07-07-2025
Du lit d'hôpital à la tête d'un studio de pilates
Justine Rozon a fondé le studio Roze Pilates après un long parcours de réadaptation à la suite d'un accident de voiture.
Après avoir survécu à un grave accident de voiture à 16 ans, Justine Rozon est aujourd'hui à la tête d'un studio de pilates. Ce n'est pas un hasard si elle a choisi de lancer une entreprise dans ce domaine, qui a été fort important dans sa réadaptation.
Le studio Roze Pilates est situé dans un beau local à deux étages rue de la Commune, dans le Vieux-Montréal. Justine Rozon a eu un coup de foudre pour ce lieu dès qu'elle l'a visité, et y a installé son entreprise, qui offre des cours de pilates au sol, avec barre et sur des appareils de type « reformer ».
L'histoire a l'air banale, mais elle ne l'est pas. Il faut revenir 15 ans en arrière pour comprendre pourquoi…
Un accident qui change tout
L'histoire avait fait les manchettes en 2010 : une voiture filant à vive allure avait percuté un arbre à Mont-Royal. Trois jeunes femmes qui se trouvaient à bord du véhicule avaient été blessées, et le conducteur avait écopé de trois ans de prison pour conduite dangereuse.
L'évènement a laissé des séquelles permanentes chez Justine Rozon. Elle a dû être plongée dans un coma artificiel pendant plusieurs jours, a subi des opérations chirurgicales à répétition et a été hospitalisée durant plus de six mois.
Quand elle s'est réveillée à l'hôpital, elle avait de la difficulté à bouger et ne pouvait pas s'asseoir par elle-même. « Quand j'ai commencé à faire de la physiothérapie, ça m'a beaucoup frustrée », se rappelle-t-elle.
À 16 ans, alors que ses amis s'apprêtaient à entamer leur dernière année de secondaire, elle devait réapprendre à bouger ses pieds et à prendre des choses avec ses mains.
N'empêche, elle a remonté la pente. « J'ai continué la physio et ça m'a vraiment fait du bien, le gym aussi », dit-elle.
Mais le plus beau déclic est survenu lorsque sa belle-mère lui a recommandé de tenter le pilates, une forme d'exercice qui se concentre sur le renforcement musculaire et l'équilibre.
« Dès le premier cours que j'ai fait, je suis tombée en amour », raconte-t-elle en souriant. « Le pilates me permettait de ressentir mon corps d'une façon que je n'arrivais pas à faire au gym, parce que c'était plus profond comme travail. J'ai pu rebâtir la force de mon tronc », indique-t-elle.
La fibre entrepreneuriale
Après son accident, Justine Rozon a réussi à se rendre sur les bancs d'université en administration, comme elle l'avait prévu adolescente. Mais le cœur n'y était pas et elle avait de la difficulté à écouter en classe.
Elle a donc changé de plan et a suivi des cours pour devenir instructrice de pilates. Après avoir enseigné dans quelques studios et fait du travail autonome durant la pandémie, elle a ouvert son propre espace en 2022, où enseignent aujourd'hui une douzaine d'instructeurs.
PHOTO DENIS GERMAIN, COLLABORATION SPÉCIALE
Une salle du studio est consacrée à la pratique du pilates avec barre.
« Je pense que j'ai toujours eu cette fibre entrepreneuriale là. J'aime recevoir les gens chez moi, faire en sorte qu'ils soient reçus d'une certaine façon. C'est aussi une façon pour moi de pouvoir pratiquer le pilates à ma façon », souligne-t-elle.
Un souhait pour son studio ? Parvenir à diversifier sa clientèle, notamment en accueillant des personnes plus âgées ou qui ont des limitations physiques.
Après tout, elle sait ce que c'est. Encore aujourd'hui, à 31 ans, Justine Rozon doit composer avec des contraintes physiques et des douleurs, dit-elle.
La vie lui rappelle parfois qu'elle n'est pas seule. « Il y a une cliente que je vois en privé qui a des conditions de santé qui font en sorte que je ne peux pas travailler avec elle comme avec n'importe qui. […] Au début, je lui ai demandé d'effectuer certains mouvements comme lever son bras sur le côté, et je voyais qu'elle était fâchée de ne pas y arriver. Je me suis tellement reconnue en elle. Je me disais : Mon Dieu, c'est quoi, cette chance que j'ai de pouvoir remettre [les bénéfices de la pratique du pilates] à quelqu'un après l'avoir moi-même vécu ? »
La cliente voit encore Justine Rozon régulièrement. « On ne va pas plus loin que sa limite, et je le vois dans son progrès, ça paraît », dit-elle.