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Poule, tigre, gendarme… les risques des étiquettes parentales
Poule, tigre, gendarme… les risques des étiquettes parentales

La Presse

time4 days ago

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Poule, tigre, gendarme… les risques des étiquettes parentales

« Être parent, c'est vivre des joies, des doutes, des défis et des ajustements. Au fil du temps, les parents adoptent différents styles parentaux selon les contextes », écrivent les auteurs. Hélicoptère, drone, tigre, curling, pompier, gendarme… Qu'ont ces mots en commun ? À première vue, difficile d'établir un lien entre eux. Pourtant, tous sont des adjectifs utilisés pour décrire des styles parentaux. Si cette catégorisation vise à mieux comprendre le sujet, elle peut aussi entraîner des effets inattendus, voire néfastes, pour les parents. Rima Habib Professionnelle de recherche et en implantation de programmes parentaux, Triple P Canada Dr Alexandre Hubert Pédopsychiatre, Paris Depuis quelques années, des termes ont émergé pour expliquer les différentes façons d'être parent. On les retrouve dans les médias, sur les réseaux sociaux, et dans certains discours professionnels. Cette tendance répond à un besoin collectif de mieux comprendre un rôle complexe en constante évolution. Le récent article de La Presse, « Le règne de l'enfant dieu, l'enfant qui fait la loi⁠1 », en est un bon exemple : il aborde des enjeux familiaux à travers des images fortes. C'est compréhensible : l'éducation des enfants n'est pas chose simple et les repères d'autrefois ne suffisent pas toujours. Cela nous invite justement à faire preuve de plus de nuance et de bienveillance envers les parents. Le rôle de parents ne se résume pas à une image Être parent, c'est vivre des joies, des doutes, des défis et des ajustements. Au fil du temps, les parents adoptent différents styles parentaux selon les contextes. La parentalité ne saurait donc se résumer à une seule image. En cherchant trop à classer les parents par des étiquettes, on risque de réduire leur vécu à une seule facette. Même bien intentionnées, les étiquettes peuvent peser lourd sur les parents. Ce ne sont pas tant les mots eux-mêmes, mais plutôt le sentiment d'insuffisance ou de jugement qu'ils pourraient induire. Elles désignent souvent des styles parentaux perçus comme peu optimaux, accentuant la culpabilité et ajoutant à la pression qu'ils subissent déjà. Selon l'Enquête québécoise sur la parentalité de 2022, 80 % des parents s'imposent une pression, en plus de celle de leur entourage et des réseaux sociaux2. De plus, les étiquettes ont tendance à définir la personne plutôt que son comportement. À force d'entendre ces généralisations, certains parents finissent par s'autostigmatiser, intériorisant les messages sociaux négatifs, ce qui peut nuire à l'estime de soi et à la recherche d'aide. D'autres parents peuvent également se rattacher à un courant éducatif pour se rassurer. Ce phénomène, visible sur les réseaux sociaux, alimente parfois les divisions plutôt que la compréhension. En France, les débats entre partisans de l'approche Montessori et ceux qui la critiquent, les « Ghettossori », en sont un exemple. Enfin, l'utilisation d'étiquettes peut figer des réalités parentales jusque-là fluides. En consultation, une mère nous confiait : « Je sais, je suis une maman poule, alors je demande au papa d'être plus autoritaire. » En s'identifiant ainsi, elle se cantonne à un rôle permissif et projette sur le père celui de la fermeté. Ces représentations peuvent engendrer des tensions, surtout si elles ne correspondent pas aux préférences des parents. Viser les pratiques plutôt que l'identité La catégorisation peut s'avérer utile pour mieux comprendre et intervenir, notamment en santé mentale. Cependant, même dans ce domaine, les pratiques évoluent : on privilégie de plus en plus de parler de personnes vivant avec un trouble afin de reconnaître leur vécu dans sa globalité, au-delà du diagnostic. Et si nous faisions de même dans notre manière de parler des parents ? Au lieu de dire qu'un parent est ceci ou cela, intéressons-nous à ce qu'il fait. Mettre l'accent sur ses pratiques lui redonne le pouvoir d'agir : celui d'un adulte capable de s'ajuster pour mieux répondre aux besoins de son enfant. Il peut ainsi mieux identifier ses difficultés et choisir les pratiques qu'il souhaite renforcer ou améliorer. Éviter d'étiqueter ne signifie pas tout excuser ni écarter les discussions difficiles. On tente plutôt de considérer le parent dans sa globalité, avec ses forces, ses limites, ses valeurs, et surtout, avec la possibilité de progresser. Et les étiquettes positives ? Souligner les qualités d'un parent, comme lui dire qu'il est « patient » ou « sécurisant » peut lui faire du bien. Mais l'aider à décrire précisément ce qu'il fait bien est encore plus bénéfique, car cela lui donne des repères clairs à reproduire. Un parent qui se sent soutenu, respecté et compris est plus enclin à demander de l'aide et à éduquer son enfant avec bienveillance. Il sera également moins tenté d'étiqueter son enfant, et plus enclin à l'apprécier tel qu'il est. Décoller les étiquettes, ensemble La parentalité est un parcours fait d'ajustements constants. Les mots que nous utilisons pour parler des parents comptent : ils peuvent soutenir ou fragiliser. En évitant les étiquettes parentales, nous laissons place à la nuance, à la compréhension et à la confiance. Si nous voulons que les enfants grandissent dans un climat sain et sécurisant, créons ensemble ce climat pour les adultes qui les élèvent. 1. Lisez « Après le roi et le tyran – Le règne de l'enfant dieu, l'enfant qui fait la loi » 2. Consultez l'enquête « Être parent au Québec en 2022 » Qu'en pensez-vous ? Participez au dialogue

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