5 days ago
«On l'associe encore beaucoup à Marseille» : et pourtant, le meilleur pastis du monde est désormais normand
Si le pastis évoque plutôt une carte postale provençale avec la pétanque et le chant des cigales, c'est bien la Normandie que le World Pastis Award a honorée.
À Colombelles, petite commune située aux portes de Caen, une distillerie artisanale fait beaucoup parler d'elle depuis quelques semaines. Et pour cause : son pastis a été élu comme le meilleur du monde en 2025 lors du concours international World Pastis Awards organisé à Londres en juin dernier. Dans une région plutôt connue pour le cidre et le calvados, voir le pastis rafler la mise peut surprendre. Et encore plus lorsque l'on sait que derrière la distillerie se cache Dave Marsland, un Anglais installé en Normandie avec sa femme Julie.
À découvrir Découvrez toutes les dates des foires aux vins d'automne 2025
Le couple explique avoir reçu des demandes de clients amateurs de spiritueux artisanaux, curieux de voir ce que la distillerie, déjà primée pour ses gins, pouvait proposer du côté de l'anis. Il leur aura fallu près d'un an d'expérimentations pour trouver la bonne recette du «pastis de niche», comme ils l'appellent eux-mêmes. Dave, nous confie «qu'ils voulaient quelque chose d'assez unique, encore jamais vu, avec une vraie identité».
Publicité
Un pastis au goût de Normandie
Cette identité, ils l'ont trouvée dans un ingrédient emblématique de la région : la pomme. «En Normandie, on a pas mal de pommes», sourit Dave. «Alors pourquoi ne pas les utiliser comme base pour notre alcool ?» C'est ainsi qu'est né le Pastis du Verger, une version revisitée de l'apéritif anisé aux accents marseillais. «On retrouve bien l'anis, mais ensuite il y a cette couche gourmande, aromatique, qui reste en bouche. C'est ça qui le rend différent», explique le distillateur. Les plantes utilisées dans cette recette mêlent les classiques du pastis comme l'anis vert, la badiane, la réglisse… et des herbes aromatiques cultivées par la distillerie, comme le thym. Résultat : un pastis aux notes fruitées, fraîches, et sans sucre ajouté, à l'exception de celui naturellement contenu dans la réglisse et la pomme.
Le jury du concours londonien ne s'y est pas trompé. Il décrit «un profil complexe, avec un nez doux et sec, aux notes d'épices poivrées et de graines de coriandre, rehaussé d'une pointe miellée ». En bouche, les experts évoquent «une base solide de notes boisées et anisées, équilibrées par la réglisse et les épices», avec une finale marquée par «une intensité remarquable» et un effet louche (la teneur en anis NDLR) «qui sublime l'anis, tandis que la coriandre s'estompe avec grâce». Un profil volontairement très éloigné des grandes références industrielles. «Le pastis est une boisson clivante : soit on adore, soit on déteste. L'idée, c'était de faire un pastis bien soigné, qui puisse plaire aussi à ceux qui pensent ne pas aimer ça», affirme Dave.
À lire aussi Quels sont les meilleurs pastis du marché ?
Si le pastis est né en Provence au début du XXe siècle, les dernières éditions du concours montrent que la carte des pastis artisanaux s'élargit. Déjà en 2024, c'est un pastis du Jura qui avait remporté le concours. Cette année, le Pastis du Verger a devancé un pastis lyonnais arrivé en deuxième position. D'après le cofondateur de cette petite distillerie, «ça montre qu'on trouve aujourd'hui des pastis artisanaux partout en France, très différents du Ricard». Bien sûr, «on associe encore beaucoup le pastis à Marseille, mais nous, on crée toujours des produits avec une histoire, un lieu», défend-il. «Le Pastis du Verger, c'est autre chose que le pastis de la plage. Et finalement, c'est bien que ça fasse parler». Depuis leur médaille, les bouteilles s'arrachent, et les retours ne viennent pas que de Normandie. «Ça intrigue les gens. Ils veulent voir ce que donne un pastis venu d'ailleurs», raconte la distillerie. Même des Marseillais, sourires en coin, s'en sont procuré une bouteille.