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Sale temps pour les médias publics américains
Sale temps pour les médias publics américains

La Presse

time23-07-2025

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Sale temps pour les médias publics américains

Travis Bubenik, directeur de l'information à la radio publique de Marfa, au Texas. Cette station, comme bien d'autres radios et télés locales, subira les contrecoups de l'annulation du financement des médias publics aux États-Unis. (New York) En tant que directeur général de trois stations de radio communautaires émettant dans les Appalaches – deux en Virginie et l'autre en Virginie-Occidentale –, Scott Smith s'attendait à recevoir de mauvaises nouvelles la semaine dernière. Mais il a été surpris par l'émotion qui l'a saisi lorsque la Chambre des représentants, emboîtant le pas au Sénat, a approuvé, par 216 voix contre 213, la suppression de 1,1 milliard de dollars déjà alloués pour les deux prochaines années aux médias publics américains. « Franchement, pour ceux d'entre nous qui étaient investis dans cette affaire, nous avions une idée de la façon dont les choses allaient se dérouler, a confié Scott Smith lundi. Cela dit, les journées de jeudi et vendredi derniers ont été un véritable coup de massue. Et il est difficile de s'en remettre. » Cela se comprend : entre 60 et 65 % du financement annuel du réseau que dirige Scott Smith – Allegheny Mountain Radio – provient de la Corporation for Public Broadcasting (CPB). Jusqu'à la semaine dernière, cette organisation créée en 1967 finançait une part très modeste des budgets des deux réseaux publics emblématiques, la télévision PBS et la radio NPR, de même qu'une part beaucoup plus importante des budgets de 1500 radios et télés locales partenaires ou indépendantes. PHOTO TING SHEN, ARCHIVES THE NEW YORK TIMES Les bureaux de NPR à Washington Majoritaires au Sénat et à la Chambre, les républicains ont invoqué le manque d'objectivité des reportages et des émissions de PBS et de NPR pour justifier l'annulation du financement des médias publics, qui représente environ 1,60 $ par personne par an. Ils ont ainsi offert une victoire à Donald Trump, qui avait demandé au Congrès en mars dernier de mettre fin au financement public de ces deux « réseaux horriblement et complètement biaisés ». Or, l'annulation de ce financement nuira davantage aux radios situées dans les régions rurales, où se trouvent les électeurs de Donald Trump, qu'à NPR, qui peut compter sur d'autres sources de revenus. Qui plus est, ces radios sont souvent les seuls médias à encore fournir des informations locales aux populations de leurs régions. C'est notamment le cas pour les stations du réseau Allegheny Mountain Radio, dont l'auditoire a un accès « très, très limité » au service cellulaire, dit Scott Smith. « Bien sûr, si vous n'avez pas de service cellulaire ou d'électricité lors d'une urgence météorologique, vous pouvez toujours recevoir notre signal si vous avez une radio branchée sur une batterie. Vous pouvez marcher jusqu'à votre voiture, tourner la clé et syntoniser notre station. Nous émettons toujours pendant ces situations d'urgence », explique-t-il. « Idéologie nationale » Il fut un temps où le service essentiel offert par ces radios situées en zone rurale ou dans les territoires autochtones incitait des élus républicains à renouveler le financement des médias publics, et ce, malgré les efforts de tous les présidents républicains depuis Ronald Reagan pour y mettre fin. La sénatrice républicaine d'Alaska Lisa Murkowski a d'ailleurs repris cet argument la semaine dernière pour justifier son opposition à la suppression de ce financement. Mais elle est la seule de son camp, avec la sénatrice républicaine du Maine Susan Collins, qui s'est opposée au projet de loi qui a également annulé 7,9 milliards de dollars destinés à l'aide internationale. Les autres républicains ont tout simplement tourné le dos au « localisme », selon Josh Shepperd, professeur d'études des médias à l'Université du Colorado à Boulder et auteur de Shadow of the New Deal : The Victory of Public Broadcasting. Aujourd'hui, gagner des élections ne signifie pas que [ces élus] ont une responsabilité envers leurs communautés. Ils ont une responsabilité envers une idéologie nationale. Josh Shepperd, professeur d'études des médias à l'Université du Colorado à Boulder « Si l'ouest du Nebraska perd son dernier point d'accès aux médias publics, toutes les communautés rurales s'y trouvant deviendront, par défaut, de simples consommatrices d'informations nationales, c'est-à-dire de Fox News, de Breitbart, etc. Ainsi, les communautés les plus républicaines risquent de ne plus jamais recevoir d'informations traitant de leurs propres affaires. Je ne prédis pas que cela va se produire, mais c'est l'objectif. L'objectif est de transformer ces communautés pour qu'elles n'existent plus en elles-mêmes », explique-t-il. Les plus grands promoteurs de la fin du financement des médias publics ne semblent pas s'intéresser à cet enjeu. Ils concentrent leurs critiques parfois caricaturales sur PBS et NPR, dont les émissions sont pourtant synonymes de qualité et de diversité pour des dizaines de millions d'Américains. Figurent parmi celles-ci Sesame Street, PBS NewsHour, All Things Considered, Tiny Desk, NOVA, Antiques Road Show, Wait Wait… Don't Tell Me !. PHOTO JONAH MARKOWITZ, ARCHIVES THE NEW YORK TIMES Sesame Street est une émission phare du réseau PBS. « PBS et NPR ont été créées pour fournir un journalisme objectif », a écrit sur X David Bozel, président du Media Research Center et critique du financement public de ces chaînes. « Au lieu de cela, nous avons eu droit à des spectacles de drag queens pour enfants, à des reportages élogieux sur les démocrates et au silence ou à la diffamation pour les conservateurs. » Soutien du public N'empêche : les républicains du Congrès ont approuvé une mesure dont la grande majorité des Américains ne voulait pas, s'il faut se fier aux enquêtes d'opinion. Il y a deux semaines, un sondage Harris avait indiqué que 66 % d'entre eux, dont 58 % des républicains et 77 % des démocrates, soutiennent le financement de la radio publique. Ce soutien, Scott Smith l'a ressenti après le vote des deux chambres du Congrès. Depuis que notre situation a été révélée, tant au niveau local que national, la réponse du public est incroyable. Je ne peux pas vous dire à quel point cela nous touche et à quel point c'est important pour nous. Scott Smith, directeur général d'Allegheny Mountain Radio Allegheny Mountain Radio, qui emploie 11 personnes, dont 5 à temps plein, survivra-t-elle aux coupes ? Scott Smith estime que les réserves du réseau lui permettront de poursuivre ses activités sans changement majeur pendant au moins un an. « Mais quand vous commencez à piger dans vos réserves et à fonctionner dans le rouge, vous vous approchez du moment où vous vous retrouvez devant la question existentielle de savoir comment continuer. »

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