplore évidemment que les entreprises se détournent de leur cause. Mais plusieurs sont aussi soulagés de voir la fin de ce qu'ils considéraient souvent comme une récupération mercantile de leurs revendications (ce qu'on appelle marketing rose, ou pinkwashing). Qu'en est-il chez nous ? « Je me rappelle que lorsque je suis entré en poste, il y a quatre ans, on avait des bouteilles de vodka arc-en-ciel dans notre entrepôt, des arcs-en-ciel partout, se rappelle Simon Gamache. Quatre ans plus tard, on n'en a plus beaucoup. Les entreprises semblent moins intéressées par la visibilité, moins intéressées par le fait de s'enrouler dans l'arc-en-ciel. Mais elles ont des actions beaucoup plus ciblées pour les communautés. » Il donne l'exemple d'un commanditaire qui, plutôt que de réclamer d'avoir son logo placardé partout pendant le festival, soutient maintenant des artistes queers. « Le changement est dans la manière avec laquelle ces entreprises travaillent. Je trouve ça plus sincère », dit M. Gamache. Mais ce désir d'être plus discret ne pourrait-il pas justement s'expliquer par une peur de s'afficher ? « Ce ne sont pas les conversations qu'on a, me répond Simon Gamache. Je le vois de façon très positive. » Une façon polie de dire : eille, le journaliste, arrête de chercher la bête noire ! Les nouvelles sont bonnes, prends-les ! Ces bonnes nouvelles me sont d'ailleurs confirmées par la Chambre de commerce LGBT du Québec, dont la mission est de représenter la communauté d'affaires gaie, lesbienne, bisexuelle et transidentitaire et de favoriser l'inclusion dans les milieux de travail. « On voit actuellement des entreprises qui désirent réaffirmer ce genre de valeurs – l'inclusion des personnes LGBT, l'équité, la diversité et l'inclusion. Elles nous contactent et nous disent à quel point c'est important pour elles, à quel point ça fait partie du vivre-ensemble au Québec », dit Thierry Arnaud, président de la Chambre. Le président du conseil d'administration, Mathieu Vézina, précise d'ailleurs que le nombre de membres (autant des individus que des entreprises) a bondi de 30 % l'an dernier. Une partie de l'augmentation s'explique par des membres qui reviennent après être partis pendant la pandémie à cause de l'arrêt des activités sociales, mais la Chambre accueille aussi de nouveaux venus. « Si ce qui arrive aux États-Unis se répercutait ici, on ne verrait pas une telle augmentation », affirme M. Vézina. Comme chez Fierté Montréal, la Chambre de commerce LGBT note aussi une tendance vers moins de flafla et plus de sincérité. On le voit avec les entreprises qui font partie de notre noyau depuis longtemps, mais aussi avec celles qui se joignent à nous. Elles ont une approche beaucoup plus authentique. Mathieu Vézina, président du conseil d'administration de la Chambre de commerce LGBT du Québec « Est-ce que ça pourrait changer ? Est-ce que, s'il y avait un changement politique comme aux États-Unis, des gens craindraient de perdre du financement du gouvernement ? s'interroge Simon Gamache. Peut-être. Je ne dis pas qu'on est immunisés contre ça. » Mais ce sont des spéculations. L'important, c'est qu'alors qu'on recule ailleurs, on continue d'avancer chez nous. Comme si la province était protégée du vent de peur de la diversité qui souffle actuellement par un bouclier. Un beau gros bouclier arc-en-ciel… avec une fleur de lys au milieu. 1. Lisez le texte « Gai, c'est redevenu une insulte » de Léa Carrier 2. Lisez le texte « Des groupes pro-Israël réinvités au défilé » 3. Lisez le texte du New York Times (en anglais ; abonnement requis) 4. Lisez le texte « Trois commanditaires larguent Pride Toronto » Qu'en pensez-vous ? Participez au dialogue


La Presse
6 days ago
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Le bouclier arc-en-ciel québécois
Le Québec résiste encore au recul du soutien aux communautés LGBTQ+ observé en Amérique du Nord, écrit le chroniqueur. Nous sommes en 2025 après Jésus-Christ. Sous l'impulsion des politiques antidiversité de Donald Trump, toute l'Amérique du Nord est frappée par un recul du soutien aux communautés LGBTQ+. Toute ? Non. Car une petite province résiste encore et toujours à ce triste ressac. Cette province, c'est le Québec. C'est la belle (et vraie) histoire que je veux vous raconter aujourd'hui. Certes, tout n'est pas rose en matière d'ouverture à la diversité sexuelle ces temps-ci, même ici1. Mais en plein festival Fierté Montréal, lui-même secoué par une crise interne2, cette belle histoire a de quoi nous rendre fiers d'être québécois. C'est d'abord un article du New York Times qui a attiré mon attention. « Nous avons atteint la fin du capitalisme arc-en-ciel », a titré le quotidien new-yorkais3. J'avoue que je ne connaissais pas l'expression. Le capitalisme arc-en-ciel, ce sont ces entreprises qui courtisent la clientèle gaie de manière plus ou moins subtile. Pensez : peindre son logo aux couleurs du drapeau gai et tartiner des arcs-en-ciel un peu partout. Aux États-Unis, l'assaut des mouvements conservateurs contre les initiatives d'équité, de diversité et d'inclusion (EDI) a considérablement refroidi la tendance. Des marques comme Bud Light et Jack Daniels ont été victimes de boycottage après s'être associées à des personnalités queers. Depuis, plusieurs entreprises ont mis la hache dans leurs politiques EDI et craignent désormais d'afficher leur soutien aux communautés LGBTQ+. Mon collègue Mario Girard a récemment rapporté que le mouvement a gagné Toronto, où trois commanditaires ont largué Pride Toronto4. Fierté Montréal, pourtant, est épargné. Comment cela s'explique-t-il ? Les mouvements qui gagnent du terrain ailleurs sont-ils présents chez nous ? C'est ce que je voulais explorer. Du côté de Fierté Montréal, le directeur général Simon Gamache m'a expliqué plus tôt cet été, avant de s'absenter pour un congé de maladie, que le festival dépend très peu des grandes multinationales américaines. « On s'est développés en mettant de l'avant des entreprises canadiennes et québécoises, dit-il. C'est un choix qu'on a fait depuis longtemps et qui fait en sorte qu'on est moins dépendants de ce qui se passe au sud de la frontière. » La bonne nouvelle est que les entreprises locales ne montrent pas la frilosité observée aux États-Unis. Résultat : le financement de Fierté Montréal, loin d'être en recul, est en progression. « Quand le mouvement est arrivé aux États-Unis, certains commanditaires nous ont appelés pour nous demander si on était corrects, si on avait besoin de plus d'argent. Et ils ne cherchaient pas plus de visibilité. Quand ça arrive, je me dis qu'ils sont là pour les bonnes raisons. Je me dis qu'on a de bons commanditaires », dit-il. Moins d'arcs-en-ciel, plus d'engagement Ce qui nous amène au fameux « capitalisme arc-en-ciel ». Aux États-Unis, la communauté LGBTQ+ déplore évidemment que les entreprises se détournent de leur cause. Mais plusieurs sont aussi soulagés de voir la fin de ce qu'ils considéraient souvent comme une récupération mercantile de leurs revendications (ce qu'on appelle marketing rose, ou pinkwashing). Qu'en est-il chez nous ? « Je me rappelle que lorsque je suis entré en poste, il y a quatre ans, on avait des bouteilles de vodka arc-en-ciel dans notre entrepôt, des arcs-en-ciel partout, se rappelle Simon Gamache. Quatre ans plus tard, on n'en a plus beaucoup. Les entreprises semblent moins intéressées par la visibilité, moins intéressées par le fait de s'enrouler dans l'arc-en-ciel. Mais elles ont des actions beaucoup plus ciblées pour les communautés. » Il donne l'exemple d'un commanditaire qui, plutôt que de réclamer d'avoir son logo placardé partout pendant le festival, soutient maintenant des artistes queers. « Le changement est dans la manière avec laquelle ces entreprises travaillent. Je trouve ça plus sincère », dit M. Gamache. Mais ce désir d'être plus discret ne pourrait-il pas justement s'expliquer par une peur de s'afficher ? « Ce ne sont pas les conversations qu'on a, me répond Simon Gamache. Je le vois de façon très positive. » Une façon polie de dire : eille, le journaliste, arrête de chercher la bête noire ! Les nouvelles sont bonnes, prends-les ! Ces bonnes nouvelles me sont d'ailleurs confirmées par la Chambre de commerce LGBT du Québec, dont la mission est de représenter la communauté d'affaires gaie, lesbienne, bisexuelle et transidentitaire et de favoriser l'inclusion dans les milieux de travail. « On voit actuellement des entreprises qui désirent réaffirmer ce genre de valeurs – l'inclusion des personnes LGBT, l'équité, la diversité et l'inclusion. Elles nous contactent et nous disent à quel point c'est important pour elles, à quel point ça fait partie du vivre-ensemble au Québec », dit Thierry Arnaud, président de la Chambre. Le président du conseil d'administration, Mathieu Vézina, précise d'ailleurs que le nombre de membres (autant des individus que des entreprises) a bondi de 30 % l'an dernier. Une partie de l'augmentation s'explique par des membres qui reviennent après être partis pendant la pandémie à cause de l'arrêt des activités sociales, mais la Chambre accueille aussi de nouveaux venus. « Si ce qui arrive aux États-Unis se répercutait ici, on ne verrait pas une telle augmentation », affirme M. Vézina. Comme chez Fierté Montréal, la Chambre de commerce LGBT note aussi une tendance vers moins de flafla et plus de sincérité. On le voit avec les entreprises qui font partie de notre noyau depuis longtemps, mais aussi avec celles qui se joignent à nous. Elles ont une approche beaucoup plus authentique. Mathieu Vézina, président du conseil d'administration de la Chambre de commerce LGBT du Québec « Est-ce que ça pourrait changer ? Est-ce que, s'il y avait un changement politique comme aux États-Unis, des gens craindraient de perdre du financement du gouvernement ? s'interroge Simon Gamache. Peut-être. Je ne dis pas qu'on est immunisés contre ça. » Mais ce sont des spéculations. L'important, c'est qu'alors qu'on recule ailleurs, on continue d'avancer chez nous. Comme si la province était protégée du vent de peur de la diversité qui souffle actuellement par un bouclier. Un beau gros bouclier arc-en-ciel… avec une fleur de lys au milieu. 1. Lisez le texte « Gai, c'est redevenu une insulte » de Léa Carrier 2. Lisez le texte « Des groupes pro-Israël réinvités au défilé » 3. Lisez le texte du New York Times (en anglais) 4. Lisez le texte « Trois commanditaires larguent Pride Toronto » Qu'en pensez-vous ? Participez au dialogue