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Bienvenue à Astana, mégalopole futuriste où le football n'est pas roi
Capitale du pays depuis 1997, Astana a surgi dans les steppes du Kazakhstan en l'espace de trente ans. Le Lausanne-Sport y joue son avenir européen jeudi soir. Ugo Imsand-Curty - depuis Astana Publié aujourd'hui à 07h01
À la nuit tombée, la tour Bayterek et le centre-ville d'Astana n'ont rien à envier à Dubaï ou Las Vegas.
IMAGO/Depositphotos
En bref:
Les gratte-ciel d'Astana poussent comme des champignons, grappillant du terrain sur la steppe kazakhe. Les immeubles, pour la plupart encore en construction, bordent l'avenue Kabanbai-Batyr et ses sept voies qui propulsent le flot de voitures au sud de la capitale. Soudain, cette haie de vitres et de béton s'interrompt: l'Astana Arena surgit sur la gauche.
C'est dans ce stade de 30'000 places que le Lausanne-Sport jouera son avenir européen face au FK Astana jeudi (coup d'envoi à 16 h, heure suisse). Les Vaudois, qui ont remporté l'aller 3-1 à la Tuilière, devront résister lors du deuxième match décisif.
La construction de l'Astana Arena a coûté 185 millions d'euros en 2009. Le stade a été dessiné par les Anglais du Buro Happold, à qui on doit notamment l'Opéra de Sydney.
IMAGO/Pond5 Images
En ce début de semaine, les alentours de l'enceinte sont déserts. Une poignée de jardiniers bichonnent les espaces verts, tandis que le vent et les températures fraîches forcent le pas des passants. C'est le cas d'Aslan, la trentaine bien tassée et un survêtement neuf sur les épaules. «Moi, fan de foot? Vous avez pas vu ma casquette?»
Trois grands «G» dorés sont brodés sur le tissu noir. «Triple G!» s'exclame le Kazakhstanais, qui s'attendait visiblement à autre chose qu'un silence gêné. «Le meilleur boxeur du monde: Gennadiy Gennadyevich Golovkin.»
Renseignement pris, son idole est restée invaincue durant quinze ans chez les poids moyens, entre 2003 et 2018. Après nous avoir souhaité un bon séjour au pays, Aslan s'en va en hochant la tête, visiblement déconcerté. Astana et son centre commercial haut de 150 mètres
Sur l'esplanade, un petit judoka passe à vive allure sur son vélo, habillé de son kimono bleu floqué du drapeau national. Il est visiblement attendu au Palais des arts martiaux voisin. Un peu plus loin, des adolescentes attendent le début de leur entraînement de patinage en s'étirant devant le palais des glaces Alau. L'autre patinoire – la Barys Arena, située juste derrière – est réservée aux hockeyeurs de l'équipe d'Astana, qui milite dans la ligue russe KHL.
Autant d'immenses stades futuristes qui sont sortis de terre ces quinze dernières années, pour nourrir l'appétit du pays pour le sport. Une stratégie instaurée par Noursoultan Nazarbaïev. Le président a dirigé d'une main de fer l'ex-république soviétique, de son indépendance à 2019, fêtant cinq réélections, dont la dernière avec plus de 97,7% des voix. Astana a même été rebaptisée de son prénom durant quelques années.
Le Khan Shatyr est l'un des centres commerciaux les plus originaux au monde.
IMAGO/
Pour son 70e anniversaire, le dirigeant a offert au peuple de la capitale le Khan Shatyr . Un centre commercial gigantesque dessiné par le Britannique Norman Foster, l'un des architectes les plus primés de la planète.
Difficile de rater cette tente transparente qui culmine à 150 mètres de haut. De quoi y caser un centre aquatique, des restaurants, un cinéma et les magasins des plus grandes marques occidentales, dont certains fabricants de montres suisses. Et une boutique du FK Astana, adversaire du Lausanne-Sport? «Non, malheureusement pas», s'excuse la réceptionniste. «Mais vous pouvez acheter des maillots d'Arsenal ou du Real Madrid ici», ajoute-t-elle en pointant du doigt l'enseigne d'un grand équipementier allemand.
Sous l'arche du siège de KazTransOil, la tour Bayterek pointe le bout de son nez.
IMAGO/Russian Look
Au moment de sortir, on découvre au loin la tour Bayterek, l'une des attractions touristiques de la mégapole de 1,5 million d'habitants, qui se dresse à plus de 2 kilomètres. Le «grand peuplier» et ses 97 mètres ont pris racine en 1997, lorsque Astana a été désignée capitale du pays, en lieu et place d'Almaty. Mais l'horizon est bouché par le siège de KazTransOil.
Le bâtiment nous ramène à la venue du LS en Asie centrale. En effet, le producteur de pétrole fait partie du richissime fonds souverain Samrouk-Kazyna, propriétaire du FK Astana . Le passé soviétique du Kazakhstan est balayé par les grues
Le club de football a été créé de toutes pièces pour inaugurer en grande pompe l'Astana Arena en 2009. La ville comptait pourtant déjà une équipe de football, fondée dans les années 60. Le Dinamo Zelinograd a changé plusieurs fois de nom, évoluant dans le championnat de l'URSS. Direction le stade Kazhymukan Munaitpasov, histoire de remonter aux racines du ballon rond kazakh.
Il faut monter plus au nord et entrer dans une autre Astana. L'ancien centre-ville est bardé d'immeubles datant de l'ère communiste. Tout y est moins clinquant. Mais le voyage dans le temps est de courte durée en ce qui concerne le football. Un immense chantier à ciel ouvert a remplacé le terrain, la piste d'athlétisme et les tribunes. Une enceinte couverte est attendue pour fin 2026.
Derrière les palissades, le chantier de la nouvelle enceinte bat son plein.
Ugo Imsand
À en croire les panneaux qui recouvrent fièrement les palissades, elle s'annonce tout aussi moderne et flamboyante que les gratte-ciel du centre-ville. Une première structure d'acier laisse présager la hauteur de l'édifice. Ici aussi, le passé soviétique a été balayé sur l'autel de la modernité.
À ce stade, vous trouverez des contenus externes supplémentaires. Si vous acceptez que des cookies soient placés par des fournisseurs externes et que des données personnelles soient ainsi transmises à ces derniers, vous devez autoriser tous les cookies et afficher directement le contenu externe. Le football, moins populaire que les sports nomades
En marchant le long de la rivière Ichim, qui finit sa course 2000 kilomètres plus loin en Russie, on tombe enfin sur le premier terrain de football. Un synthétique au revêtement défoncé, entouré d'un grillage rouge que la rouille a rongé. Ce mercredi matin, il fait le bonheur d'une dizaine de gamins.
«C'est une équipe de FC Rondo», explique Sholpan. La mère de famille y amène son garçon trois fois par semaine. Accompagnée de deux autres parents, elle suit d'un œil distrait la séance du jour. «Au Kazakhstan, le football n'est pas aussi populaire que la boxe, le tennis ou les sports nomades comme la lutte. Mais c'est en train de monter. De plus en plus de gamins veulent ressembler à Cristiano Ronaldo ici.»
Maillot du Portugal sur les épaules, le petit Tarlan espère marcher sur les traces de son idole: CR7.
Ugo Imsand
Sur le terrain, les juniors s'appliquent sous les encouragements constants de leur coach. Comme tous les Kazakhstanais croisés depuis notre arrivée, Sholpan s'empresse de demander si Astana nous plaît et si on a déjà goûté aux plats typiques à base de cheval. «Il paraît qu'en Suisse aussi vous en mangez, non?»
De l'autre côté du fleuve Ichim, Astana déroule ses bâtiments modernes, plus grandiloquents les uns que les autres.
Ugo Imsand
Jeudi soir, les parents et les joueurs du FC Rondo seront présents à l'Astana Arena pour espérer une remontada du FKA. Comme 25'000 autres personnes, au moins. De quoi assurer une chaude atmosphère. En 2024, les Norvégiens de Brann y avaient égaré un avantage de deux goals au match retour. Le Lausanne-Sport est prévenu.
À lire encore sur le Lausanne-Sport Ugo Imsand est journaliste à la rubrique sportive de 24 Heures, de la Tribune de Genève et du Matin Dimanche. Ce trentenaire lausannois couvre en particulier le football suisse et international depuis une douzaine d'années. Il réalise aussi des articles plus magazine sur le sport en général et ses liens étroits avec le reste de la société. Plus d'infos @UgoCurty
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