3 days ago
Un sénateur réclame une plus grande transparence
Selon une coalition de défense des droits des Palestiniens, des données des douanes israéliennes indiquent que l'État hébreu a notamment reçu des munitions et des pièces détachées pour chars en provenance du Canada.
(Ottawa) Un sénateur fédéral, Yuen Pau Woo, exhorte le gouvernement canadien à se montrer plus transparent au sujet des restrictions imposées sur l'exportation d'armes vers Israël.
Dylan Robertson
La Presse Canadienne
Il semble régner une certaine confusion sur ce que les entreprises peuvent vendre au Moyen-Orient. Des données des douanes israéliennes laissent entendre que des armes canadiennes létales continuent d'être exportées régulièrement vers Israël, et ce, même si Ottawa a affirmé avoir mis fin à ces expéditions.
Le gouvernement fédéral maintient qu'il interdit toute exportation d'armes létales vers Israël et qu'il bloque la vente de tous équipements militaires pouvant être utilisés dans la bande de Gaza.
Selon lui, c'est la meilleure façon de s'assurer que des pièces détachées canadiennes ne sont pas utilisées dans des opérations pouvant contrevenir au droit international sans perturber la chaîne d'approvisionnement militaire au pays.
« Le Canada a adopté, et continuera d'adopter, une ligne dure, a déclaré vendredi la ministre des Affaires étrangères, Anita Anand. Nous ne permettrons pas que des armes fabriquées au Canada alimentent ce conflit, de quelque manière que ce soit. »
Yuen Pau Woo est l'un des 32 sénateurs qui exhortent le gouvernement à imposer un embargo complet.
M. Woo reproche à Mme Anand de ne pas être claire sur ce qui peut être exporté en Israël.
PHOTO JEENAH MOON, ARCHIVES REUTERS
La ministre des Affaires étrangères, Anita Anand
Selon une coalition de défense des droits des Palestiniens, des données des douanes israéliennes indiquent que l'État hébreu a notamment reçu des munitions et des pièces détachées pour chars en provenance du Canada.
Mme Anand soutient que le rapport faisant état des données israéliennes est erroné. Selon elle, aucun équipement militaire canadien n'est utilisé par l'armée israélienne dans la bande de Gaza.
M. Woo déplore que Mme Anand se soit montrée défensive dans sa réponse aux questions aux journalistes à ce sujet. Il lui a aussi reproché d'avoir manqué de clarté, étant donné les périls et la misère que les Palestiniens affrontent depuis le début de la guerre.
Le Parlement a voté en faveur d'une motion non contraignante en mars 2024 visant à suspendre l'octroi de nouveaux permis d'exportation d'armes à Israël, et le gouvernement a par la suite annoncé un examen des permis d'exportation existants.
Le gouvernement fédéral a toutefois indiqué que les autres permis d'exportation d'armes vers Israël demeuraient valides. En 2024, il existait 164 permis, dont certains depuis plusieurs années.
Certains des 30 permis suspendus sont expirés, a indiqué Affaires mondiales Canada.
En mars 2024, la ministre des Affaires étrangères de l'époque, Mélanie Joly, avait déclaré qu'aucun des permis d'exploitation ne permettait l'exportation d'armes létales vers Israël. Son cabinet avait indiqué qu'aucun nouveau permis n'avait été approuvé depuis le 8 janvier 2024.
Si le ministre israélien des Affaires étrangères avait laissé entendre que cette décision sapait les capacités de l'État hébreu à se protéger, l'ambassadeur d'Israël au Canada, Iddo Moed, insistait pour dire que son pays pouvait continuer à se défendre lui-même
Si le nouveau gouvernement de Mark Carney soutient ne pas avoir modifié la politique étrangère canadienne, son discours s'est modifié.
Ainsi, si Mme Joly et son cabinet parlaient volontiers d'usage non létal des armes, Mme Anand évite d'utiliser ce langage.
« Nous avons été clairs depuis un an et demi. Si l'on veut exporter un équipement pour protéger des civils, le permis sera autorisé, a écrit le cabinet de Mme Anand, cette semaine. Le Canada n'approuve pas l'exportation d'armes létales ou de munitions vers Israël depuis janvier 2024. Tous les permis qui le permettaient ont été suspendus et ils le demeurent aujourd'hui. »
M. Woo accuse Mme Anand de tergiverser. « Elle change le langage dans un effort de tenter d'être légaliste sur le respect du gouvernement de ses propres promesses. »
James Fitz-Morris, un porte-parole de Mme Anand, dit qu'il est « malhonnête au mieux » de prétendre que le gouvernement canadien a adopté un nouveau discours. « La position du gouvernement n'a pas changé. Mme Anand ne lisait pas un scénario. Elle a parfois utilisé des mots différents pour lancer un message identique ou pour le clarifier, tout dépendant des circonstances et à quoi elle réagissait. »
M. Fitz-Morris a mentionné que le gouvernement canadien déposait régulièrement des rapports au sujet des exportations d'armes. « Il a remis des milliers de pages de documents au Comité permanent des Affaires étrangères de la Chambre des communes qui les a publiées sur le site internet du Parlement », déclare-t-il.
M. Woo juge que ce n'est pas suffisant. « Jouer avec les mots quand un génocide est commis sous nos propres yeux, c'est scandaleux », commente-t-il.