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« Ma mère était prête à évacuer » : la fille de Stella, morte dans l'incendie de l'Aude, réfute la version du maire
Une tragédie cerclée de zones d'ombre. Stella, 65 ans, a perdu la vie dans la nuit de mardi à mercredi, sa maison de Saint-Laurent-de-Cabrerisse a été entièrement ravagée par le gigantesque incendie qui a dévasté 17 000 ha dans l'Aude. Le déroulé précis de cette funeste nuit est, à ce stade, encore confus.
Mercredi matin, Xavier de Volontat, maire de cette petite commune occitane, assurait auprès de BFMTV que la victime n'avait « pas voulu sortir de sa maison » malgré les demandes des autorités. « Hier (mardi) à 17h30-18 heures, les gendarmes, avec un conseiller municipal, ont fait le tour de toutes les maisons pour évacuer les deux quartiers qui étaient sous la menace des flammes », a-t-il raconté.
Mort dans l'Aude: "Cette dame n'a malheureusement pas voulu sortir de sa maison", explique le maire de Saint-Laurent-de-la-Cabrerisse — BFMTV (@BFMTV) August 6, 2025
« Tout le monde est sorti, cette dame n'a pas voulu sortir de sa maison en disant : je ne risque rien, je ne risque rien », a poursuivi Xavier de Volontat, témoignant de sa « tristesse ». Et de constater : « On l'a retrouvée cette nuit, complètement carbonisée ».
Consigne de confinement
Une version fermement contestée par Lydie, 25 ans, fille de la sexagénaire décédée, qui retrace pour notre journal le déroulé des événements. « Peu après 18 heures, ma mère m'appelle en vidéo sur mon portable. En panique, elle pleure, crie et me montre les flammes toutes proches du jardin. Je lui ai dit de partir. À ce moment-là, elle n'évoque aucun gendarme ou pompier qui serait venu lui dire d'évacuer », raconte cette psychologue qui vit à Montpellier.
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Immédiatement, Lydie compose le 18. « Le pompier qui répond me dit que ma mère ne doit surtout pas sortir de chez elle, qu'elle doit rester confinée dans la maison ». Un message régulièrement répété par les autorités. La jeune femme rappelle donc sa mère, qui a déjà rassemblé ses affaires au milieu des fumées et « pris les clés de la voiture » pour fuir. « Elle était prête à partir, mais je lui ai dit de se réfugier dans la salle de bains et de mettre une serviette en linge contre sa bouche », explique Lydie.
VidéoUne femme « retrouvée carbonisée » lors de violents incendies dans l'Aude
Sur place, la situation ne cesse d'empirer. « Les murs commençaient à brûler, la véranda a explosé et le salon était en feu ». Les pompiers rappellent alors Lydie pour l'informer qu'une « troupe » était « sur place », sans plus de précisions. Aux alentours de 19 heures, la psychologue rappelle sa mère, « qui suffoque », pour lui dire que les pompiers arrivent. « On s'est dit je t'aime, et j'ai raccroché ».
Décès annoncé à 5 heures
Toute la soirée, rongée par l'inquiétude et en quête d'informations, Lydie contacte tout à tour des habitants du village, le numéro d'urgence diffusé par la préfecture de l'Aude, puis les hôpitaux voisins. L'une de ses cousines appelle la gendarmerie. Sans succès. Peu après minuit, elle parvient à échanger avec un pompier qui lui affirme envoyer « une troupe » sur place.
Vers 2 heures, ce dernier rappelle pour lui dire que Stella ne se trouve pas dans la bâtisse. En revanche, son téléphone a été localisé à quelques kilomètres du domicile, sur la commune de Thézan-des-Corbières.
À 5 heures, la police se rend au domicile de Lydie, à Montpellier, pour lui annoncer que sa mère est morte. « Sans plus de détails », nous précise-t-elle. 30 minutes plus tard, la préfecture de l'Aude confirme le décès dans un communiqué de presse.
Versions contradictoires
Dans cette affaire, de nombreuses zones d'ombre restent à éclaircir. « Tout ce qu'on sait, c'est que ma mère a été retrouvée morte chez elle. Pourtant, on m'avait dit dans la nuit qu'elle n'y était pas. Et je ne sais pas non plus pourquoi son téléphone a borné ailleurs », regrette Lydie, qui précise qu'elle « n'incrimine personne » et a bien conscience de la confusion qui régnait sur le moment.
Auprès de Midi Libre, l'un des voisins de Stella donne une tout autre version : « Trois fois les pompiers y sont allés pour essayer de la faire venir au foyer (…) mais elle n'a pas voulu partir parce qu'elle avait son chien. Elle disait : non, non, je m'enfuirai s'il le faut », explique cet homme de 75 ans. « Ma mère n'a plus de chien depuis deux ans, je ne sais pas d'où ça sort », coupe Lydie, agacée.
La jeune femme en est certaine : sa mère n'aurait eu aucune réticence à quitter son domicile. « On avait déjà eu cette conversation, elle me disait qu'en cas d'incendie, elle prendrait ses affaires et partirait. Et mardi soir, au téléphone, elle était prête à évacuer », explique Lydie. Trois résidents du quartier de Stella, qui ont quitté leur domicile vers 18h15, confirment à Libération ne pas avoir reçu de consignes directes d'évacuation venant de gendarmes ou de conseillers municipaux.
Contactée par Le Parisien, la préfecture indique qu'une « une enquête a été ouverte par le parquet de Carcassonne pour établir les circonstances de ce décès ». Également sollicité, le maire Xavier de Volontat a catégoriquement refusé de commenter la version de Lydie.