6 days ago
Pourquoi les hommes négligent leur santé et comment y remédier
Par
Elodie Chermann
A 64 ans, Domingos Adriano, originaire de Decines Charpieu, dans la banlieue de Lyon (Rhône), cumule deux boulots. Il travaille à mi-temps comme gardien dans une résidence et est concierge dans un hôtel. Mais cela ne l'empêche pas de s'occuper de sa santé. « Comme je suis diabétique, je vais tous les trois mois chez mon médecin de famille pour vérifier que mes analyses sont bonnes », témoigne-t-il.
C'est en faisant ces examens de contrôle qu'il découvre une anomalie en décembre dernier. Son dosage de prostate specific antigen (PSA), un marqueur du cancer de la prostate, est particulièrement élevé. Il prend aussitôt rendez-vous avec le Dr Arnaud Cimier, chirurgien urologue au Médipole de Lyon Villeurbanne, qui confirme le diagnostic : Domingos est bien atteint d'un cancer de la prostate. Il faut vite opérer. Fuites urinaires, difficultés sexuelles, les suites de l'intervention sont compliquées. Mais six mois après, Domingos va beaucoup mieux.
« Je ne peux qu'encourager les hommes à mettre en place un suivi médical pour éviter les mauvaises surprises, insiste-t-il. Le cancer de la prostate est une maladie qui ne fait pas mal, je n'avais aucun symptôme. Faire des examens réguliers m'a permis d'être pris en charge avant que les métastases ne se propagent.
Un réflexe loin d'être automatique chez tous les hommes. D'après une étude de l'Insee parue en mars 2022, ils étaient 80% à avoir consulté un médecin généraliste depuis moins d'un an en 2019, contre 88% des femmes. Et c'est pire quand il s'agit d'aller chez un médecin spécialiste ! Seuls 42% des hommes en avaient consulté un au cours des douze derniers mois. Certes, il est parfois compliqué de décrocher un rendez-vous près de chez soi. Mais pour Arnaud Cimier, il y a aussi un défaut d'information sur la prévention en France. « Les femmes prennent très tôt l'habitude d'instaurer un suivi gynécologique lié notamment à la contraception, souligne-t-il. Mais chez les hommes, les problèmes surviennent en général plus tardivement. Ils se préoccupent donc moins de leur santé et ont tendance à faire traîner les choses. »
C'est ce qu'à vécu Salma avec son mari. « Fin 2024, j'ai remarqué que le grain de beauté qu'il avait sur la cuisse avait noirci et grossi, témoigne-t-elle. Je lui ai conseillé d'aller le faire contrôler mais il ne s'en est pas occupé. » Le voyant tarder, elle finit par lui donner l'adresse d'un dermatologue à Paris. Et là, coup de massue. On lui détecte un mélanome. « Il se l'est fait retirer sur le champ, explique-t-elle. Mais il va devoir faire en plus une sorte de curetage pour s'assurer qu'il ne reste pas d'autres cellules cancéreuses autour. Je crois que ça lui a servi de leçon. Certes on est cadres, on mène une vie à 100 à l'heure. Mais c'est capital de ne pas négliger sa santé. »
C'est ce que s'efforce de répéter le Dr Cimier à ses patients. « Il ne faut pas avoir honte de consulter pour des symptômes en lien avec les parties intimes, insiste-t-il. Cela peut vraiment vous sauver la vie. » En 2018, 86 hommes sont morts d'un cancer du testicule en France. La prévention est pourtant toute simple. « Il suffit de palper ses parties intimes, une fois par mois environ, à partir de 14 ans », explique le spécialiste. Et d'alerter en cas de toute anomalie.
« Entre 50 et 75 ans on préconise de réaliser les tests de dépistage contre le cancer de la prostate, qui est le cancer le plus répandu chez l'homme », rappelle aussi le Dr Cimier. « Quand la maladie est prise en charge tôt, les chances de guérison sont autour de 93%. »