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Féerie musicale en plein air

Féerie musicale en plein air

La Presse6 days ago
Pour la 10e année, le chef Yannick Nézet-Séguin et l'Orchestre Métropolitain ont convié les Montréalais au mont Royal pour un concert qui s'est avéré absolument magique. L'invité de la soirée, Pierre Lapointe, a joué un rôle essentiel dans ce moment splendide fait de musique classique et de chansons. La Presse a assisté aux dernières répétitions ainsi qu'au spectacle qui a attiré des dizaines de milliers de personnes.
Une tradition adorée
« Bon après-midi ! Bon mont Royal ! » Sur son estrade, face aux musiciens auxquels il s'adresse, Yannick Nézet-Séguin est tout sourire. Ce n'est pas une surprise, le chef de l'Orchestre Métropolitain (OM) semble de nature souriante. Mais en cet avant-dernier après-midi de juillet, quelques heures avant le désormais traditionnel concert au pied du mont Royal, l'humeur est particulièrement bonne. En plein air, durant cette journée chaude, mais pas trop, et où la pluie ne se fait pas menaçante, il fait bon jouer de la musique. La veille, l'orchestre était dans l'arrondissement de Verdun pour y présenter son concert, qui est bien rodé, mais auquel on apporte de petits ajustements. Si la perfection n'existe pas, on s'en approche beaucoup sur cette scène (nous reviendrons plus tard sur le concert donné en soirée au pied du mont Royal). « En passant, bravo pour hier », lance le chef d'orchestre au groupe de musiciens, qu'on nous décrit comme une famille – au sens figuré comme au sens propre, puisque des liens familiaux unissent plusieurs d'entre eux.
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Une foule pour l'OM
On attend plusieurs dizaines de milliers de personnes sur le vaste terrain gazonné aux abords de l'avenue du Parc. Le rendez-vous (qui s'inscrit dans une tournée estivale où l'OM parcourt la province) est chaque année plus populaire. « Quand on a commencé, au sommet du mont Royal, on a été happés par la beauté des lieux, nous dit Yannick Nézet-Séguin, en marge des répétitions. Et après quelques années, on s'est fait dire qu'il fallait aller en bas parce qu'il y avait trop de gens. Et la première année où on a joué ici, en bas, j'ai compris combien on rejoignait encore plus tous les Montréalais et Montréalaises. Chaque fois, c'est un moment auquel on ne croit pas. Avoir des dizaines de milliers de gens qui sont en silence, qui viennent écouter, qui ont du plaisir… » L'excitation est palpable chez le chef d'orchestre qui voyage partout dans le monde grâce à la musique, mais qui connaît si bien l'accueil qu'on lui réserve à la maison. « C'est un de mes moments préférés de l'année, confie le maestro. Pour tout le monde, en fait. » Le moment du concert venu, l'espace vert au pied du mont Royal s'est rempli d'amoureux de la musique de tous les âges. Des familles, des couples, des groupes d'amis plus ou moins jeunes.
PHOTO ÉDOUARD DESROCHES, LA PRESSE
Yannick Nézet-Séguin en répétition générale du concert, mercredi
Les préparatifs
En tout début d'après-midi, tous les instruments sont accordés et on parcourt quelques passages du programme une dernière fois. Le chef d'orchestre fait des blagues avec ses musiciens, mais donne aussi des directives pour que tout se passe au mieux le soir venu. « On en profite pour avoir des invités, mais aussi pour donner au public ce qu'on fait. Ce serait trop facile de dire que c'est l'été, alors on fait de la musique populaire. Les gens pourraient avoir tendance à dire qu'ils ont aimé ça, mais qu'ils n'aimeront pas les programmes dans l'année. Alors que non : si vous avez aimé ça, vous risquez d'aimer aussi [ce qui est présenté en salle]. » Le programme est bien réfléchi : « On amène toutes les choses qui sont importantes pour l'OM, dont des compositions de femmes, mais aussi le souhait de mettre en musique symphonique les apports du Canada français, explique Yannick Nézet-Séguin. » Et puis, il y a Pierre Lapointe. En répétition, il se présente sur scène sous les applaudissements de ses compagnons de la journée avec une fébrilité qu'il ne cache pas. « OK, c'est parfait comme ça, je n'ai plus peur », lance-t-il aux musiciens après que tous ont révisé quelques détails pour que sa superbe chanson Toutes tes idoles soit livrée avec son plein potentiel symphonique.
PHOTO CHARLES WILLIAM PELLETIER, COLLABORATION SPÉCIALE
« On en profite pour avoir des invités, mais aussi pour donner au public ce qu'on fait », explique Yannick Nézet-Séguin.
Un public dévoué
Plus de six heures avant le début du concert, quelques grappes de gens étaient déjà installées, sur des chaises ou des couvertures. Tous ont pu assister à la générale, dernière répétition avant le grand spectacle. Parmi les premiers arrivés, un groupe de tout jeunes enfants, tous vêtus du t-shirt jaune canari de leur camp de jour. Un peu plus loin, sous les arbres, de petits groupes d'adolescents. Tous ont été conviés par l'organisation de l'OM à se plonger dans l'univers de la musique classique en concert. Quatre organismes ont répondu à l'invitation à assister à la répétition générale. Quelque 150 jeunes et leurs parents étaient présents. « On a approché des camps de jour et des organismes communautaires de partout dans la ville, explique Lysandre Dunberry, responsable de l'engagement communautaire à l'OM. On ne leur a pas juste donné rendez-vous aujourd'hui : on a donné des ateliers préparatoires, des 'ateliers de spectateurs', pour qu'ils se familiarisent avec les instruments de l'orchestre et puissent les reconnaître à la générale. » L'initiative a permis aux enfants d'assister, pour la plupart, à leur première prestation d'un orchestre symphonique.
PHOTO ÉDOUARD DESROCHES, LA PRESSE
Quelques grappes de gens étaient installées sur des chaises ou des couvertures durant la répétition générale.
Jouer au pied du mont Royal
Ce rendez-vous annuel à Montréal est un plaisir évident pour le public, mais aussi pour les musiciens sur scène. Xavier Fortin, au cor, vit l'expérience pour la première fois. Pour avoir vu des images des éditions passées, il sait que le moment sera « vibrant », ce qui suscite en lui une douce fébrilité. « J'ai hâte de voir la foule s'étendre jusqu'en haut, dit-il. Ça reste une occasion de vivre quelque chose de différent de quand on est en salle. » Pour lui, ça représente notamment la chance de voir le visage des spectateurs, chose qu'il apprécie particulièrement. « C'est une belle vitrine pour l'orchestre, l'occasion pour des passants qui ne seraient peut-être pas venus en salle de venir écouter et de se dire qu'il serait intéressant de revenir », ajoute Lizann Gervais, deuxième violon, qui est dans l'orchestre depuis 10 ans. Elle a vécu presque tous les concerts donnés au mont Royal, dont les premiers au sommet de la montagne. « Au fil des années, c'est devenu une vraie tradition, un rendez-vous marquant pour l'OM. » Les deux musiciens savent que même s'il s'agit d'un concert comme ils en ont déjà joué des centaines, celui-ci aura une ambiance particulière, estivale, joviale, plus décontractée pour tout le monde.
PHOTO ÉDOUARD DESROCHES, LA PRESSE
« C'est une belle vitrine pour l'orchestre, l'occasion pour des passants qui ne seraient peut-être pas venus en salle de venir écouter et de se dire qu'il serait intéressant de revenir », souligne Lizann Gervais, deuxième violon.
Un spectacle féerique
Animée par une Mariana Mazza aussi drôle et assumée qu'à son habitude, la soirée a débuté dans le rire. Alors que l'on célèbre cette année le 25e anniversaire de l'arrivée de Yannick Nézet-Séguin à la tête de l'Orchestre Métropolitain, l'humoriste a invité « le meilleur chef d'orchestre que Dieu ait jamais pondu » à la rejoindre sur scène. Ainsi a débuté l'exceptionnel moment que l'OM nous avait préparé. La Symphonie no 4 « Italienne » de Mendelssohn d'abord, une ode à la nature, comme un voyage tantôt calme, tantôt tumultueux dans une forêt italienne, que le chef d'orchestre nous a sommés d'imaginer. « On sent presque la bonne odeur de la bonne bouffe italienne », a souligné Yannick Nézet-Séguin, après un « Bonjour, Montréal ! » bien senti.
Après un premier mouvement chaleureux et enthousiaste, le second a amené une certaine légèreté, les cordes subtiles et discrètes, comme pour ne pas perturber les éléments naturels tout autour dans cette promenade imaginaire. Le troisième mouvement a évoqué un réveil, puis le quatrième a présenté le thème sous une forme dansante (le chef a d'ailleurs invité la foule compacte à danser), une saltarelle enjouée, sans être dénué de montées dramatiques. Yannick Nézet-Séguin, maître de son art, a été magnifique dans la façon majestueuse dont il a mené son orchestre, constant et solide.
Après un changement de « kit » pour le chef, on s'en est allés en France, comme l'a indiqué Mariana Mazza, pour La nuit et l'amour d'Augusta Holmès. Romantique et poétique, comme la trame sonore d'un film d'amour, la pièce a transporté le public du mont Royal dans un tout autre univers, comme ce serait le cas tout au long de la soirée. « Vous nous inspirez, merci de répondre aussi présent à notre rendez-vous, merci d'accepter qu'on partage ce en quoi on est passionnés. On est là pour vous faire du bien, pour vous partager du bonheur, de l'amour. Dieu sait qu'on en a besoin ! » Est alors venu le temps de rendre hommage au compositeur, arrangeur et chef d'orchestre Hector Gratton, en exauçant son souhait de rendre symphoniques les mélodies traditionnelles canadiennes-françaises. Dansons le carcaillou a permis au violon de devenir « violoneux » à l'occasion. Tous les membres de l'orchestre se sont réunis pour L'oiseau de feu d'Igor Stravinski, dont ils ont joué les trois derniers mouvements. La symphonie s'est déployée d'abord dans une fougue envoûtante, puis dans un calme apaisant et, finalement, dans une explosion majestueuse, qui a été accueillie par une ovation. Devant nous, tout le temps qu'ont duré les trois mouvements, une fillette s'est tenue debout pour imiter le chef d'orchestre, un crayon à la main, ayant peut-être trouvé ce soir-là de l'inspiration pour son futur métier.
Le clou du spectacle, Pierre Lapointe (quel interprète exceptionnel !), a apporté à la soirée le finale qu'elle méritait, tandis que le soleil terminait sa descente. « La cerise sur le cupcake », dixit Mariana Mazza. Toutes tes idoles, Madame et Hymne pour ceux qui ne s'excusent pas, toutes tirées de son récent album Dix chansons démodées pour ceux qui ont le cœur abîmé, sont devenues encore plus grandioses grâce à l'OM. Le mariage fut parfait.
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