
Baisse de la natalité : « Il faut faciliter la vie des adultes qui ont des enfants »
En mai 2025, le solde naturel de la France, soit la différence entre les naissances et les décès, a été négatif sur douze mois. Ce retournement a lieu plus tôt que ce que l'Ined avait prévu. Est-ce une surprise pour vous ?
Non. Dans l'étude que nous avons publiée en mars, avec mon collègue Gilles Pison, nous avons estimé que le solde naturel deviendrait structurellement négatif en 2027, en prenant pour hypothèse une stabilisation du taux de fécondité à son niveau de 2024, soit 1,6 enfant par femme.
Or le nombre de naissances en France n'a pas cessé de baisser et à court terme, il est peu probable qu'il remonte. On ne peut donc pas exclure que le solde naturel en France devienne négatif plus tôt, cette année peut-être ou en 2026.
Car en parallèle, les décès augmentent. Au-delà des variations saisonnières liées à l'épidémie de grippe ou aux fortes chaleurs, l'arrivée à des âges élevés de la génération des baby-boomers va entraîner une hausse du nombre de décès.
Quels sont les enjeux de ce virage démographique en termes de politiques publiques ?
Tout d'abord, le nombre de personnes âgées va significativement augmenter au cours des prochaines années. Le vieillissement de la population est un sujet majeur. Cela va coûter très cher : le nombre de retraités va augmenter, ce qui est bien sûr un sujet pour le financement de notre système de protection sociale.
Il va falloir développer des maisons de retraite de qualité, recruter du personnel. Il faudra aussi réfléchir à l'organisation du maintien à domicile. Cela va nécessiter des aménagements car ce ne sont ni les filles ni les belles-filles qui prendront en charge les plus âgés.
Le deuxième enjeu concerne l'immigration. Si la France affiche un solde naturel négatif, c'est elle qui permettra d'éviter le déclin de sa population. Mais le pays doit faire des efforts pour mieux accueillir les immigrés et favoriser leur intégration. Or on ne voit aucune volonté politique d'aller dans ce sens en France comme en Europe d'ailleurs.
Les Français attendent des mesures qui relancent la natalité. Que préconisez-vous ?
Il faut faciliter la vie des adultes qui ont des enfants. Cela passe par l'amélioration de l'offre de gardes d'enfants qui reste fragile, mais il faudrait aussi engager une réflexion sur les horaires « atypiques », à savoir la garde d'enfants pour ceux qui travaillent très tôt ou très tard.
Aujourd'hui, la priorité selon moi est de réfléchir aux conditions qui permettent une bonne conciliation entre la vie professionnelle et la vie familiale et une diminution des inégalités entre femmes et hommes, notamment un congé parental court et bien rémunéré, accompagné de mesures incitatives pour les jeunes pères.
Les pays d'Europe à la fécondité la plus élevée sont ceux qui favorisent un meilleur équilibre entre vie privée et vie professionnelle, pas ceux qui prennent des mesures pour soutenir la natalité.
Comment la population française devrait-elle évoluer ?
Dans notre étude du mois de mars, nous avons retenu l'hypothèse que le solde migratoire resterait positif autour de 150.000 par an. Si c'est le cas, et si le taux de fécondité se maintient à son niveau actuel, la population française augmenterait encore pendant les vingt prochaines années, mais à un rythme de plus en plus lent.
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