5 days ago
«Ici on ne manifeste pas» : l'État refuse d'ouvrir une nécropole de tirailleurs sénégalais pour un hommage jugé trop politique
L'Office national des combattants et des victimes de guerre (OnacVG) a refusé d'ouvrir la nécropole dite du Tata sénégalais de Chasselay (Rhône), dédiée aux tirailleurs africains, à une délégation de militants voulant y tenir une cérémonie d'hommage jugée trop politique.
Ils sont restés à la porte de la nécropole. Ce vendredi 20 juin, une délégation de militants associatifs parisiens s'est déplacée jusqu'au Tata sénégalais de Chasselay (Rhône), ce cimetière où reposent 196 tirailleurs africains massacrés par les nazis en 1940. Issus des collectifs Coordination 75 des sans-papiers et La Marche des solidarités, ils n'ont pu accéder à l'intérieur de ce lieu de mémoire, leur demande ayant été refusée par l'Office national des combattants et des victimes de guerre (OnacVG), en raison de la coloration politique cet hommage. Cette décision a été jugée inadmissible par plusieurs élus La France Insoumise, dont Aurélien Taché, député du Val d'Oise et président du groupe d'amitié France-Sénégal à l'Assemblée nationale. «C'est avec une profonde tristesse et un sentiment de honte pour la France que j'ai appris que vous aviez délibérément interdit l'accès au Tata sénégalais de Chasselay, le 20 juin dernier, à un groupe de personnes venues s'y recueillir», a-t-il écrit à la directrice de l'OnacVG, exigeant des excuses publiques.
«L'État a délibérément humilié les personnes présentes, ajoute un élu local de la commune de L'Arbresle, Sébastien Majerowicz, sur laquelle a eu lieu une partie du massacre du 20 juin 1940. L'objectif de ces personnes, pour certaines descendantes de soldats, était de se recueillir avec gravité et dignité sur les tombes du Tata sénégalais». Dans les messages annonçant l'évènement, les militants parisiens et Sébastien Majerowicz (LFI) ont aussi critiqué le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau (LR), accusé de «rafles» au lendemain du lancement de son opération anti-migrants pour laquelle 4000 policiers, gendarmes, douaniers et militaires ont été déployés dans les gares. C'est justement cette coloration politique qui a motivé le refus de l'OnacVG.
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Un hommage trop politique ?
«Le Tata sénégalais est ouvert à l'occasion de cérémonies commémoratives mais pas dans le cadre de manifestation, indique la préfète du Rhône, Fabienne Buccio, dans un courrier adressé au député l'ayant interpellée ainsi qu'à ses collègues LFI du Rhône. En effet, une manifestation à caractère officiellement politique, présentée par ses organisateurs comme une mobilisation générale en solidarité avec les 'tirailleurs d'aujourd'hui qui résistent contre le racisme au pouvoir' ne peut être considérée comme une cérémonie d'hommage ou une commémoration.»
«Ici on ne manifeste pas, il y a un devoir de mémoire pour ces soldats sacrifiés pour la France», a déclaré le maire Jacques Pariost qui a accueilli les militants dans sa commune. Il les a conduits devant la nécropole, leur a présenté le lieu et son histoire, et a promis de déposer la gerbe de fleurs laissée à l'extérieur. Il a aussi évoqué un précédent en 1996, quand une cérémonie similaire s'était «très mal passée». «C'est peut-être pour ça que le gouvernement n'a pas voulu», a-t-il esquissé.
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Les militants ont quant à eux regretté de ne pas avoir pu entrer dans la nécropole pour leur cérémonie d'hommage, finalement tenue devant les grilles du Tata. «Les organisateurs de la manifestation ont été prévenus en amont de cette fermeture», précise la préfecture du Rhône. Elle rappelle aussi que l'OnacVG a déjà eu l'occasion de fermer des lieux de mémoire à des manifestations politique, notamment au Mont Valérien.