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Une photographe romande dévisage ses filles pour son expo
Une photographe romande dévisage ses filles pour son expo

24 Heures

time10-07-2025

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Une photographe romande dévisage ses filles pour son expo

Accueil | Culture | Arts & expos | Le travail «Sans visage» de l'Yverdonnoise Sarah Carp est présenté à Arles et publié chez Actes Sud. Rencontre. Publié aujourd'hui à 19h46 «Sans visage» de Sarah Carp. Une série troublante qui débute avec des images de ses filles réalisées pendant le confinement… Sarah Carp En bref: L'art d'aujourd'hui se travaille entre deux pôles, pas forcément contradictoires. D'un côté, le concept. De l'autre, l'autobiographie – et donc l'autofiction. Rares sont les artistes contemporains à échapper à cette polarité entre le cérébral et l'ego – sauf à basculer dans le décoratif. Il y a évidemment des protagonistes du jeu de l'art qui se laissent moins facilement classer sur cet arc théorique. Des créateurs et créatrices qui sinuent entre les extrémités, les font dialoguer – ou se contaminer –, n'hésitent pas à réaliser des allers-retours entre les deux termes. Sarah Carp dans le jeu de l'art Sarah Carp est de celles-ci. «Je pense que l'une des constances de mon travail est de trouver un sens aux difficultés de l'existence en leur donnant une perspective positive.» La photographe, attablée dans un café de sa ville d'Yverdon, revient volontiers sur les chemins de traverse et les aléas qui l'ont conduite à exposer aujourd'hui aux Rencontres d'Arles , alors que les Éditions Actes Sud publient son livre, «Sans visage» . La photographe yverdonnoise Sarah Carp. Sarah Carp «C'est la vie qui m'apporte tout à coup un élan de création, et après je sais que je vais aller au bout.» Elle est encore dans sa vingtaine, entre 2008 et 2009, lorsqu'elle accompagne la maladie de son frère – auquel elle donne des cellules souches – par sa présence, mais aussi à travers son objectif dans ce qui deviendra la série «Donneuse apparentée». «Cela m'a offert la possibilité de prendre un peu de distance avec ce qui se passait, d'autant que c'était le deuxième frère que je perdais en peu d'années.» Prix Focale et Swiss Press Dix ans plus tard, elle remporte le Prix Focale – Ville de Nyon 2019 avec «Renaissance», un regard sur la maternité, sa propre maternité. S'affirme déjà nettement une façon de coller à son intimité tout en déviant dans une fiction possible. Une affaire de cadrages, de télescopages, de hors-champs. Cette étrangeté que Sarah Carp traque dans le quotidien, on la retrouve lorsque, confrontée au (semi-)confinement, elle s'attelle, dans une dynamique analogue à celle de son précédent projet, à capter ses deux filles à l'ombre de ces jours étirés par le coronavirus. Le placard où aimait bien se réfugier l'une des filles de Sarah Carp. Sarah Carp Avec des images de cette série «Parenthèse» alors publiées par «Le Matin Dimanche», cette manière de poursuivre sa pratique alors que le monde est gelé lui vaut en 2021 le Swiss Press Award – Photographer of the Year. À la même époque, l'Yverdonnoise postule avec succès à l'enquête photographique vaudoise, dont l'exposition vient d'être dévoilée à Photo Élysée. Une occasion pour elle de se plonger dans un tout autre univers, puisqu'elle choisit de documenter les facteurs de boîtes à musique et d'automates en cherchant à traduire visuellement la magie qu'évoquent ces objets d'artisanat de luxe. Atelier de Dominique Mouret, l'une des images de Sarah Carp pour l'enquête photographique vaudoise. Sarah Carp L'alignement des planètes semblait couronner la démarche de la photographe. Mais les constellations de l'existence lui réservaient encore des surprises. Son ex-compagnon refuse l'usage de ses images de leurs filles, arguant de leur droit à l'image. Il ne nous appartient pas ici de juger du bien-fondé de ce recours dans ces circonstances, mais si cette disposition entend protéger les enfants, elle entravait en l'occurrence le travail d'une mère qui comptait le publier. Le droit à l'image en question Sarah Carp ne se rebiffe pas et ne cherche pas une décision judiciaire. «Avec deux parents qui ont des idées différentes, je n'allais pas faire le livre, c'était trop compliqué pour les filles.» Cet obstacle aurait pu se transformer en coup d'arrêt définitif, mais la photographe ne peut se résoudre à l'abandonner. «Mon statut de mère était touché, je cherchais une solution. Il y a eu pas mal de nuits blanches… La question était: est-ce que j'avais photographié l'intimité de mes filles ou est-ce que je racontais une histoire à travers cette intimité?» Pour la mère et pour l'artiste, la réponse se situe évidemment du côté de la deuxième option. L'étrange saisi dans un jeu d'ombres. Sarah Carp Mais il lui restait encore à trouver une issue. Après avoir beaucoup réfléchi à la question du droit à l'image – auquel elle était déjà confrontée presque tous les jours en tant que professionnelle de l'image évoluant régulièrement dans l'espace public –, elle songe d'abord à masquer les visages de ses filles comme on floute dans la presse. Le procédé ne trouve toujours pas grâce aux yeux du père. D'autres auraient peut-être abandonné. Sarah Carp persévère. La photographe de «Sans visage» «À un moment donné, je me suis dit que j'allais refaire les photos, en faire une sorte de pièce de théâtre. Je me suis retrouvée dans un projet complètement différent. Il fallait recopier des images.» La photographe trouve deux jeunes modèles et les met en scène pour répéter les photographies qu'elle avait réalisées de manière spontanée avec ses filles. Elle leur explique qu'il a fallu prendre des doublures, un peu comme au cinéma quand il s'agit de cascades. «Cela donne des images plus statiques, plus plastiques.» Mais elle conserve tout de même l'idée initiale de camoufler les visages pour rappeler la notion d'interdit. «Il y a eu un vrai travail de transformation. Cela m'a poussé à chercher plus loin, ailleurs, sur d'autres résonances.» À l'origine spontanée, cette image a été particulièrement difficile à reproduire. Sarah Carp Au final, «Sans visage», déjà accroché l'an dernier à Images Vevey , se présente comme une série à la fois simple et complexe. Passé le premier effet brut de ces images et l'inconfort visuel créé par les trames paradoxales qui recouvrent les visages – de près, elles les rendent indiscernables, mais de loin elles disparaissent et révèlent largement les traits – se pose forcément la question des prises de vue originales, qui flottent comme des fantômes ou un filigrane sur leur double. Des paysages, des lieux ou des ciels parsèment aussi la série «Sans visage». Sarah Carp Comme l'écrit David Le Breton en postface à l'ouvrage: «Le masquage des enfants les transforme en représentants d'un monde en suspension, immobile, où il n'y a plus personne, hormis des silhouettes à l'identité brouillée.» Dans le matériau aux multiples couches de «Sans visage», le regardeur supplée pourtant, comble des lacunes, remet du mouvement, sans jamais trop savoir quel étage de signification il traverse. Comme le dit Sarah Carp elle-même: «C'est de la fiction, c'est une pièce de théâtre. Il s'agit de jouer sur la limite de ce que je peux faire, pas faire, raconter, pas raconter. C'est là où le jeu me plaît.» La vie et le concept se rejoignent. Sarah Carp Territoire photographique Newsletter «Dernières nouvelles» Vous voulez rester au top de l'info? «24 heures» vous propose deux rendez-vous par jour, pour ne rien rater de ce qui se passe dans votre Canton, en Suisse ou dans le monde. Autres newsletters Boris Senff travaille en rubrique culturelle depuis 1995. Il écrit sur la musique, la photographie, le théâtre, le cinéma, la littérature, l'architecture, les beaux-arts. Plus d'infos @Sibernoff Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.

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