6 days ago
Notre critique de Together : quand les amants deviennent des aimants
Le premier film de Michael Shanks mêle avec virtuosité body horror et humour noir.
Dave Franco et Alison Brie sont mari et femme dans la vraie vie. Pour son premier film, Michael Shanks ne pouvait rêver meilleur casting. Les époux hollywoodiens, à peine quadragénaires, sont parfaits pour incarner deux tourtereaux déjà déplumés par une vie de couple qui bat de l'aile.
Il est Tim, guitariste has been avant d'avoir connu la gloire, dépressif, en proie à des cauchemars - une psy évoquera les antécédents psychiatriques de sa mère. Elle est Millie, institutrice enjouée et combative malgré la désillusion - le prince charmant se révèle être un loser sans charisme. Les deux citadins sans enfants s'installent à la campagne pour changer d'air. Surtout elle, qui travaille dans une nouvelle école et sympathise avec son collègue et voisin, Jamie. Lui n'a pas le permis et fait semblant de composer des chansons.
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En explorant les environs, le couple chute dans une cavité étrange. Ils restent une nuit dans cette grotte humide avant de s'en extraire. À partir de ce moment, les premiers signes d'une force surnaturelle se manifestent. Leurs corps sont comme aimantés. Cette attraction n'est pas facile à vivre mais elle pimente une libido en berne. Un baiser bénin se transforme en bouche-à-bouche fougueux et douloureux. Un coït dans les toilettes de l'école de Millie tourne à la figure acrobatique. Faire chambre à part ne suffit pas. Quand Millie et Tim se réveillent un matin les bras collés comme des siamois, elle l'attache à une chaise et s'empare d'une scie électrique en avalant des rasades de whisky pour se donner du courage. Manque de chance, elle est droitière et doit trancher de la main gauche.
Force surnaturelle
Michael Shanks manie l'humour noir et le fantastique avec dextérité. Son « body horror » est un savant mélange entre le cinéma de M. Night Shyamalan et celui de David Cronenberg. Il ne néglige ni le mystère (Jamie est un voisin trop bon pour être honnête) ni le gore - interdit aux moins de 12 ans, le film est aussi visuellement impressionnant que The Substance de Coralie Fargeat. Et file avec malice la métaphore du couple fusionnel, entité monstrueuse, créature bicéphale aussi repoussante que fascinante. Après le récent Évanouis, de Zach Cregger, le cinéma de genre confirme sa capacité à transformer en visions d'effroi les pulsions et terreurs humaines, intimes ou sociétales.
On aurait tort de conclure trop vite que Together fait l'éloge du célibat, au détriment d'une conjugalité aliénante et liberticide - s'unir pour le meilleur et surtout pour le pire ? La fin est plus ambiguë, voire subversive dans une époque où individualisme, développement personnel et affirmation de soi sont rois. Le dénouement laisse entendre qu'il peut y avoir de la joie à faire « le grand saut ». C'est peut-être cela l'amour ouf, vraiment ouf.
La note du Figaro : 2,5/4