17-07-2025
En Seine-Maritime, coup de chaux sur le pont de Brotonne
L'augmentation de la fréquence des canicules frappe de plein fouet les routes et les infrastructures notamment les ponts vulnérables aux hausses de température.
En Seine-Maritime,
les plus de 5 800 km de voies et 900 ouvrages d'art sont sous une étroite surveillance notamment les 1 300 m du pont de Brotonne à Rives-en-Seine qui permet de franchir la Seine. Depuis le vendredi 11 juillet, sa chaussée est toute blanche. Elle a été traitée avec du lait de chaux pour une expérimentation afin de ralentir la dilatation des métaux et garantir la stabilité, la durabilité et limiter les coûts d'entretien.
Le lait de chaux est un mélange d'eau et de chaux éteinte « inerte pour l'environnement », explique Franck Invernizzi, directeur des routes du Département de Seine-Maritime. Il a déjà fait ses preuves depuis deux ou trois ans sur certaines portions de routes pour protéger le bitume. « Il s'épand alors avec un ratio de 20 g par m2. Il lutte contre le ressuage : quand il fait chaud, le bitume fond et les cailloux remontent à la surface et sont arrachés. Donc, la bande de roulement se désagrège plus vite et la tenue de route pour les automobilistes est moindre. Le lait de chaux rend la composition chimique plus solide. Le deuxième effet est que, comme il est blanc, la route absorbe moins la chaleur de -10 °C. Cela améliore encore plus la solidité du bitume. »
Fort de ce succès, Franck Invernizzi lance donc une nouvelle expérimentation en partenariat avec le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema) pendant tout l'été : « Nous allons essayer de démontrer que le lait de chaux va diminuer la dilatation des aciers précontraints dans le béton pour éviter qu'il s'effrite. »
« Avec la chaleur, le métal s'étire donc exerce des pressions. Un pont de 100 m peut s'allonger de 12 mm si la température augmente de + 10 °C, détaille Franck Invernizzi. Et comme, les normes de conception de l'époque
(l'inauguration du pont de Brotonne a eu lieu le 9 juillet 1977, NDLR)
, encore en vigueur n'ont pas tenu compte des grosses vagues de chaleur, plus fréquentes, nous voulons vérifier que le mélange, avec son effet gradient thermique protège le pont. Alors, au-delà de la bande de roulement, et comme nous connaissons les endroits qui souffrent, cela peut avoir également un bénéfice sur la structure dont l'entretien coûte 2 millions d'euros par an. »
La facture pour les 11 000 m2 de traitement s'est élevée à 18 000 euros TTC, « ce qui est relativement peu cher pour prévenir d'éventuels problèmes, estime encore directeur des routes du Département de Seine-Maritime. Un traitement dure une semaine même avec des précipitations. Nous pourrons y recourir à chaque pic de chaleur. Avec nos capteurs sur place, nos observations visuelles régulières et nos deux antennes montées sur les pylônes centraux reliées à des satellites, nous allons analyser les effets tout l'été. Le pont de Brotonne est sous surveillance 24 heures/24. Après, nous adapterons », conclut Franck Invernizzi.