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Vanessa Lecci, la magicienne qui transforme les montres en œuvres d'art
Vanessa Lecci, la magicienne qui transforme les montres en œuvres d'art

24 Heures

time04-07-2025

  • Entertainment
  • 24 Heures

Vanessa Lecci, la magicienne qui transforme les montres en œuvres d'art

Cette virtuose de l'émail grand feu établie à Peseux (NE) est courtisée par les maisons prestigieuses afin de donner vie aux pièces les plus ambitieuses. Publié aujourd'hui à 12h57 Vanessa Lecci, l'une des rares émailleuses indépendantes à travailler encore à l'ancienne, dans son atelier, à Peseux (NE). «Chaque création est un voyage, une méditation, une transe.» Jean-Guy Python En bref: «Bienvenue dans ma chambre d'amis!» Vanessa Lecci nous invite à entrer dans l'un de ses ateliers, à Peseux (NE), stores baissés en ce jour de canicule. Elle en possède deux autres, chacun dévolu à une tâche particulière, parfois simple thébaïde pour amener à éclosion les idées qui tiennent son esprit sans cesse en alerte. L'un d'eux est surnommé la «chambre à coucher», lance-t-elle en plaisantant, et n'y sont admis que les invités d'un cercle plus intime. Nous n'en sommes pas encore là. Nous faisons connaissance avec l'une des rares spécialistes de l'émail grand feu, courtisée par les plus grands fleurons de l'horlogerie de luxe, toujours à la recherche des meilleurs artisans des métiers d'art. À ce stade, vous trouverez des contenus externes supplémentaires. Si vous acceptez que des cookies soient placés par des fournisseurs externes et que des données personnelles soient ainsi transmises à ces derniers, vous devez autoriser tous les cookies et afficher directement le contenu externe. Elle s'est plus récemment également prise d'attachement pour les traditionnelles pendules neuchâteloises, à qui elle insuffle une seconde vie en les décorant de manière inattendue, souvent en s'inspirant du pop art – activité qu'elle déploie dans un atelier dédié. «Ce sont des mal-aimées, jugées ringardes, et je les recueille, en quelque sorte, pour les transfigurer», sourit-elle. L'artisanat pur Le bruit de travaux proches l'agace visiblement. D'habitude, le calme et la vue en direction du lac de Neuchâtel sont des éléments propices à l'exercice de son art. «Je pratique de l'artisanat à l'état pur, sans recourir aux machines, qui agressent. J'ai vu au salon EPHJ de la sous-traitance, à Genève, de la technologie très poussée, qui aide à la production, mais il faut de gros volumes, et de toute façon ce n'est pas ma philosophie.» La Rose Carrée, de la collection «Grand Feu» de Parmigiani Fleurier, montre de poche unique, réalisée en 2021. Ulysse Frechelin Sur l'établi, un microscope surplombe un cadran de montre. Plus loin, un four de taille modeste pour saisir l'émail, à 800 degrés. «Parfois, je monte dans une vraie forge, dans le Val-de-Ruz», précise-t-elle. Disposés çà et là, des sachets remplis de poudres de toutes les couleurs. Plus de 400 teintes. C'est la matière première, l'émail, c'est-à-dire de la silice (du verre, en somme), mêlé à des oxydes de métaux et, dans le meilleur des cas, de plomb. Le meilleur émail se fait rare «C'est de plus en plus difficile à trouver, car les producteurs actuels d'émail en fournissent généralement sans plomb, pour les grandes entreprises. Mais rien ne vaut les émaux avec plomb, de qualité bien supérieure», regrette-t-elle. Car les plus beaux, les plus purs, les plus durables surtout, capables de passer les siècles sans s'altérer, étaient produits autrefois par la société genevoise Millenet, jusque dans les années 50, et constituent aujourd'hui le graal des professionnels. «Ils sont très recherchés.» Les producteurs d'émaux se font du reste assez rares, quelques-uns en France, en Angleterre, les plus talentueux au Japon, «peut-être les meilleurs, les plus délicats, grâce à une certaine délicatesse de fabrication qui leur est propre». Poser l'émail dans les motifs réalisés par le graveur se fait au moyen de pinceaux ultrafins. Jean-Guy Python Originaire de Salve, dans le sud-est de l'Italie, Vanessa Lecci a très tôt baigné dans le milieu artistique. Sa mère est sculptrice, son frère céramiste et peintre. Adolescente, elle suit une formation au département métal et bijouterie de l'institut d'art de la ville voisine. Elle y apprend diverses facettes du métier, dont l'émaillage, mais ce n'est alors qu'un savoir parmi d'autres. Et sa passion est ailleurs, sur… un terrain de volleyball. Du volleyball à l'établi «J'ai joué en ligue A italienne», souligne-t-elle avec fierté. Un voyage en Suisse lui fait découvrir l'équipe du NUC de Neuchâtel, elle ne peut s'empêcher de faire quelques passes de temps à autre, est repérée, courtisée. «Un coach national m'a assuré qu'il me voulait absolument en Suisse, et un an plus tard il a tenu parole, et j'ai quitté Lecce pour Yverdon-les-Bains.» Nous sommes au milieu des années 90. Vanessa Lecci redonne vie aux traditionnelles pendules neuchâteloises. La liste d'attente est longue! DR Quelques années plus tard, début trentaine, elle doit opérer un choix: rester dans le monde du volley (elle entraîne à Neuchâtel) ou retourner à son métier. Elle est engagée comme sertisseuse chez Cartier, puis, au vu de ses multiples talents, du bosselage au travail du fer forgé en passant par le ciselage et la gravure, elle est chargée de créer pour la marque, sur le site du Crêt-du-Locle, un atelier d'émaillage à l'interne. «Il ne s'agissait pas de produire des pièces uniques, mais d'organiser l'émaillage pour les séries.» Les grandes marques confient de préférence à des artisans hors les murs la réalisation de pièces qui sortent de l'ordinaire. Elle assurera ensuite le même travail pour Girard-Perregaux, puis Patek Philippe. Vanessa Lecci possède des émaux de quelque 400 teintes différentes. Jean-Guy Python Une transe perpétuelle Mais assurer un certain nombre de créations pour justifier son salaire ne lui convient plus, et en 2013, elle choisit de devenir indépendante. «J'avais besoin d'avoir le temps, car pour chaque pièce, je me donne à fond.» Elle parle de voyage, ou de méditation, de transe peut-être. «Je suis presque toujours en train de penser à de nouvelles idées, ou occupée à résoudre une difficulté particulière; c'est très prenant, parfois épuisant. Le 80% du travail se fait dans ma tête.» Elle en est convaincue: si elle était restée au service de ces marques prestigieuses, ses réalisations seraient encore «plates». Au sens littéral, bien sûr. Car en plus de maîtriser à la perfection les deux grandes techniques de l'émail grand feu, le cloisonné (émail posé entre des sections séparées par un fil) et le champlevé (émail posé dans des cavités), Vanessa Lecci aime innover. «Je veux donner du volume à mes créations, jouer avec la masse et la travailler.» L'émail est passé au four à 800 degrés pour avoir droit à l'appellation «grand feu». Jean-Guy Python Équilibrisme à 800 degrés Ce qu'elle fait en jouant sur les temps de cuisson, les températures. Le temps de fusion usuel à 800 degrés ne doit pas dépasser la minute. Retirer l'émail un petit peu plus tôt lui permet de garder une masse avant qu'il ne s'affaisse sur sa base. Une technique qui lui permet de jouer davantage avec la lumière et d'insuffler au dessin une impression de mouvement. De l'équilibrisme, oui, mais qu'elle pratique avec le sang-froid que seule confère l'expérience. L'Armoriale Répétition Mystérieuse, dévoilé fin 2024. Parmigiani Fleurier Tout se fait au feeling, ses cinq sens mobilisés. Sa main est sûre: «Quand je réduis l'émail au pilon dans mes petits mortiers, je réalise différentes granularités en fonction de mes besoins, et chacune doit être parfaitement homogène.» Vient ensuite le mélange des couleurs, avec la faculté d'anticipation du résultat final, en fonction du type d'oxyde qu'il contient, de sa proportion, du fond sur lequel il sera appliqué, autant de facteurs qui modifient l'aspect, la transparence, les nuances. Semblable méticulosité virtuose est requise pour la réalisation des motifs, au moyen de pinceaux ultrafins. La quête de la granularité parfaite de l'émail est une affaire de doigté, d'instinct et d'expérience. Jean-Guy Python Les commandes ne manquent pas: «Nous sommes trois émailleurs à travailler encore à l'ancienne», précise-t-elle. Son talent est donc très recherché. Elle a noué un compagnonnage de longue date avec Michel Parmigiani, le créateur de la marque Parmigiani Fleurier (aujourd'hui PF). En est issue la Toric Tecnica Carpe, en 2009, pièce unique en or 18 carats. Ou, l'an dernier, L'Armoriale Répétition Mystérieuse, limitée à cinq exemplaires. La Snake's Jungle, pour Louis Vuitton, ou l'art d'insuffler à l'émail volume et mouvement. Louis Vuitton De grandes maisons font appel à son art, telles que Louis Vuitton pour la Snake's Jungle, ou Vacheron Constantin, pour qui elle réalise en collaboration avec un artiste japonais la Ciel de Corée, 1500 étoiles sur fond de Voie lactée. Mais, de nature proactive, Vanessa Lecci ne fait pas qu'attendre le bon vouloir des marques: «La nuit, j'ai des visions de projets et de collaborations qui n'existent pas encore.» Comme elle le reconnaît volontiers, c'est ce métier qui l'a choisie, et non l'inverse: «Il me permet d'exprimer tout ce qu'il y a en moi et m'ouvre des portes insoupçonnées.» Émail grand feu et horlogerie font bon ménage Newsletter «La semaine neuchâteloise» Découvrez l'essentiel de l'actualité du canton de Neuchâtel, chaque vendredi. Autres newsletters Ivan radja est journaliste à la rubrique économique depuis 2009. Il suit notamment l'actualité horlogère et le développement des nouvelles technologies vertes. Auparavant, il a travaillé pour L'Express et L'Impartial. Plus d'infos @Radjignac Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.

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