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« Carmen Curlers », la révolution bigoudis
« Carmen Curlers », la révolution bigoudis

Le Figaro

time7 days ago

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« Carmen Curlers », la révolution bigoudis

Ce récit pop et vintage d'une double émancipation pendant les Trente Glorieuses est une des belles surprises sérielles de l'été. Tirée par les cheveux ? Bien au contraire. Série danoise en deux saisons de huit et sept épisodes disponibles sur Carmen Curlers (en français, « les bigoudis de Carmen ») s'inspire d'une histoire vraie. Celle d'Arne Bybjerg Pedersen (ici renommé Axel Byvang), entrepreneur ambitieux, dont l'invention va révolutionner le quotidien de millions de femmes. L'action se déroule au Danemark au début des années 1960. Petite ville de province. Petite bourgeoisie. Petit milieu où tout le monde se connaît et où tout se sait. Des hommes campés sur leurs ergots de mâles dominants, peu importe leurs vices et leurs défaillances. Des femmes d'âges différents qui se battent dans l'ombre pour un peu d'indépendance. Une morale petite-bourgeoise qui ne tient plus qu'à un fil, ou plutôt à un cheveu… Tous sentent que le monde commence à changer. Publicité Double émancipation Mais comment aider son mari malade d'un cancer quand on n'a même pas le droit de posséder son propre compte en banque ? Et comment se sortir de la poisse dans laquelle on s'est collé au nom du progrès domestique, sans passer pour un dégénéré ? Pour répondre à l'adversité, Birthe Windfeld (Maria Rossing, vue dans Baby Fever) et Axel Byvang (Morten Hee Andersen, magnifique dans Au nom du père), chacun à leur manière, développent des trésors de pugnacité. Créée par Mette Heeno, écrite par Andreas Garfield, parmi les meilleurs scénaristes danois du moment auquel on doit Quand revient le calme et Au nom du père, Carmen Curlers raconte. Elle dit les entremises et la volonté de nuire de certains. Elle dit la résilience, la détermination, le désir d'émancipation. Elle déroule un double récit habile, construit sur les deux protagonistes, et livre une critique tendre mais objective d'une société coincée entre deux époques. « Ça fait quoi d'avoir une femme qui travaille ? » demande un voisin au mari malade… En phase avec son temps, elle est aussi pop et vintage, emprunte à la comédie musicale, aux couleurs pastel et aux belles cylindrées. Et rappelle, non sans une pointe de nostalgie, qu'au début des Trente Glorieuses, s'offrir une robe, un poste de télévision ou aller au restaurant était encore un événement. Pas question ici de s'appesantir sur le « c'était mieux avant ». Juste le constat d'un monde dont les évolutions successives ont manifestement entamé la poésie, la liberté de créer et de désirer. Alors même que les deux héros, dans leur lutte effrénée pour conquérir les femmes avec leurs bigoudis électriques, sont les artisans du monde d'aujourd'hui. On n'oublie pas non plus les origines protestantes, dont l'austérité le dispute à un rapport plutôt sain au progrès et à ses objectifs financiers. Ne dit-on pas en effet que dans un pays protestant, la monnaie s'apprécie par le travail, alors que dans un pays catholique, la monnaie se déprécie pour le travail ? Au Danemark, le luthéranisme est encore aujourd'hui religion d'État. D'une manière ou d'une autre, les productions locales s'en ressentent. Celle-ci, l'assume sans en jouer. Multiprimée au Danemark où elle a été accueillie comme un contrepoint bienvenu au « Nordic noir » dont les intrigues construites sur les disparitions d'enfants sont à la fin déprimantes, Carmen Curlers a été sacrée meilleure fiction européenne au Festival de la fiction de La Rochelle en 2023. Elle le vaut bien.

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