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La peur de l'Autre revue au goût du jour
La peur de l'Autre revue au goût du jour

La Presse

time6 days ago

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La peur de l'Autre revue au goût du jour

Un drapeau de la République d'Irlande, une chaloupe et des mannequins représentant des migrants ont été placés sur un bûcher loyaliste, le 10 juillet, à Moygashel, en Irlande du Nord. (Ballymena) Des mannequins représentant des migrants dans une chaloupe juchée sur un bûcher. Des maisons incendiées lors d'émeutes. Des familles déplacées fuyant la foule en colère qui leur lance des cocktails Molotov. Ali Watkins The New York Times Ces violences contre la vague migratoire sont survenues lors des cinq dernières semaines en Irlande du Nord. Ces images rappellent des moments sombres de l'histoire de ce territoire, où le feu a souvent servi à intimider et chasser ceux qu'on considérait comme l'Autre. La récente flambée de violence n'a toutefois pas la même cible que les attaques sectaires qui ont marqué cette région pendant les Troubles. Ce conflit, qui a duré des décennies, opposait les loyalistes protestants, qui voulaient que l'Irlande du Nord demeure une partie intégrante du Royaume-Uni, et les nationalistes catholiques irlandais, qui voulaient qu'elle soit unie à la République d'Irlande. Mais la violence porte le même message : « Vous n'êtes pas les bienvenus. » Si vous ne partez pas, nous vous chasserons. Selon Duncan Morrow, professeur de science politique à l'Université d'Ulster à Belfast, le nationalisme territorial demeure très fort en Irlande du Nord et est porté par des groupes armés. « La société nord-irlandaise s'embrase très rapidement, c'est une partie intégrante de son organisation. » PHOTO PAUL FAITH, AGENCE FRANCE-PRESSE Des débris en flammes durant une émeute antimigration le 10 juin à Ballymena, en Irlande du Nord. La ville de Ballymena, à environ 50 km de Belfast, est parfois appelée la « boucle » de la Bible Belt protestante d'Irlande du Nord. Les dernières violences ont éclaté après que deux adolescents, qui ont demandé l'aide d'un interprète roumain en cour selon la BBC, âgés de 14 ans, ont été accusés de tentative de viol sur une jeune fille de la région le 7 juin. Ils ont nié ces accusations. La nuit suivant leur comparution, une veillée pacifique organisée à la mémoire de la jeune fille à Ballymena a dégénéré en émeute visant les membres de la communauté rom du quartier. Les violences ont duré six nuits consécutives dans la région. Les braises du sectarisme La ville de Ballymena, à environ 50 km de Belfast, est parfois appelée la « boucle » de la Bible Belt protestante d'Irlande du Nord. Les dernières violences ont éclaté après que deux adolescents âgés de 14 ans, qui ont demandé l'aide d'un interprète roumain en cour selon la BBC, ont été accusés de tentative de viol sur une jeune fille de la région le 7 juin. Ils ont nié ces accusations. À la suite des attaques, 21 familles ont été mises en sécurité dans des logements temporaires, selon les autorités d'Irlande du Nord. La grande majorité des Nord-Irlandais ne cautionnent pas la violence. Néanmoins, les scènes récentes rappellent que les braises du sectarisme couvent toujours dans cette région. PHOTO PAULO NUNES DOS SANTOS, ARCHIVES THE NEW YORK TIMES Maison incendiée durant les émeutes à Ballymena, en Irlande du Nord, en juin dernier Non loin des façades calcinées des maisons de Ballymena se trouve l'ancien site d'une école primaire catholique, incendiée en 2005 lors d'une attaque qualifiée de sectaire par la police. À proximité, l'église catholique Notre-Dame-de-Harryville, aujourd'hui démolie, a été la cible d'incendies criminels avant et après l'accord du Vendredi saint, le traité de paix de 1998 qui a mis fin aux Troubles. Changement démographique Ces dernières années, l'arrivée d'immigrants a provoqué de l'hostilité tant en Irlande du Nord (la région la moins diversifiée du Royaume-Uni) qu'en République d'Irlande. Sur cette île d'où on a émigré en masse pendant des siècles, ce changement démographique est très visible, surtout dans les quartiers ouvriers pauvres où s'installent de nombreuses familles immigrantes. « Sur le terrain, la situation ressemble un peu à 1969, lorsque des catholiques avaient été jetés à la rue », explique Dominic Bryan, professeur à l'Université Queens de Belfast, qui étudie les conflits. En août 1969, des foules loyalistes avaient attaqué et incendié des maisons de catholiques à Belfast et à Derry, forçant des milliers de familles à fuir. Aujourd'hui, selon M. Bryan, ce sont les familles immigrantes qui sont ciblées dans l'espace public très homogène du Nord. « Elles sont très exposées », dit-il. De plus, des éléments criminels ou paramilitaires exacerbent la situation. Ballymena reste un foyer de dissidents et de paramilitaires loyalistes, dont certains se sont regroupés en bandes criminelles. PHOTO PAULO NUNES DOS SANTOS, THE NEW YORK TIMES Un drapeau britannique dans une fenêtre à Ballymena, où des maisons ont été incendiées lors d'émeutes contre les migrations en Irlande du Nord, en juin dernier Des procès révèlent aussi que, selon la police, la ville sert de base à un gang roumain impliqué dans le trafic de drogue et la prostitution. La police accuse depuis longtemps les paramilitaires loyalistes de fomenter des troubles. L'été dernier, les autorités les ont accusés d'avoir encouragé les violences anti-immigrants qui ont éclaté aussi bien en République d'Irlande qu'en Irlande du Nord. Les incendies criminels de juin ne sont pas attribués aux gangs loyalistes, mais la police d'Irlande du Nord affirme enquêter sur d'éventuels liens. Selon les experts, une grande partie des troubles récents ont été organisés en ligne, où certaines factions loyalistes ont adopté ces dernières années un discours d'extrême droite et anti-immigrants. On voyait deux messages le 10 juillet (commémoration annuelle loyaliste de la victoire d'un roi protestant sur un roi catholique) sur le bûcher de jeudi dernier, au sommet duquel on a brûlé un bateau et des mannequins représentant des migrants. Deux banderoles proclamaient « Stoppez les bateaux » et « Les anciens combattants avant les réfugiés ». PHOTO NIALL CARSON, ASSOCIATED PRESS Le bûcher érigé en prévision de la commémoration annuelle loyaliste, à Moygashel, en Irlande du Nord, le 10 juillet dernier Ce sentiment identitaire a toujours trouvé un écho à Ballymena, terre natale d'Ian Paisley, le prédicateur protestant radical qui a façonné l'approche intransigeante de l'unionisme, le mouvement pour le maintien de l'Irlande du Nord dans le Royaume-Uni. Depuis l'accord de paix, les groupes paramilitaires se sont retranchés dans des coins plus isolés, mais ont conservé une influence culturelle et sociale, surtout chez les jeunes défavorisés. Le mois dernier, arpenter les rues de Clonavon Terrace à Ballymena, à la frontière entre les quartiers traditionnellement protestants et catholiques, était comme remonter le temps en Irlande du Nord. On voyait partout des drapeaux britanniques et des drapeaux rouges et blancs de l'Ulster, accrochés aux portes et aux fenêtres. PHOTO PAULO NUNES DOS SANTOS, THE NEW YORK TIMES Des manifestants brandissent le drapeau rouge et blanc de l'Ulster – symbole du loyalisme nord-irlandais – lors d'un affrontement avec la police, à Ballymena, le 11 juin dernier. La méfiance envers les étrangers était palpable lors des émeutes du 11 juin à Ballymena et le lendemain à Portadown, où des manifestants ont exigé les cartes de presse des journalistes et ont interpellé des inconnus sur leurs opinions politiques. À Portadown, une manifestation pacifique s'est lentement dispersée, mais les spectateurs sont restés sur place, s'attendant à des violences. Comme prévu, de petits groupes de jeunes masqués ont commencé à lancer des briques sur les nombreux policiers présents. Plus tôt, un homme vêtu d'une chemise impeccablement repassée et d'un trench-coat sombre observait la foule. « L'immigration incontrôlée et, bien sûr, l'immigration illégale sont très préoccupantes », a-t-il dit. Il s'agissait de Jonathan Buckley, membre de l'Assemblée du Parti unioniste démocrate de Portadown. Mais, a-t-il ajouté, « la violence est totalement inacceptable ». Cet article a été publié dans le New York Times. Lisez la version originale (en anglais ; abonnement requis)

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