15-07-2025
La Terre tourne de plus en plus vite et les scientifiques ne savent pas exactement pourquoi
Après un record de vitesse le 12 juillet 2024, la Terre s'apprête de nouveau à boucler sa rotation journalière avec un peu d'avance le 5 août 2025, selon le Service international de la rotation terrestre et des systèmes de référence (IERS).
C'est un évènement imperceptible mais bien réel : le 5 août, la Terre accomplira sa rotation journalière avec une avance d'environ 1.51 millisecondes sur les 24h habituelles. Cette journée sera la plus courte de l'année.
Car vous ne le saviez peut-être pas, mais la durée d'une journée (soit le temps mis par la Terre pour faire très exactement un tour sur elle-même) n'est pas constante dans le temps. « Une journée idéale est censée durer exactement 86 400 secondes soit 24 heures. Mais depuis l'invention des horloges atomiques dans les années 1950, nous savons que cette durée varie, de manière infime mais mesurable, en fonction d'un grand nombre de paramètres», explique Christian Bizouard, astronome français et directeur de recherche à l'Observatoire de Paris.
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Dès cette époque, les scientifiques ont compris que la Lune jouait un rôle fondamental. Les forces gravitationnelles exercées entre la Terre et la Lune exercent un effet de freinage sur la rotation terrestre. C'est un processus lent, mais constant : la Terre perd environ 2 millisecondes par siècle à cause de ce mécanisme.
Les traces laissées par les cycles des marées dans certaines roches sédimentaires anciennes témoignent qu'il y a environ 2 milliards d'années une journée terrestre durait 20 heures. Sur le long terme, ce ralentissement progressif est l'effet dominant. Depuis l'adoption du temps atomique international en 1967, défini indépendamment du temps astronomique, il est ainsi nécessaire de compenser le décalage progressif qui se creuse entre les deux par l'ajout régulier de secondes intercalaires afin d'éviter une inexorable dérive.
Seconde intercalaire «négative»
Mais la Terre subit aussi des variations saisonnières de sa vitesse de rotation. « De nombreux facteurs comme la position de la Lune par rapport à l'équateur, la fonte des glaces, les tremblements de terre ou bien les mouvements internes du noyau fluide de notre planète, encore très mal compris par les scientifiques, sont à l'origine de ce phénomène», explique l'astronome français.
C'est par exemple l'éloignement de la Lune par rapport à l'équateur terrestre qui explique en partie les records actuels. La mécanique est comparable à celle d'un patineur qui tourne sur lui-même, explique Christian Bizouard. Lorsque la Lune se rapproche des pôles, cela vient en effet modifier la répartition des masses à la surface de notre planète, ce qui entraîne une accélération momentanée de la rotation «comme si la Terre ramenait ses bras» près de son corps.
Associé à des facteurs océaniques, climatiques et atmosphériques, ce phénomène est à l'origine de certaines journées les plus courtes jamais enregistrées. Le 12 juillet 2024, la planète bleue avait battu un record en tournant avec 1,66 millisecondes d'avance. En 2025, le 9 juillet, le 22 juillet ainsi que le 5 août seront pour cette raison les trois journées les plus courtes de l'année avec un pic le 5 août.
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Une accélération mystérieuse
Ce qui est plus mal compris, c'est que la tendance moyenne s'accentue depuis 2020. Les pics sont de plus en plus marqués, comme si la Terre tournait de plus en plus vite. Cette inversion de tendance, inédite à l'échelle contemporaine, n'est pas très clairement comprise. « Les modèles océaniques et atmosphériques ne suffisent plus à expliquer l'accélération observée depuis 2020», souligne Christian Bizouard.
La situation actuelle amène même les scientifiques à envisager pour la première fois l'introduction d'une «seconde intercalaire négative» en 2029 pour compenser cette avance, selon le Service international de la rotation de la Terre et des systèmes de référence.
Dans la vie quotidienne, cette différence est imperceptible. Mais dans des domaines très précis, comme les systèmes GPS, les réseaux informatiques ou les télécommunications, cette opération est importante.
Si cette accélération constitue une anomalie, le phénomène ne devrait pas durer dans le temps. Aux échelles de temps géologiques, la durée du jour va nécessairement finir par reprendre son mouvement naturel et s'allonger. Dans 200 millions d'années, les astronomes estiment qu'une journée durera 25 heures.