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Le rêve envolé de Théodore Côté
Le rêve envolé de Théodore Côté

La Presse

time11-08-2025

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Le rêve envolé de Théodore Côté

« Théodore venait de passer son permis de conduire. Il devait commencer le foot au cégep. Il allait commencer à vivre ces rêves. C'est fini, ça », sanglote sa mère, Vania Pacheco. Le 30 juin, Théodore Côté, 17 ans, se rend chez la copine d'un ami. Il est tard le soir. Pas grave, se dit-il. Il n'a pas vu cet ami depuis longtemps, l'occasion est trop belle de profiter de la soirée. Il fait noir. Les adolescents décident de se baigner dans la piscine hors terre. Théodore plonge. Une manœuvre qu'il a faite des centaines de fois. Des milliers même, puisque sa famille possède une piscine semblable. « J'ai plongé à pic. Mes jambes sont allées directement au-dessus de ma tête », se remémore Théodore, de son lit d'hôpital. PHOTO FOURNIE PAR LA FAMILLE Théodore à son bal de fin d'études Sa vie a basculé en un saut. Ce soir-là, il est devenu tétraplégique. « Je flottais à la surface de l'eau. Mon corps ne bougeait plus. J'avais très mal. Tout ce que je pouvais faire, c'est bouger ma tête pour appeler mes amis à l'aide », raconte l'adolescent de Gatineau. Au départ, les amis de Théo croyaient qu'il blaguait, comme il en a l'habitude. Quand ils ont compris l'urgence de la situation, ils ont sauté à l'eau, l'ont transporté sur la terrasse de la piscine. « Si ses amis n'avaient pas été là, je n'aurais plus de fils aujourd'hui. Théo ne serait plus là », réalise sa mère, toujours sous le choc. Couché, Théo est incapable de bouger. Sa mère reçoit un appel vers minuit : son fils n'a plus aucune sensation, du cou aux pieds. « C'était irréel. C'était juste un cauchemar. Je voulais juste me réveiller », confie en larmes Vania Pacheco. À l'hôpital de Hull, le constat est sans appel : deux vertèbres du cou de Théo compriment sa moelle épinière. Il doit subir une opération d'ici 24 heures pour préserver la moindre chance de mouvoir ses membres à nouveau. On ne pratique pas l'intervention requise à Gatineau. Il devra être transféré à l'hôpital du Sacré-Cœur à Montréal. PHOTO FOURNIE PAR LA FAMILLE Théodore Côté quatre heures après son opération Après l'opération, Théo est transféré aux soins intensifs. Il est atteint d'une pneumonie. En raison de sa paralysie, il est incapable de tousser. Les médecins doivent effectuer des poussées pulmonaires pour lui permettre de libérer ses sécrétions. « Son état empirait. Je ne savais plus quoi faire. Je voulais juste le serrer dans mes bras, le guérir, tout effacer », raconte Vania Pacheco. Une vie bousculée Au début du mois d'août, Théodore Côté se trouve toujours à l'hôpital du Sacré-Cœur, à Montréal. Il suit une réadaptation. Sa moelle épinière n'ayant pas été complètement atteinte, tout espoir de retrouver une certaine mobilité n'est pas mort. « Le médecin nous a dit que ça peut prendre trois mois, six mois, un an. Ou même que sa mobilité ne revienne jamais », explique Vania Pacheco, en hochant la tête. « On y va une victoire à la fois. On espère surtout qu'il retrouve l'autonomie de ses mains. » C'est un choc de le voir incapable de manger seul. De se laver. De devoir tout faire pour un jeune homme qui était si autonome. Vania Pacheco « Je me dis qu'au moins, je l'ai avec moi. Sinon, je n'aurais jamais pu passer par-dessus », dit-elle. PHOTO FOURNIE PAR LA FAMILLE Théodore, en compagnie de sa mère, Vania Pacheco Dans l'esprit des parents de Théo, les prochaines étapes se bousculent. Ils tentent d'imaginer l'avenir de leur fils. À l'intérieur de la maison familiale, 20 marches séparent l'étage du haut au rez-de-chaussée, et 10 marches du sous-sol. Cela pouvait paraître banal, il y a quelques semaines, mais ce sont désormais autant d'obstacles qui séparent Théo d'une vie normale. Les parents cherchent donc un nouveau nid familial sur un étage. Ils se préparent au pire, en s'accrochant à l'espoir de voir leur fils de nouveau mobile. « Plusieurs personnes m'écrivent pour me dire que leurs proches ont vécu une situation similaire. Ils me disent qu'après un an, ils marchaient. D'autres n'y sont jamais arrivés, mais sont quand même parvenus à vivre une belle vie. Ils ont des enfants, sont mariés. Ça nous encourage beaucoup », confie Vania Pacheco. Le soutien d'une communauté Théodore Côté a rêvé toute sa vie d'une carrière au football. Son seul rêve, aujourd'hui, est de parvenir à bouger ses mains et ses doigts. Chaque jour, durant trois heures, il suit des séances de physio et d'ergothérapie. Les thérapeutes poussent contre ses biceps et ses triceps, qu'il peut bouger, et lui doit forcer en sens inverse. PHOTO FOURNIE PAR LA FAMILLE Théodore lors de sa première journée de physiothérapie « C'est rough », admet Théo sans détour. « Mais c'est correct, je suis fait fort. Je suis un joueur de foot : pousser fort, j'y suis habitué », lance-t-il, sourire narquois aux lèvres. Si Théo s'était inscrit au cégep de l'Outaouais, c'est uniquement pour se joindre à l'équipe de football des Griffons. « Sinon, je serais directement allé faire un DEP [diplôme d'études professionnelles] en plomberie ou en électricité. Je suis un gars mobile, un TDAH : je dois bouger, je dois toujours faire quelque chose de mes mains », explique-t-il. Ses chances de pratiquer un métier manuel sont maintenant minces. Celles de jouer au football sont carrément nulles. Le deuil est gros pour un jeune, dont la fierté d'avoir été sélectionné par une équipe collégiale était immense. Au moment où l'on discute, les Griffons amorcent leur camp estival. « J'avais fait le camp du printemps avec eux, ça avait très bien été. Je me sentais chanceux, d'être choisi par mon cégep », admet le joueur de ligne défensive, étendu dans son lit. Ça va être une grosse étape à passer [mentalement]. Théodore Côté Sur le terrain, Théo se comparait à Nick Bosa, des 49ers de San Francisco, un joueur cérébral et combatif. « Les mamans des autres joueurs allaient le voir et lui disaient : 'Théo, protège mon gars sur le terrain.' Il était fier de défendre leurs arrières », se souvient Vania Pacheco. Aujourd'hui, c'est Théo qui a besoin d'être défendu. Le soutien de ses amis et de ses anciens coéquipiers le transporte. Au cours des dernières semaines, il a reçu de nombreuses visites, dont celle de son ancien entraîneur, de l'école secondaire du Versant. Celui-ci est arrivé avec son chandail orné du numéro 95. « L'école l'a retiré. Plus jamais personne ne le portera », dévoile Théo, avec fierté. PHOTO FOURNIE PAR LA FAMILLE Le numéro 95 de Théodore sera retiré au sein de l'école secondaire du Versant, à Gatineau. Aux coéquipiers avec lesquels il n'aura jamais pu évoluer, chez les Griffons, Théo adresse un message simple. « Allez gagner le Bol d'or pour moi. Je n'y serai pas, mais je sais que vous pourrez le faire », les encourage-t-il. Au milieu de ce drame affreux, Théo savoure une petite victoire. Plus de 65 000 $ ont été amassés en son nom, sur la plateforme de sociofinancement GoFundMe. Cette somme permettra à la famille d'obtenir l'équipement spécialisé nécessaire aux activités de Théo, en plus de couvrir les dépenses de la famille, relogée à Montréal pour la durée de sa rééducation. « Je n'en reviens pas de voir tout le soutien que j'ai, pas juste du GoFundMe, mais aussi des gens qui me contactent », s'émeut Théo. Vraiment, je ne pourrais pas demander plus. Théodore Côté Notre conversation tire à sa fin. Jamais Thédore n'aura montré le moindre signe de tristesse. De défaite. Au contraire, il se permet même de rire de sa mère, qui par moments, peine à garder l'objectif de la caméra vers son fils. « Mes parents me répètent chaque jour qu'ils ne comprennent pas comment je fais pour être aussi fort. J'ai un bon moral depuis l'accident, je ne laisse pas la négativité m'envahir. » Avant de raccrocher, Théo tient à livrer un dernier message. « On entend souvent dans les nouvelles que le monde est fini, est ruiné. Tout le soutien que j'ai, ça nous prouve le contraire. Il y a encore du beau dans ce monde. Je veux que les gens le sachent. »

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