3 days ago
Pourquoi Jannik Sinner porte encore un manchon alors qu'il n'est plus blessé au coude droit
Tombé sur son coude droit en huitièmes de Wimbledon, le numéro 1 mondial Jannik Sinner a porté un manchon de compression jusqu'à la fin du tournoi. Un mois plus tard, l'Italien, qui a facilement battu Félix Auger-Aliassime jeudi, l'arbore toujours à Cincinnati alors qu'il n'a plus aucune douleur.
Ses groupies ont pu s'inquiéter lorsque à l'entraînement à Cincinnati, Jannik Sinner avait le bras droit couvert par un manchon de compression. Bout de tissu qu'il a enfilé lors de sa rentrée aux États-Unis face à Daniel Galan, concassé (6-1, 6-1) en 58 minutes, victoire la plus rapide de sa carrière (hors abandon). Même tenue, manchon blanc compris, contre Gabriel Diallo (6-2, 7-6 [6]), Adrian Mannarino (6-4, 7-6 [4]) et Félix Auger-Aliassime (6-0, 6-2), jeudi.
Depuis son quart de finale à Wimbledon, deux jours après sa glissade sur le coude droit au premier jeu de son huitième contre Grigor Dimitrov, le numéro 1 mondial porte un manchon. Il a conquis Wimbledon avec l'objet couvrant un bandage, coupé près d'un mois avant de reprendre à Cincinnati, en se débarrassant du bandage mais pas du manchon. Encore des douleurs ? Non, a assuré l'Italien en conférence de presse d'avant-tournoi. « Ça permet d'avoir un peu plus d'impact sur la balle et de la stabilité. J'aime vraiment la sensation de puissance pure que ça procure. »
À l'origine, il y a souvent une blessure, qui finit par s'estomper. Mais le manchon reste, rassure. Notamment Corentin Denolly. Le Français de 28 ans, qui avait des douleurs musculaires et l'avant-bras qui chauffe, s'en était fait confectionner un sur mesure il y a quelques années. Il a du mal à s'en passer aujourd'hui. « J'ai récemment repris après ma blessure au poignet gauche et je ne me sentais pas de jouer sans au début, raconte le 310e mondial. Ça rassure de sentir son bras maintenu, il y a moins de chocs. Dès que mon bras est un peu fatigué et mou, le mettre me fait du bien. »
« C'est comme quelqu'un qui va mettre un t-shirt de sa couleur préférée, il n'y a pas de lien direct sur la performance, mais ça le met en confiance »
Un kiné d'un joueur du top 30
« C'est un outil qui peut amener du confort et amener de la réassurance, ce qui fait que tu te soucies moins de ta blessure et tu te sens un peu plus serein. Tu peux jouer plus libéré », éclaire le kinésithérapeute d'un joueur du top 30, qui parle « de placebo ». « Si tu te sens bien avec et que ça te permet de développer ton tennis comme t'as envie, il ne faut pas s'en priver. C'est comme quelqu'un qui va mettre un t-shirt de sa couleur préférée, il n'y a pas de lien direct sur la performance, mais ça le met en confiance », ajoute le même kiné. « Il n'y a pas vraiment de rôle physiologique, c'est plus un rôle psychologique », assure un autre.
Le volleyeur des Bleus Trévor Clévenot avait expliqué l'an dernier au magazine L'Equipe comment il avait adopté le manchon popularisé en NBA par Allen Iverson et notamment porté par LeBron James. « On avait fait de la machine à ballons pour travailler les services, à 120, 130 km/h. J'avais un hématome qui partait du poignet jusqu'au coude, un truc monstrueux. Je continuais alors que j'avais mal, j'avais dû péter plein de trucs ! Ce jour-là, j'ai mis un manchon au bras gauche et depuis je l'ai gardé, mais maintenant c'est plus dans ma routine qu'autre chose. »
De plus en plus de joueurs de tennis couvrent un de leur bras d'un manchon. Carlos Alcaraz en a porté un ponctuellement, Karolina Muchova, Lorenzo Musetti, Arthur Cazaux, Benjamin Bonzi bien plus fréquemment. Ce dernier s'en sert uniquement en match pour éviter la « fatigue articulaire », que la transpiration « coule moins » sur sa main. « Mais niveau sensations, je n'ai rien remarqué au niveau de la frappe de balle. »
« Je veux bien que ce soit une évolution technique et de matériel mais si on a un manchon, c'est qu'au départ, il y a des petits problèmes »
Corentin Denolly
Plusieurs études scientifiques ont été menées au sujet des manchons ou genouillères (Andy Murray, Novak Djokovic ou Alcaraz en ont porté) sur de faibles échantillons de sportifs. Les conclusions sont similaires : les effets sur la performance ou la création de puissance durant l'effort sont fluctuants. Le manchon peut en revanche s'avérer intéressant lors de la récupération.
Mais pour Denolly, le problème est plus profond. « En changeant de balles toutes les semaines, les fibres musculaires sont bien touchées. Il faudrait peut-être que l'ATP ou les marques se posent des questions, parce que ce n'est pas normal. Je veux bien que ce soit une évolution technique et de matériel mais si on a un manchon, c'est qu'au départ, il y a des petits problèmes. »