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«La sécurité de l'Europe se joue en Ukraine» : extrait du discours du général Burkhard
«La sécurité de l'Europe se joue en Ukraine» : extrait du discours du général Burkhard

Le Figaro

time11-07-2025

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«La sécurité de l'Europe se joue en Ukraine» : extrait du discours du général Burkhard

Lors d'une conférence de presse ce vendredi, le chef d'état-major des armées Thierry Burkhard a affirmé que «la Russie a ouvertement désigné la France comme son premier adversaire en Europe». Le Figaro vous livre la retranscription d'un extrait de sa prise de parole. Ce vendredi, le chef d'état-major des armées Thierry Burkhard a tenu une conférence de presse. Sa mission est de préparer les esprits avant le discours d'Emmanuel Macron, dimanche soir, censé préciser les efforts à mener pour assurer la sécurité de la France dans les prochaines années. Le Figaro publie une retranscription des déclarations du général Burkhard lors de sa conférence de presse. Thierry BURKHARD. -«La Russie est un grand compétiteur qui a ouvertement désigné la France comme son premier adversaire en Europe. Ce n'est pas moi qui l'ai dit, c'est la Russie qui l'a dit. La Russie constitue une menace durable, proche et qui est pour moi la plus dimensionnelle. La Russie est une vraie puissance militaire, conventionnelle et nucléaire. C'est un pays qui est construit sur son système de force et qui y consacre aujourd'hui encore des efforts colossaux, qu'on a du mal à imaginer. Publicité La Russie a tous les attributs d'un état totalitaire. C'est un univers qui est relativement fermé. Quand je dis ça, je ne choque personne. Une capacité de décision très centralisée et également un conditionnement de la population dès le plus bas âge. J'estime que la Russie, probablement de par sa mentalité, mais aussi de par les moyens qu'elle a aujourd'hui à sa disposition, se positionne en puissance de nuisance plutôt qu'en puissance construction. C'est une puissance conventionnelle, une nuisance nucléaire, une potence conventionnelle. La Russie est un modèle d'armée complète : dans l'armée russe aujourd'hui, je ne vois pas de capacité qui manque depuis les capacités de brouillage, de guerre électronique, au système de défense solaire, au système d'artillerie, feu dans la profondeur avec un étagement, au système de force conventionnelle, très engrené avec la guerre informationnelle. Réussir à mettre tout ceci en jeu et le faire efficacement est probablement un autre sujet. Mais globalement, sur le papier, l'Armée Russe dispose de tout ce qu'il faut, tout. C'est aussi une puissance nucléaire. Quand la Russie est obligée de réduire ses priorités, la dernière chose sur laquelle elle fixe ses priorités, c'est sa dissuasion nucléaire, avec des vecteurs terrestres, des vecteurs sous-marins, des vecteurs aviation à long terme, des rayons d'action, des armes stratégiques, des armées tactiques. La Russie a une doctrine, une chaîne de commandement qui est extrêmement robuste, testée, sondée. La Russie c'est aussi, historiquement, et culturellement un peuple qui est capable d'endurer des choses qui nous semblent d'ailleurs complètement inimaginables Thierry Burkhard La Russie, c'est également une vraie profondeur stratégique. Je pense que quand on parle d'un pays avec une profondeur stratégique, c'est probablement la Russie qui est l'exemple le plus fort. La profondeur stratégique c'est géographique. La Russie, c'est 11 fuseaux horaires. C'est ce qui lui permet de tenir économiquement, même si la situation est compliquée. La Russie c'est aussi, historiquement, et culturellement un peuple qui est capable d'endurer des choses qui nous semblent d'ailleurs complètement inimaginables. Constatons néanmoins que Poutine, depuis les années 2000, a vraiment remis l'endoctrinement, et en particulier au niveau des plus jeunes, extrêmement fort. Ça se ressent aujourd'hui dans le fonctionnement de l'État-Armée. Ainsi, fort de ses atouts, le Kremlin, a fait de la France une de ses cibles prioritaires. Cela se caractérise dans tous les domaines, sous forme de guerre hybride multimilieu-multichamp, c'est-à-dire un affrontement physique, mais aussi dans l'espace, dans le cyber, dans les fonds marins. Nous sommes confrontés à une guerre informationnelle extrêmement forte de la part de la Russie, qui cible les pays européens, mais aussi tous les autres pays. Une guerre informationnelle qui ne cible pas que la France, mais prioritairement la France. Parce que je pense qu'ils ont identifié que si la France a des difficultés dans ce domaine-là. Et finalement, ça fera un effet domino, puisqu'ils considèrent que c'est probablement nous qui tenons le mieux l'affaire. Bien qu'ils ciblent les autres pays occidentaux, nous sommes la cible principale. Je pense que c'est aussi via des proxys. Par exemple, les Moldaves qui ont été arrêtés dans l'affaire des étoiles de David, les cercueils devant la Tour Eiffel, le faux site s' la rumeur des punaises de Lipe pendant les JO... Il y a plein d'autres exemples. C'est quelque chose qui sature l'espace. Et qui ne peut pas nier une forme d'efficacité, parce que ces trucs-là deviennent assez auto-porteurs et continuent longtemps, probablement après que les Russes ont lancé la première pièce pour faire fonctionner ça. Publicité Il y a aussi d'autres agressions, dans l'Espace par exemple. Par exemple, les manœuvres de satellites russes, soit pour gêner nos trajectoires de satellites, soit pour s'approcher pour les brouiller, soit pour s'approcher pour les espionner. Il existe une volonté russe de militarisation dans l'espace avec l'introduction de satellites spécialisés. Ça sera probablement au titre du droit de non-militarisation de l'Espace en dehors des règles. C'est aujourd'hui la remise en cause des traités, quelque chose de malheureusement assez fréquent. C'est également sous les mers, que les sous-marins nucléaires d'attaque russes pénètrent en Atlantique Nord et ensuite descendent en Méditerranée, et qui cherchent à surveiller les zones qui sont importantes pour nous Thierry Burkhard C'est également sous les mers, que les sous-marins nucléaires d'attaque russes pénètrent en Atlantique Nord et ensuite descendent en Méditerranée, et qui cherchent à surveiller les zones qui sont importantes pour nous. Il y a des moyens spécialisés d'action sous la mer, soit à partir de bâtiments de surface, comme le Yanta, qui a de grosses capacités et qui peut intervenir très, très profond, à plusieurs milliers de mètres sous la surface. Les Russes ont aussi des sous-marins spécialisés avec des capacités de porter des sous-marins FI, pour conduire des actions plus précises le long des câbles. Nous sommes engagés avec nos alliés. En Atlantique Nord, mais également avec les pays baltes et pays Scandinaves pour déjouer ces malaises d'intimidation. Dans les airs, frictions et interactions sont fréquentes avec nos patrouilles et drones. Les Russes disent que l'espace aérien international correspond à un espace qui appartient à personne, un espace qui est à conquérir. C'est le cas aussi pour la mer noire, pour au-dessus de la Syrie, pour la Méditerranée, pour l'Atlantique Nord... Ce sont des comportements non-professionnels souvent dangereux : des escorts de chasseurs ou d'identification, des vols de l'aviation à long rayon d'action... c'est-à-dire des bombardiers stratégiques russes qui sont basés sur la partie nord de la Russie, dans la région de Mourmansk, qui conduisent des longs vols au-dessus de l'espace maritime, en contournant la Norvège et en descendant quelquefois au-delà de la Grande-Bretagne. En Europe, il y a eu des attaques cyber multiples qui ont été attribuées aux Russes. La France cherche maintenant à attribuer, à dénoncer ces attaques-là. Attribuer est quelque chose qui est important. En fait, être capable d'attribuer, est une chose. Et ensuite, le sortir, c'est-à-dire officiellement attribuer est une étape suivante. C'est ce qu'on fait avec nos alliés. Je pense qu'il ne faut pas non plus exclure des actions comme celles qu'ont subies certains de nos voisins. Par exemple, des sabotages qui ont visé des usines d'armement allemandes ou des grands dirigeants de ces sociétés. La Russie, c'est une menace durable Thierry Burkhard La Russie, c'est une menace durable. La guerre en Ukraine pour la Russie est existentielle et elle veut absolument obtenir ce qu'elle a fixé comme objectif, ou au moins ce que Poutine a fixé comme objectif : affaiblir l'Europe et démanteler l'OTAN. C'est l'objectif de Poutine. Pour y arriver, elle a mis en place, avec la guerre en Ukraine, une économie de guerre qui tourne à plein régime aujourd'hui. Cette économie guerre, c'est une partie de l'équation qui fait tenir l'économie russe. Et donc, il n'y a pas de raison, voire une forme d'impossibilité de cesser ça brutalement. La Russie va donc continuer à se réarmer à ce rythme-là. Ainsi, j'estime que, malgré les pertes qu'elle subit, qu'avant 2030, la Russie constituera à nouveau une vraie menace à nos frontières sur le flanc est de l'Europe. Publicité La sécurité de l'Europe se joue en Ukraine, ainsi que la place des pays européens dans le monde, dans le mode de demain. Si le point de sortie en Ukraine était une victoire russe et une défaite ukrainienne, ça serait une défaite occidentale qui deviendrait une défaite européenne, du fait de la posture américaine. Donc, l'Ukraine doit être défendue comme telle. Mais je pense que la défense de l'Ukraine, c'est aussi la manière dont on conçoit l'Europe telle qu'elle doit être demain. Si jamais nous ne défendions pas l'Ukraine, on deviendrait les herbivores dans un monde de carnivores et ce n'est pas une position très confortable de se retrouver en bout de chaîne alimentaire. Donc, pour cette raison-là, il faut être extrêmement vigilant. Ainsi, la réponse doit être européenne aujourd'hui. Même si on doit absolument conserver le lien avec les Américains, ce qui est à mon avis leur intention aussi. Je ne crains pas un retrait total américain, ce n'est pas dans leur intérêt. Néanmoins, la nécessité pour les Européens d'augmenter leur capacité d'effort, c'est essentiel. On est aussi engagé dans le cadre de l'OTAN pour la protection du flanc Est. Le premier ministre britannique et le président de la République ont parlé de la coalition des volontaires. La coalition des volontaires a été suscitée lors d'une réunion relative à l'Ukraine par un dirigeant européen en demandant qu'il y ait un lead franco-britannique qui se mette en place. Dans un esprit de revanche, Poutine a une volonté de laisser une trace dans l'histoire qui détermine ses décisions Thierry Burkhard Je pense qu'il faut néanmoins être conscient que Poutine joue un rôle déterminant dans la menace que constitue aujourd'hui la Russie vis-à-vis du continent européen et les visées russes sur l'Ukraine. Dans un esprit de revanche, il a une volonté de laisser une trace dans l'histoire qui détermine ses décisions. Donc, il est impératif d'avoir un vrai niveau de vigilance face à cet ennemi, qui est durable et déterminant. Pour conclure, je pense qu'il y a quatre marqueurs qui permettent de comprendre et de voir à quoi on est confronté. Le premier marqueur, c'est un emploi de la force désinhibé. L'emploi de force aujourd'hui, c'est l'outil principal des relations internationales. Beaucoup de pays considèrent que c'est le moyen le plus simple et le plus rapide d'obtenir des résultats et que dans ce domaine-là, quand on choisit des modes actions où on produit le plus de pertes possibles c'est quelque chose qui permet d'afficher sa détermination. La deuxième chose, le deuxième marqueur, c'est la contestation de l'Occident et l'ordre établi après 1945. Un ordre qui s'appuie sur le droit international, qui aujourd'hui est constaté avec une vraie volonté de mettre en place un ordre alternatif. Poutine est le chef de file de cette volonté des occidentalisations et il en tire profit. Le troisième marqueur c'était la puissance de l'information. L'information sous tous aspects : en termes de renseignements pour être capable de comprendre, en termes de champs informationnels, guerre informationnelle dans le champ des perceptions pour attaquer, en particulier la cohésion nationale de ses adversaires. Le dernier marqueur qui peut vous sembler d'un niveau différent, mais je pense que pour autant, c'est quelque chose qui est extrêmement important et que pour beaucoup de pays. C'est l'impact du changement climatique, catalyseur du chaos. C'est une vraie préoccupation. Et si on ne le prend pas en compte déjà, c'est quelque chose qui, un jour, nous arrivera. Ça nous arrive déjà, il y a beaucoup de conséquences et les armées doivent anticiper. Mais je pense qu'en termes de sécurité, c'est un driver assez fort. Consciemment ou inconsciemment, aujourd'hui, il y a une forme d'accoutumance à la violence qui augmente. Et que si vous réfléchissez dans ce que vous présentez dans vos médias, est-ce qu'il y a cinq ans, vous auriez considéré comme normal qu'un État tire 300 missiles sur un autre ? Et qu'on dise que ce n'est pas très grave parce qu'en fait, il y en a 95% qui avaient été interceptés ? C'est très grave et ce n'est pas normal. Et ce qu'il y a cinq ans, on aurait considéré que tirer des missiles antinavires contre des navires de commerce, même si la plupart du temps, mais pas toujours, ils sont interceptés, c'était quelque chose de normal ? Non, ce n'est normal. Et il faut contrebattre ça impérativement. Et est ce qu'il y a cinq ans, on aurait imaginé qu'il y a des batailles terrestres qui se livrent où il y a plusieurs centaines de milliers de morts par jour, voir quelquefois au-delà du millier ? Ce cinéma normal, c'est quelque chose auquel on doit faire attention mais pour autant caractérise la manière dont le monde aujourd'hui se positionne. Merci beaucoup.»

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