6 days ago
Faut-il être parrainé pour progresser au travail ?
Pour plusieurs, l'idée d'avoir un parrain au travail évoque une injustice sous la forme d'un favoritisme qui se perpétue dans le temps.
Les groupes sous-représentés, dont les femmes, ont historiquement été désavantagés dans l'accès aux postes de direction. Une des principales raisons avancées pour expliquer ce plafond de verre est qu'elles bénéficient moins que les hommes d'un parrain qui leur ouvre le chemin. Comment briser ce cercle vicieux ?
Quels sont vos sentiments à l'idée d'avoir un parrain au travail ? Pour plusieurs, cela évoque une injustice sous la forme d'un favoritisme qui se perpétue dans le temps. C'est ainsi que se crée le plafond de verre. Certains accèdent aux promotions grâce à leurs relations, pas nécessairement sur la base de leur mérite.
Mais soyons honnêtes : personne ne gravit les échelons seul. Sans appui, les talents issus de groupes sous-représentés ont peu de chances de franchir les barrières invisibles qui freinent l'accès aux postes de direction. Si vous ne voulez pas rester un talent caché, il vous faut envisager le parrainage non pas comme un passe-droit, mais comme une stratégie légitime. Trouver une personne crédible prête à miser sur vous et à parler de vous dans les bons cercles peut certainement faciliter la progression de votre carrière.
Le parrainage demeure mal compris
Il est souvent confondu avec le mentorat, une pratique de développement largement acceptée. On a longtemps cru que les hommes accédaient à plus de promotions que leurs collègues féminines parce qu'ils étaient davantage mentorés. Or, les données montrent que les femmes font autant appel au mentorat que les hommes, contrairement aux idées reçues. Le problème n'est pas l'accès, mais la nature du soutien procuré.
En y regardant de plus près, on constate que les hommes reçoivent plus souvent un soutien actif de la part de leur mentor pour les aider à migrer vers la prochaine étape. Quant aux femmes, elles se disent bien accompagnées sur le plan du développement, mais déplorent souvent l'absence d'un appui concret pour franchir les étapes clés de l'avancement. En somme, elles sont bien mentorées, mais sous-parrainées. C'est aussi une réalité qui touche les personnes racisées et d'autres groupes sous-représentés qui éprouvent également des difficultés d'accès aux rôles de leadership.
Le parrain : bien plus qu'un mentor
Le mentorat et le parrainage sont deux rôles à la fois distincts et complémentaires. Un mentor parle avec vous, un parrain parle de vous. La nuance est de taille. Ils peuvent être exercés par la même personne, mais ce n'est pas souvent le cas.
Le mentor est un modèle qui peut se situer à tous les niveaux de l'organisation, pas seulement parmi les cadres supérieurs. Son rôle consiste à accompagner le développement de ceux qui souhaitent progresser dans leur carrière. Il fait partager son expérience, écoute, conseille et guide dans une relation privée basée sur la confiance mutuelle.
Parfois, le mentor peut s'aventurer plus loin en divulguant des informations privilégiées sur les occasions d'avancement et les façons d'y accéder.
Pour sa part, le parrain joue un rôle plus stratégique. Il facilite et accélère la progression de carrière. Généralement plus haut dans la hiérarchie, il a l'influence nécessaire pour ouvrir les portes des cercles décisionnels. Il va encore plus loin que le mentor en s'engageant personnellement et publiquement à soutenir l'avancement d'un protégé. Il peut, par exemple, le recommander pour diriger un projet d'envergure, l'inviter à des rencontres stratégiques ou l'introduire dans des réseaux influents.
Dans ce cas, la relation dépasse le cadre privé du mentorat. Elle devient plus visible et engageante, donc plus risquée, puisque la crédibilité et la réputation du parrain sont mises en jeu. Cela explique pourquoi le parrainage est plus rare et sélectif.
Formaliser le parrainage
Sans encadrement, le parrainage informel reste vulnérable aux biais de similarité, qui favorisent les affinités personnelles au détriment du mérite et de l'équité. Les recherches montrent que plus de 70 % des parrains choisissent des protégés qui leur ressemblent – même genre, mêmes origines. Ce réflexe, souvent inconscient, perpétue les inégalités d'accès aux postes de direction.
Il devient donc essentiel de structurer le parrainage pour en faire un levier à la fois crédible, équitable et efficace pour fissurer les plafonds de verre.
En conséquence, plusieurs organisations intègrent une discussion sur le parrainage à leurs programmes de mentorat. Cela aide protégés et parrains à en comprendre les apports et les limites. Mais on ne peut miser uniquement sur la bonne volonté des mentors pour accepter spontanément ce rôle plus risqué. Il est souvent plus efficace d'identifier des parrains influents, prêts à s'engager pleinement et de manière intentionnelle principalement auprès de talents issus de groupes sous-représentés. Bien sûr, il faut aussi les rendre responsables quant à cet engagement.
Cela dit, la majorité des gens n'ont pas accès à un programme structuré. Ils doivent donc tracer leur propre voie : repérer un mentor reconnu pour son engagement envers la relève, commencer une relation structurée en amorçant la conversation et en fixant l'ordre du jour des discussions et, avec le temps et la confiance, faire évoluer ce lien vers un parrainage actif.
Il serait contre-productif de mettre de la pression pour obtenir une promotion. Ce serait une erreur stratégique. Un bon protégé sait gérer ses attentes, respecter le positionnement de son parrain et contribuer à la relation, notamment en valorisant ses qualités de développeur de talents.