26-07-2025
« J'ai vraiment changé de braquet » : la nouvelle dimension de Jean-Philippe Patrice, vice-champion du monde et nouveau numéro 1 mondial
Encore remplaçant olympique l'été dernier, le sabreur Jean-Philippe Patrice a totalement changé de dimension cette saison, désormais vice-champion du monde avec sa médaille d'argent décrochée vendredi à Tbilissi (Géorgie) et un nouveau statut de numéro 1 mondial.
Les confettis volaient encore près du podium et le clan français attendait patiemment pour la photo collective, collé serré, tout content de célébrer deux nouvelles médailles mondiales. Mais il manquait les deux frangins Patrice. Enlacés, émus, les deux Marseillais étaient inséparables pendant de longues secondes vendredi soir. Le cadet Sébastien, numéro 1 mondial et favori au titre, passé à côté de son rendez-vous mondial à Tbilissi, glissant à l'oreille de son aîné Jean-Philippe sa fierté de le voir tout frais vice-champion du monde.
L'heure de Sébastien finira sûrement par arriver. Mais cette fois, c'est bien Jean-Philippe qui a saisi l'occasion en allant chercher une médaille d'argent paradoxale, aussi attendue cette saison que totalement inattendue il y a tout juste un an, mais sans l'ombre d'un doute totalement méritée au regard de la toute nouvelle dimension prise par le sabreur de 28 ans depuis que la médaille de bronze olympique par équipes à Paris lui a servi de déclic mental.
Jean-Philippe Patrice médaillé d'argent
Une saison exceptionnelle de régularité
Numéro 4 mondial en arrivant en Géorgie, fort de deux premiers succès en Coupe du monde et d'une médaille de bronze européenne, Patrice est passé en l'espace d'un an du statut de remplaçant olympique - dont la présence a fait beaucoup parler - à un prétendant au titre mondial, libéré d'un poids et sûr de son escrime.
« J'ai vraiment changé de braquet, je le fais pour moi maintenant, je ne me préoccupe plus du regard des autres, racontait-il une fois la médaille d'argent autour du cou. À ceux qui ne croyaient pas en moi, finalement je les remercie, ça m'a rendu plus fort. J'ai vécu une préparation difficile mentalement, parce que c'était, mine de rien, mes premiers Mondiaux et c'est bizarre d'être favori sur tes premiers Mondiaux. C'est l'aboutissement d'une saison, c'est quelque chose d'incroyable pour moi. Je suis vice-champion du monde et je passe numéro 1 mondial. Je ne pouvais pas rêver mieux, enfin si bien sûr d'être champion du monde, mais ça viendra. »
La marche était encore un peu trop haute en finale face au héros local Sandro Bazadze (9-15), mais si le cap mental est évident, c'est aussi et surtout sur la piste que Patrice a changé de dimension, montrant un sang-froid terrible dans les moments chauds, comme en quarts de finale quand son coéquipier Rémi Garrigue menait 14-11 et semblait filer vers le dernier carré. Mais sans s'affoler, stratège et fidèle à son profil de défenseur, quatre touches ont suivi, sans broncher, en patron.
Pas le plus impressionnant physiquement, sans bondir partout comme son frère ou envoyer des sacoches comme Maxime Pianfetti, Patrice se détache par son sens tactique et une capacité d'adaptation qui collent à sa personnalité, posée et réfléchie. « Il a une telle sérénité sur la piste, explique son coach Vincent Anstett. Il ne renonce jamais, il a cette capacité d'analyse et d'adaptation, c'est une vraie force. Il peut être très fier de lui parce que c'est un vrai bosseur. Il ne se cache pas, il s'engage à 100 %. Il peut se regarder dans la glace et dire qu'il a tout fait pour y arriver. »
« Il est totalement décomplexé. Il y a de l'ambition, mais c'est fait assez sainement parce qu'il se donne les moyens de ses ambitions, il fait tout ce qu'il faut »
Vincent Anstett, manager général du sabre hommes
Sûr de lui et de son projet, l'aîné des Patrice s'est débarrassé du moindre complexe, n'hésitant pas à assumer son ambition dès le début de saison, comme le raconte Anstett. « En sortant des Jeux, il devait être autour de la 30e place mondiale à peu près, et puis il me dit "je veux rentrer dans le top 16 rapidement", qui est la barrière pour rentrer directement dans les tableaux principaux. Je lui avais répondu "oui c'est très bien, mais tu n'as pas de points aux Jeux et mathématiquement ça va être compliqué, le gap est quand même assez important". Et tout de suite il m'a sorti : "Il suffit de gagner un Grand Prix et puis c'est bon". Oui, c'est sûr, il suffit de gagner un Grand Prix ! Il n'avait pas encore fait de podium en Coupe du Monde à ce moment-là mais dès la deuxième compétition de l'année, il gagne le Grand Prix d'Orléans. On sort d'Orléans et il me dit "J'aimerais bien gagner à Padoue, ma femme est Italienne". Oui c'est bien, tu en as déjà gagné une, ça va aller. Padoue, il gagne... »
« Il est totalement décomplexé, conclut Anstett. Il y a de l'ambition, mais c'est fait assez sainement parce qu'il se donne les moyens de ses ambitions, il fait tout ce qu'il faut pour s'entraîner, pour avoir une bonne nutrition, la préparation mentale et physique. Il y a eu plein de facteurs qui ont fait que ça a explosé. Mais on ne pouvait pas forcément s'attendre à ça non plus. »
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