« Je suis contente de ma forme, de mes jambes » : Ferrand-Prévôt dynamite la 1re étape du Tour et envoie un signal d'entrée
On ignore si, enfant, Pauline Ferrand-Prévôt était du genre à glisser des pétards dans les mottes de terre ou les bouses de vaches de la campagne champenoise pour observer le bazar que ça provoquait. Si c'était le cas, elle en a conservé la maîtrise : samedi, elle a en a glissé un joli à 700 m de la ligne, dans le virage de cette côte de Cadoudal qui concentre les plus forts pourcentages. Une minute et vingt-cinq secondes plus tard, Marianne Vos, sa coéquipière, triomphait sur la ligne pour se parer de jaune.
Juste derrière, bras levé et immense sourire, Pauline Ferrand-Prévôt partageait son bonheur. Samedi, au-delà du résultat, c'est la manière employée qui pose les bases d'un Tour où les Visma vont jouer un rôle de premier plan. Voire supérieur à ce qui pouvait être imaginé. Il y a quelques jours, la Française imaginait bien, dans un déroulement idéal, faire « 1 et 2 » avec son aînée, le premier jour. La prédiction a failli se réaliser. L'étape courte et nerveuse servait un final où tout allait se jouer dans la dernière des trois ascensions de la côte de Cadoudal, en mêlant les desseins de favorites au général et de puncheuses en quête d'un bouquet et de gloire dorée. Le manager de l'équipe néerlandaise, Jacco Verhaeren, trimballait sa silhouette massive et son sourire sur la ligne d'arrivée après l'étape : « Cette tactique, c'est clairement quelque chose qu'elles ont décidé à la fin. Le plan était surtout que Pauline et Marianne soient ensemble dans le final. La suite dépendait de comment elles se sentaient et qui lancerait l'offensive en première. »
Ferrand-Prévôt : « Une journée parfaite »
« Cela faisait partie de la tactique de voir si Pauline pouvait gagner ou non, prolongeait la nouvelle Maillot Jaune. Il fallait faire un écart à 400 ou 500 mètres de l'arrivée, et si elle se sentait bien, ç'aurait été sa décision. De mon côté, j'essayais de suivre et de voir si je pouvais toujours être là pour le sprint. »
En écho, Ferrand-Prévôt confirme : « J'ai donc continué pour voir. Et je savais que pour Marianne, un long sprint était plus favorable. » En activant l'état d'urgence derrière elle, Pauline Ferrand-Prévôt a fait exploser le peloton, offrant ainsi un long effort favorable à Vos, seulement suivie de Kim Le Court (AG Insurance-Soudal). La Mauricienne, vainqueure de Liège-Bastogne-Liège cette année, a vu clair sur ce coup : « J'étais tellement concentrée que je n'ai même pas vu partir Pauline. Mais le scénario aurait été le même de toute façon, car il était clair que c'était Marianne qui était la plus forte sur ce genre de final. » Demi Vollering préférait saluer samedi soir « l'incroyable coureuse qu'est Marianne, un exemple pour nous toutes » que s'appesantir sur les 3 secondes lâchées sur la ligne, dans « une journée où tout a été parfait » pour FDJ-Suez.
« Aujourd'hui, on ne voulait pas forcément que je gagne, mais on souhaitait surtout que je finisse dans le temps des premières et ne pas perdre de temps au général »
Pauline Ferrand-Prévôt, 3e de la 1re étape
Pauline Ferrand-Prévôt a surtout donné des gages à sa capitaine de route, une expérimentée coéquipière qui a servi son destin au printemps : « Elle m'avait aidée à gagner Paris-Roubaix. Aujourd'hui (samedi), le plan était de travailler pour elle, et que je mène le train dans la dernière montée. » Dont acte. Ce qui a donné « une brillante tactique d'équipe », s'extasiait Verhaeren.
Ferrand-Prévôt élude une possible victoire, qui l'aurait vue empiler un exploit de plus et revêtir le maillot jaune : « Je savais que je partais un peu trop tôt, mais je savais aussi que c'était pour Marianne. Aujourd'hui, on ne voulait pas forcément que je gagne, mais on souhaitait surtout que je finisse dans le temps des premières et ne pas perdre de temps au général. »
Avant le Tour, les questions étaient nombreuses autour du cas de la Française - elles sont en grande partie toujours présentes à l'issue de la première des neuf longues journées de compétition -, mais ce qu'elle a montré là va au-delà de l'étape, elle consacre les assurances possibles d'un collectif. Samedi, dans une course ramassée, exigeant un sens du placement constant et un final punchy, il n'y avait en l'espèce rien d'étonnant à voir très bien figurer Ferrand-Prévôt. Mais c'est l'attitude de la formation et de la coureuse qui a pris le final à son compte, qui ont marqué les esprits.
Dans l'euphorie de la victoire partagée samedi, Ferrand-Prévôt en voulait encore : « C'était une journée incroyable, et c'est clair qu'il faut en profiter parce que je ne suis pas certaine que sur neuf jours de course, on aura des journées tout le temps comme cela. Je suis contente de ma forme, de mes jambes. Je sais que je vais monter en pression au fur et à mesure. Et j'ai déjà hâte d'être à demain (dimanche). »
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