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« Je fais croire que je ne veux pas me mouiller les cheveux » : pour ces adultes qui ne savent pas nager, les vacances d'été sont un enfer

« Je fais croire que je ne veux pas me mouiller les cheveux » : pour ces adultes qui ne savent pas nager, les vacances d'été sont un enfer

COMPLEXE - « Je l'ai toujours vécu comme un véritable échec. Cette incapacité me renvoie constamment à une forme de vulnérabilité. » Kamelia a 27 ans et pendant longtemps, cette jeune Parisienne a caché un secret : elle ne sait pas nager.
Elle est pourtant loin d'être la seule. Selon une enquête de Santé Publique France datant de 2016, près d'un Français sur six (16,3 % exactement) ne sait ni flotter, ni mettre la tête sous l'eau, et encore moins esquisser quelques mouvements de nage. Si les seniors n'ayant jamais acquis cette compétence sont les plus nombreux, les jeunes ne sont pas épargnés, puisque 5,2 % des 15-24 ans et 9,2 % de 25-44 ans ne se sentent pas capables de se baigner là où ils n'ont pas pied, qu'ils soient à la mer ou à la piscine, rapporte l'agence nationale.
Une réalité, donc, plus fréquente qu'on ne le croit, mais que beaucoup taisent par peur du jugement. Comme Kamelia qui a longtemps esquivé les sorties à la plage et les invitations à la piscine. « Je me punissais moi-même en me disant : 'Pourquoi aller à la plage si tu ne sais même pas nager ?' C'était comme si je n'en étais pas digne. Du coup, je restais sur ma serviette à bronzer, en faisant croire que je ne voulais pas mouiller mes cheveux - c'était devenu mon excuse favorite pour éviter d'aller dans l'eau », relate la jeune femme, qui avoue même avoir longtemps caché à son mari ce qu'elle considère être son « plus gros complexe ». « J'étais tellement honteuse à l'idée qu'il puisse me juger… Je ne voulais pas qu'il pense que j'étais moins capable ou qu'il me regarde différemment. »
Une forme d'exclusion sociale
Ce sentiment de honte, Mickaël* l'a également longtemps ressenti. Lui qui n'a jamais reçu de leçon de natation à l'école primaire se remémore avec amertume les virées entre copains à la plage quand il était ado. « Ils allaient loin, nageaient jusqu'à la bouée, et moi je restais au bord, l'eau au niveau des genoux, comme les enfants », lâche le quadragénaire, qui se souvient de s'être senti honteux, même s'il n'a jamais été la cible de moqueries. « Quand je disais que je ne savais pas nager, on était plutôt surpris. »
« Aujourd'hui ne pas savoir nager reste tabou car dans la tête des gens, tout le monde sait nager », confirme auprès du HuffPost Véronique Dufresnes. Depuis 1982, cette maître nageuse et psychopédagogue accompagne à Paris des adultes « de 25 à 70 ans » n'ayant jamais appris à nager au sein de l'association Le Pied dans l'eau, qu'elle a cofondée, et qui privilégie une approche douce, bienveillante et surtout personnalisée de la baignade.
Comme le rapporte Santé Publique France, l'accès à l'eau et surtout, l'apprentissage de la nage, restent conditionnés par notre milieu social. Difficile aussi de découvrir dès le plus jeune âge le plaisir de la baignade ou même les rudiments de la nage quand personne n'est là pour nous guider dans l'eau. Pour Kamelia, cela ne faisait « tout simplement pas partie de son environnement ». « Autour de moi, ce n'était pas quelque chose de courant, surtout pour les filles », constate-t-elle tristement, tandis que Mickaël, dont les parents ne savent pas nager, se souvient d'un cours en 6 e « où on laissait ceux qui ne savaient pas nager dans le petit bassin sans rien à faire, si ce n'est aller chercher des anneaux sous l'eau. C'est la première fois que je me suis senti frustré et honteux ».
Apprivoiser sa peur de l'eau
Avant d'apprendre à nager la brasse coulée ou le dos crawlé, c'est aussi tout un imaginaire douloureux qu'il faut parfois déconstruire. « Ce sont souvent des adultes qui, plus jeunes, ont eu la peur de leur vie dans l'eau. Parfois, ils ont été humiliés, par exemple en étant poussés dans le grand bassin par un maître-nageur », observe Véronique Dufresnes.
C'est exactement ce qu'a vécu Mickaël, qui angoisse encore en se rappelant cette leçon prise à ses 13 ans. « Je me débattais, je cherchais la perche. J'avais déjà peur de l'eau avant, mais ce moment a été un point de non-retour. » Pour Kamelia, c'est une balade en bateau à l'âge de 7 ans qui a ancré sa phobie de l'eau. « Celui qui naviguait tournait dans tous les sens, de l'eau entrait dans le bateau. J'étais tétanisée, je pleurais de peur que ça coule, alors que les autres riaient. »
Dans ces conditions, difficile de se jeter sereinement à l'eau et d'apprendre à pratiquer la brasse. Mais cela, les maîtres-nageurs ont souvent du mal à le comprendre, déplore Véronique Dufresnes. « Eux restent sur le bord et donnent des frites à coincer sous les bras pour apprendre le mouvement de jambes. Sauf que les personnes n'en sont pas là, elles pensent que si elles mettent la tête sous l'eau, elles vont étouffer et couler. Ça ne peut tout simplement pas marcher », assure celle qui regrette aussi que la formation de maître-nageur soit davantage axée sur « le fait de trouver le nouveau Léon Marchand que d'apprendre à nager aux personnes ayant des difficultés ».
Aller à son rythme et s'écouter
Comment faire, alors pour enfin vaincre sa peur de l'eau ? Comme le rappelle Véronique Dufresnes, cela tient avant tout au bon environnement. Le Pied dans l'eau propose, par exemple, un encadrement par quatre professionnels présents dans le bassin, durant un week-end ou en soirée, pour que chacun puisse apprendre à son rythme à apprivoiser cet élément qui leur fait si peur. « Avant d'apprendre à nager, il faut savoir mettre la tête sous l'eau avec plaisir, savoir s'allonger sur le dos et sur le ventre, se laisser porter », résume la fondatrice qui, à la question « apprend-on à nager en un week-end ? », réplique : « Je dis toujours aux personnes qui viennent nous voir 'si je vous réponds oui, ne venez jamais nous voir, car cela veut dire qu'on n'est pas à l'écoute de votre besoin' ».
Pour Mickaël, ces cours pris durant un trimestre il y a quelques années ont en tout cas été « une révélation ». « J'ai appris à me sentir bien dans l'eau et les rudiments du crawl », indique le père de famille qui envisage désormais de reprendre quelques cours pour perfectionner sa technique et ainsi enfin profiter pleinement des moments avec ses enfants au bord de la mer et de la piscine.
De son côté, Kamelia a réussi à tenir la promesse qu'elle s'était faite en décembre dernier : apprendre à nager d'ici la fin de l'année. Soutenue par son mari, qui l'a accompagnée tous les dimanches à la piscine, et après « des premières séances très dures », elle a pris confiance en elle et s'est même initiée à la brasse. « Aujourd'hui, je ne me sens plus paralysée, ni inférieure aux autres. Je suis fière d'avoir osé franchir ce pas à l'âge adulte, et surtout d'avoir dépassé une peur qui m'avait suivie toute ma vie. »
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