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« Je suis resté calme »  : Jasper Philipsen, la force tranquille, Maillot Jaune du Tour après un début de saison moins clinquant
« Je suis resté calme »  : Jasper Philipsen, la force tranquille, Maillot Jaune du Tour après un début de saison moins clinquant

L'Équipe

time20 hours ago

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« Je suis resté calme » : Jasper Philipsen, la force tranquille, Maillot Jaune du Tour après un début de saison moins clinquant

Le Belge Jasper Philipsen, vainqueur samedi à Lille et premier Maillot Jaune du Tour, ne laisse rien au hasard pour atteindre ses objectifs. Celui-ci était inscrit depuis longtemps, quitte à s'asseoir sur un début de saison moins réussi qu'espéré. Il suffit de suivre le parcours de Jasper Philipsen depuis ses tout débuts pour comprendre le personnage. Né à Mol (Belgique) comme Tom Boonen, son idole qu'il a accompagnée à l'entraînement quelques fois lorsqu'il était jeune, il a ensuite connu la formation de son métier sous les ordres d'Axel Merckx dans l'équipe américaine Hagens Berman Axeon avant de rejoindre l'UAE, quasiment au même moment de l'éclosion de Tadej Pogacar, et donc de réaliser qu'il ne serait jamais une priorité dans cette structure des Émirats. Mauro Gianetti, le manager du Slovène, n'avait jamais vraiment essayé de le garder, prétextant que son sprinteur belge « cherchait une équipe plus modeste que la nôtre » alors qu'en fait, c'est surtout d'un espace vital qu'il avait le plus besoin. Son arrivée en 2021 auprès des frères Roodhooft chez Alpecin qui n'était pas encore en World Tour correspondait plus à son tempérament. « Je voulais avoir ma place et être reconnu comme un enfant de la famille », expliqua-t-il un jour pour justifier ce choix étrange de préférer les risques d'une petite structure plutôt que d'être un équipier avec un salaire (presque) de leader chez UAE. Le déroulement du final samedi et surtout la démonstration de puissance des équipiers de Mathieu Van der Poel au service de Philipsen (27 ans) dans les rues de Lille (ils étaient quatre autour de lui) pourraient servir de leçon aux sceptiques de cette époque pas si lointaine. « Ce qui s'est passé dans le dernier kilomètre aujourd'hui (samedi) est une expérience inouïe à vivre, avoua-t-il après l'arrivée. Vivre une victoire personnelle comme celle d'une équipe est très rare, je ne l'oublierai jamais. » Pour ça, il avait fallu aussi qu'il se blinde une personnalité auprès de Philip et Christoph Roodhooft qui avaient initialement monté leur équipe au service de leur leader de toujours Van der Poel qu'ils accompagnaient depuis déjà ses jeunes années en cyclo-cross. Il y avait surtout déjà un sprinteur dans l'équipe belge, un certain Tim Merlier récupéré presque par hasard en 2019 alors qu'il venait du cyclo-cross et qu'il brillait sur certaines kermesses flamandes. Les deux hommes aux caractères tellement différents, Merlier l'introverti et Philipsen l'expressif, d'abord complémentaires sont devenus rivaux. Le premier s'est vite retrouvé isolé alors que le second avait déjà noué des liens très forts avec l'omnipotent Van der Poel. Merlier fut ainsi prié d'oublier ses ambitions au sprint dès le lendemain de sa victoire au début du Tour de France 2021 à Pontivy (Morbihan), alors qu'il venait de battre ce même Philipsen. Si l'équipe tenta de noyer le poisson et de faire bonne figure devant les médias, la guerre entre les deux sprinteurs maison était déclarée et allait vite tourner à l'avantage de Philipsen qui avait obtenu de sa direction que Merlier se mette à son service. Seul aux commandes l'année suivante en 2022, il pouvait commencer sa vendange de victoires sur le Tour de France avec deux premiers succès dont le plus beau sur les Champs-Élysées royaume des sprinteurs. Il s'est alors inspiré de Wout Van Aert pour travailler son physique et sortir de l'ordinaire du pur sprinteur. Il a compensé son manque de puissance à l'époque par un sens du placement et une confiance totale en ses équipiers lors des sprints, dont Van der Poel qui a pris l'habitude ces dernières années de se muer en poisson-pilote pour son pote après avoir dominé la saison des classiques. Le Néerlandais s'était même assis sur ses ambitions dans le final de Milan-San Remo l'an passé, replaçant son sprinteur avant la Via Roma. En retour le Belge lui avait rendu la monnaie sur Paris-Roubaix trois semaines plus tard, « parce que notre esprit d'équipe est au-dessus de tout, avait-il alors expliqué, Mathieu m'a aidé à gagner à San Remo, c'est normal que j'en fasse de même à Roubaix. » « Si je n'ai pas été performant autant que je l'aurais souhaité depuis le début de la saison, je savais que ça n'aurait aucune influence sur le Tour. On a beaucoup travaillé sur ces premières étapes car on savait que ça serait très nerveux. » Jasper Philipsen, vainqueur la première étape Voilà donc comment l'équipe Alpecin-Deceuninck fonctionne en agençant ses pions avec une harmonie exemplaire. Si certains se demandaient encore avant le départ de ce Tour de France ce que venait faire dans l'édifice Philipsen-Van der Poel, l'Australien Kaden Groves néophyte sur la Grande Boucle, lui-même sprinteur mais confiné à briller seulement sur la Vuelta et sur le Giro (7 et 2 victoires depuis 2022), la réponse est tombée dès le premier jour. Lui aussi s'est fondu dans ce train intraitable des Alpecin mettant à mal les idées reçues sur l'égoïsme soi-disant exacerbé des purs sprinteurs. « Savoir qu'on fait partie d'un groupe pareil est reposant pour l'esprit », expliquait samedi Philipsen alors qu'on l'avait imaginé en manque de confiance avec seulement deux victoires cette saison, deux fois moins que les autres années avant le départ du Tour. « Je suis resté calme tout ce temps car on a appris à faire les choses sans se prendre la tête. Si je n'ai pas été performant autant que je l'aurais souhaité depuis le début de la saison, je savais que ça n'aurait aucune influence sur le Tour. On a beaucoup travaillé sur ces premières étapes car on savait que ça serait très nerveux. » Il ne faut pas beaucoup d'explications au Belge pour assimiler toutes ces données, car derrière l'instinct agressif du sprinteur se cache un personnage ultrasensible attaché à son environnement, sa principale source de confiance. Avec le jaune sur le dos dimanche au départ de Lauwin-Planque, c'est toute son histoire avec le Tour de France qui s'en trouve bouleversée, « une dixième victoire c'est magnifique mais avec ce maillot en plus, c'est un rêve que je n'osais pas faire. » À lire aussi Les choix forts des équipes décryptés Alaphilippe, toujours armé pour briller ? 400 000 coups de pédale, et quoi, et quoi, et quoi ? Forestier : «Si Pogacar attaque, c'est mort pour le château»

Préparateur mental, hypnothérapie, bluff... : comment les leaders du Tour se préparent à la guerre psychologique
Préparateur mental, hypnothérapie, bluff... : comment les leaders du Tour se préparent à la guerre psychologique

L'Équipe

time2 days ago

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Préparateur mental, hypnothérapie, bluff... : comment les leaders du Tour se préparent à la guerre psychologique

Tadej Pogacar a ostensiblement levé le pied en vue de la ligne d'arrivée à Valmeinier, terme de la 7e étape du Dauphiné. Il aurait pu facile en remettre, accroître l'écart ; il a préféré laisser Jonas Vingegaard revenir sur ses talons. Dans l'affaire, « Pogi » a sciemment dilapidé une vingtaine de secondes, avec la désinvolture d'un fils de famille aisée cramant ses jetons au casino, sans peur du lendemain. Quand le micro s'est tendu, le Slovène habillé pour l'été (maillot jaune, maillot vert, maillot à pois) a paisiblement déclaré, comme s'il était besoin de sous-titres : « J'ai pris le temps de récupérer dans le dernier kilomètre. » Le message (décryptable même par un écolier de CE2) s'adressait à son adversaire direct. « Je ne te crains pas du tout. Tu m'impressionnes si peu que je peux me permettre de finir tranquille. » L'extraverti « Pogi » À l'expiration, le numéro 1 mondial souffle le froid ou le chaud. La veille, dans la côte de Domancy, le leader d'UAE avait écrabouillé la concurrence. La distancer aurait amplement suffi. Un excès de zèle notoire, imputable au désir du Slovène de refermer un dossier douloureux, prendre une revanche à l'endroit précis où Vingegaard lui avait « tapé dessus » durant le chrono du Tour 2023 entre Passy et Combloux. Cette fois, c'était à Tadej de taper. Comme un sourd. Un avertissement avec beaucoup de frais. L'extraverti Pogacar ne donne pas dans le subliminal, ni la subtilité : au soir de Valmeinier, comme s'il n'avait pas assez transpiré, il s'est offert une insolite virée en rosalie, cette voiture à pédales. Pour le fun. Pour achever (essayer en tout cas) un Vingegaard pas si impressionnable, les yeux sur le compteur dans l'ultime ascension vers la station alpestre, uniquement concentré sur son sujet : grimper le plus vite possible, sans se faire exploser la caisse. La ligne franchie, le Danois ne s'est pas attardé : deux-trois gorgées de boisson énergétique, une décla sur le pouce pour dire qu'il s'était senti bien, et direction l'hôtel. Le lendemain, dans la descente précédant le Mont-Cenis, il s'est calé dans la roue de Pogacar, lui a filé le train. Façon de signifier sa présence : « Je suis toujours là. Ton petit cinéma ne m'atteint pas. » Il en a vu d'autres, Jonas. Vu et démontré : souvenez-vous de sa victoire au Lioran, 11e étape de la Grande Boucle 2024. L'insubmersible Jonas Un temps lâché sous les coups de boutoir de Pogacar, le pâlichon de Visma, convalescent après sa terrible chute au Tour du Pays Basque où il aurait pu laisser sa peau, n'avait pas baissé pavillon. Maintenu l'écart. Puis grignoté mètre par mètre pour revenir sur son adversaire décontenancé... et le coiffer au sprint. Plie sans rompre. Flotte, mais jamais ne sombre. C'est son style, à Jonas. Sur les routes d'Auvergne-Rhône-Alpes, les deux grands du peloton ont joué les scènes ordinaires de la guerre psychologique. L'avant-guerre en l'occurrence : le Dauphiné n'est qu'un prélude à la grande bataille de juillet. Et on ne part pas à la guerre sans munitions. Il est une arme méconnue : le psychisme. Un volet totalement délaissé jusqu'en 2014-2015, lorsqu'Yvon Madiot, chargé du pôle sport à la Française des Jeux, s'est enfin penché sur la question. « D'abord à titre personnel, car à un moment de ma vie, j'ai eu besoin d'aide. J'ai lu des bouquins, je me suis tourné vers un préparateur mental. Ça m'a fait énormément de bien, et j'ai voulu introduire cette notion dans l'équipe. Car ça ne sert à rien d'être à 120 % physiquement si tu perds tes moyens en course, face à une situation, ou un adversaire qui te déstabilise. » « Le coureur bien préparé mentalement va opter pour la bonne réaction à une situation donnée : mon adversaire est plus fort, qu'est-ce que je fais ? » Yvon Madiot, ex-directeur sportif de Groupama-FDJ Accueil hostile. « Trop de tabous. Les gars pensaient que ça ne servait à rien, qu'il suffisait juste de s'entraîner et basta, que celui qui voyait un psy était malade. Le premier intervenant a été rejeté par les coureurs. Il a fallu beaucoup de temps. Je citais en exemple le judoka Teddy Riner, le biathlète Martin Fourcade, des grands champions ouverts à la prépa mentale. Même le foot y venait. » À la clé : des résultats « fantastiques », aux dires du technicien rangé des vélos. « Le coureur bien préparé mentalement va opter pour la bonne réaction à une situation donnée : mon adversaire est plus fort, qu'est-ce que je fais ? Mon adversaire est moins bien, j'en profite ou je temporise ? » Dix ans après ces tâtonnements, presque toutes les formations du peloton ont intégré un spécialiste de la tête ; les rares qui n'ont pas encore de référent spécifique (c'est le cas notamment de TotalEnergies) corrigeront le tir dès 2026. Pas si étonnant : dans sa quête effrénée d'amélioration, le cyclisme a quasi exploré à fond tous les champs. Reste le cerveau, le continent à défricher. Siège des émotions, un muscle comme un autre selon Yvon Madiot « encore sous-exploité. Un muscle qui se travaille et s'entretient ». Et de citer l'exemple plusieurs fois constaté lors des débriefings de ce coursier terminant dans les choux, au-delà de la 50e place, alors même qu'il vient de battre tous ses records de puissance. « Dans ce cas, le problème ne peut être que mental... » Variante : un coureur se plaint à l'arrivée d'avoir souffert durant l'étape. Les données physiques stockées dans son capteur disent le contraire. L'athlète est resté en deçà de son maximum ; c'est du côté psy qu'il faut creuser. Un aspect pris donc très au sérieux par des formations occupées à étoffer leurs rangs. « Aujourd'hui, les pros sont connectés à leurs valeurs de puissance, mais l'ordinateur le plus puissant, c'est la tête » Yannick Navarro, hypnothérapeute Les titres et spécialisations varient : les organigrammes des écuries World Tour comptent des psychiatres, des préparateurs mentaux, des psychologues et même des hypnothérapeutes. « Pas Messmer, hein ! On travaille sur un état modifié de conscience. À la fin de la séance, le coureur se demande lui-même s'il a été hypnotisé », sourit Marie-Laure Brunet. La double médaillée olympique de biathlon opère en qualité « d'accompagnatrice mentale » pour Groupama-FDJ. L'hypnothérapie, c'est le domaine de Yannick Navarro. Recalé par Cofidis lorsqu'il a proposé ses services en 2018, l'« accompagnateur bien-être et performance » est désormais dans la place ; les coureurs du team nordiste le consultent le soir, allongés sur la table de massage, là où le soigneur a pétri les mollets - amusante analogie. « Très souvent, le cycliste dit : "Je me sens bien, j'ai de bonnes jambes." Il ne parle que de ses jambes. Ou du moteur. C'est quoi, le moteur ? Le coeur, les cannes, le système sanguin... ou le cerveau ? Aujourd'hui, les pros sont connectés à leurs valeurs de puissance, mais l'ordinateur le plus puissant, c'est la tête. Ton oeil a plus d'acuité que le meilleur des appareils photos. La solution se situe entre la selle et le casque. » Comment travaillent ces mécaniciens de l'esprit ? Tous ne sont pas enclins à témoigner ; certains rétropédalent après avoir donné leur accord - la prépa mentale garde ses petits secrets et grands mystères. Titulaire d'un « Executive Master accompagnement des acteurs de haut niveau », Brunet prodigue bien plus que la simple motivation : « Dire je veux gagner le Tour n'a jamais fait gagner personne. » Sa méthode repose sur la programmation neurolinguistique, « des questions plus que des outils. De quoi as-tu besoin pour créer le contexte favorable à une performance durable ? Si tu trouves toi-même la réponse, il y aura plus de résultats. » À l'instar de l'entraînement (les fondations), le gros du travail s'effectue durant la première partie de saison. La visée ? Offrir la « capacité à rester dans le match quand c'est dur. Car à ce niveau d'intensité et de douleur, c'est plus facile de lâcher. Ton petit démon intérieur te dit d'arrêter. » « Contrairement au rugby ou la boxe, le vélo implique une immense part de bluff » Axé sur l'écoute, « une carence dans le milieu », Yannick Navarro procède pour sa part à une « radiographie, un scan physique, mental, émotionnel, énergétique », pour rechercher en priorité l'apaisement. « Quand tu es militaire, tu n'es pas toujours en guerre. La guerre, c'est au cas où. J'oeuvre pour la paix. Car, si tu es en paix avec toi-même, tu supporteras la guerre. » Le terme ne le rebute pas : le cyclisme est par essence la discipline de la dualité, de la confrontation. « Contrairement au rugby ou la boxe, le vélo implique une immense part de bluff. On y voit des comportements, des attitudes, qui seraient considérés comme inacceptables dans la vie de tous les jours. » Navarro sait la violence de la course, l'immense part des regards, des postures, des petites intimidations, des phrases assassines, dans une victoire ou une défaite. Sur le Tour, la guerre des nerfs est le nerf de la guerre, et certains la font sans concession, même quand l'uniforme est le même, à l'image de Lance Armstrong versant dans le harcèlement envers son coéquipier Alberto Contador lors de l'édition 2009. Moins fort physiquement, l'Américain s'est employé à ébranler l'Espagnol, entre coups tordus et phrases assassines. Contador a tenu, il aurait pu s'effondrer. Le poids des mots Parfois, un mot, un geste détruisent plus sûrement qu'une attaque. Yannick Navarro se souvient d'un cycliste espagnol de renom. Lors des Championnats du monde 2019 à Harrogate, disputé sous une pluie glaciale, le garçon se sentait très bien malgré les conditions climatiques... jusqu'à ce qu'un adversaire lui glisse perfidement à l'oreille : « Tu n'as pas froid ? » Au tour suivant, le coureur abandonnait, en état d'hypothermie. Effet dévastateur de la guerre psychologique sur un mental défaillant. Tout le boulot consiste à « désamorcer avant que ça dégoupille, poursuit Navarro. Quand tu as désamorcé, le mec qui essaie de te déstabiliser car il pense que tu as un mental de chips peut venir te titiller. Ça se passera mieux. » Aspiré par l'environnement, le coureur a tendance à se déconnecter de lui-même, de l'importance de changer la perception. En situation d'oppression, Navarro incite ses « patients » à se recentrer. « Reprends ta place. Mets ton énergie à la dimension souhaitée. Tout part de toi. C'est d'une puissance... Quand la personne est consciente de ça, elle est capable de supplément d'âme. Si je suis arrogant avec toi, de qui cela dépend que tu te sentes rabaissé ou méprisé ? Juste de toi. L'autre, il essaie, il te teste. Comme le ferait un enfant. Et comment se sent celui qui intimide ? Sûr de lui, ou alors il est lui-même intimidé ? Quelle est l'énergie de tout cela ? » Quand Tadej Pogacar puise nonchalamment dans un paquet de bonbons avant de satisfaire aux obligations protocolaires du Tour, il cherche moins un apport calorique après l'effort qu'à provoquer ses petits camarades. Et pourquoi pas, s'il est bien dans ses pompes ? « Si tu es OK pour bouffer ton paquet de bonbons, tu vas le digérer », rigole Navarro. À manier avec précaution. Faire mal à l'autre peut se révéler destructeur. Brunet la biathlète l'a bien observé durant sa carrière sportive : « Celui qui veut tirer en premier se tire une balle dans le pied s'il n'est pas solide... » Juste avant le Giro 2019, un Simon Yates grisé avait déclaré à Cyclingnews : « Si j'étais à la place de mes rivaux, j'aurais peur. Je me chierais dessus. » « Tu as plusieurs façons d'aller au combat. Sabre au clair, ou plus tactique... » Demeuré impassible, Vincenzo Nibali avait attendu de signer un excellent contre-la-montre pour rétorquer posément : « Et maintenant, je vais aller aux toilettes, comme me l'a conseillé Simon Yates. » Un Yates esclave de ses paroles quand il aurait dû rester maître de son silence : le Britannique avait rapidement dévissé, pour terminer huitième au classement final ; les constipés ont ri sous cape. Lors du dernier Tour d'Italie, Isaac Del Toro a perdu sa partie de poker menteur contre un Richard Carapaz inflexible : « Tu ne veux pas rouler ? Moi non plus. » Del Toro a voulu faire craquer Carapaz, il s'est loupé et a bêtement perdu le Giro. « Ça s'appelle un apprentissage. On commet l'erreur une fois », sourit Marie-Laure Brunet. « Tu as plusieurs façons d'aller au combat, illustre Yvon Madiot. Sabre au clair, ou plus tactique. On fait aussi très bien la guerre en défense... » Bonaparte l'éruptif, ou Sun Tzu, le sage théoricien du conflit dans la Chine ancienne. Sur le Tour 2022, Jonas Vingegaard s'est joué du Maillot Jaune Pogacar dans le Galibier. Juste après Valloire, le Danois a fait démarrer son coéquipier Primoz Roglic. Certes costaud, Roglic ne constituait aucune menace pour Pogacar. Au lieu de laisser filer, le Slovène a mis un point d'honneur à aller chercher Roglic, grillant de précieuses cartouches, puis s'est placé en tête, imprimant un rythme très élevé, une débauche d'énergie insensée jusqu'au sommet. Bien calé dans la roue, Vingegaard jubilait, prêt à exécuter sa proie. On connaît la suite : dans l'ascension finale du Granon, le Maillot Jaune épuisé et égaré par son orgueil a essuyé une terrible défaillance, perdu trois minutes et le Tour. Friable de l'avis de beaucoup, Pogacar le démonstratif s'expose inutilement, flirte avec l'arrogance. Discutable, mais payant ; il en a peut-être besoin pour se dépasser. Chacun ses armes Le coup du Galibier, c'est le coup de maître de Vingegaard le discret, guéri de ses angoisses de début de carrière par un préparateur mental. Le jeune Jonas, sujet à l'anxiété, l'estomac noué au point de vomir son petit-déj avant ses courses, a bien changé. Et s'il lui arrive de fendre l'armure, comme lorsqu'il fond en larmes sous le coup de l'émotion après son succès au Lioran, cela n'en fait pas pour autant un être fragile. L'introverti joue sur le même théâtre d'opérations que Pogacar. Moins démonstratif, mais tout aussi efficace. Le bouclier pour parer les coups, le glaive pour riposter. Chacun ses armes, et le constat s'étend au personnel mobilisé : sur ce même Tour 2024, les UAE auront tendance à dévaler les cols à tombeau ouvert pour profiter de l'appréhension en descente de Vingegaard - le traumatisme du Pays Basque est encore tapi dans un coin de sa caboche. Les Visma tableront sur la chaleur (Pogacar goûte modérément les excès du mercure), la troisième semaine de course et l'impétuosité de l'adversaire, sa propension à disjoncter, ses pires ennemies. Rien d'étonnant à ce qu'au sein des équipes, la « team cerveau » s'immisce dans la stratégie de course, empiète sur les prérogatives de la direction sportive. Sans ingérence. « J'outille les DS en restant à ma place, expose Marie-Laure Brunet. Et confidentialité oblige, je ne partage évidemment que des informations validées par les coureurs. » Des coureurs toujours plus séduits, curieux et demandeurs. La préparation mentale reste facultative. Mais tous les garçons de Cofidis ont rencontré au moins une fois Yannick Navarro, et quinze éléments de Groupama-FDJ (près des deux tiers de l'effectif) bénéficient du suivi régulier de Marie-Laure Brunet - une séance d'une heure à une heure trente au moins toutes les trois semaines. Anquetil-Poulidor 1964, le paroxysme de l'ego Ils en sortiraient « rassurés », aux dires de Navarro, particulièrement satisfait d'avoir débloqué un sujet convaincu de ne jamais pouvoir dépasser les 390 watts lors d'un exercice. « Je lui ai suggéré d'arrêter de regarder son capteur. Il a atteint 420 watts. » Voilà un homme équipé pour trois semaines dont l'intensité culminera en montagne. Puisse-t-elle approcher la magnitude du duel Jacques Anquetil-Raymond Poulidor sur les flancs du puy de Dôme en 1964. Incontestablement LE sommet de la guerre psychologique sur le Tour de France. Deux hommes au coude-à-coude, refusant de concéder un pouce de terrain. Ils sont cuits l'un comme l'autre, Anquetil un peu plus sans doute, mais le Normand a l'intelligence et la lucidité de résister à la tentation de se mettre dans le sillage de son rival. Bien rester à côté de lui. L'amener à douter. Le déconcerter. Une histoire de tête. Yvon Madiot connaît ses classiques. « Là, on est totalement dans le mental, l'ego. » On ne saura jamais les ressorts intimes qui animaient les deux champions. Ce qui fait dire à Madiot : « Il aurait été passionnant qu'Anquetil et Poulidor débriefent avec un préparateur mental... »

Pogacar a-t-il déjà gagné le Tour de France 2025 avant même le départ?
Pogacar a-t-il déjà gagné le Tour de France 2025 avant même le départ?

24 Heures

time2 days ago

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Pogacar a-t-il déjà gagné le Tour de France 2025 avant même le départ?

Cette saison, les coureurs semblent résignés par l'écrasante domination de Tadej Pogacar, sous le joug physique et mental du Slovène. Décryptage avant le départ du Tour de France ce samedi. Publié aujourd'hui à 11h03 Tadej Pogacar est le grandissime favori du Tour de France. Certains de ses adversaires semblent battus d'avance face à ses attaques. AFP En bref: Sous ses airs juvéniles se cache un impitoyable bourreau, patron du peloton prêt à martyriser ses adversaires au Tour de France . À quelques heures du départ prévu samedi à Lille, le triple vainqueur Tadej Pogacar est un ogre prêt à dévorer les 3'320 kilomètres sur les routes françaises. À l'image de la saison du Slovène, maillot arc-en-ciel de champion du monde sur les épaules, qui n'a laissé que des miettes à ses adversaires. Trois courses seulement lui ont échappé: Milan San Remo (3e), Paris-Roubaix (2e) et l'Amstel Gold Race (2e). Face au monstre de l'UAE, le peloton semble résigné. Battu d'avance. Souffre-t-il d'un «syndrome Pogacar»? «Il y a clairement un peu de ça, j'ai l'impression que beaucoup de coureurs semblent déjà avoir accepté la défaite dès le départ, déplore Mauro Schmid, l'un des quatre Suisses alignés au TDF 2025 . Ils n'ont tout simplement pas la mentalité de gagner, comme s'ils avaient peur ou étaient intimidés par la puissance des watts de Pogacar ou le fait qu'il est si fort!» Quand Tadej Pogacar attaque, les autres sont cuits Le Zurichois, qui va découvrir le Tour, avait résisté à Tadej Pogacar lors de l'Amstel Gold Race, où le Slovène avait, comme souvent, porté une offensive à 43 kilomètres de l'arrivée pour se retrouver très vite seul en tête. «Nous étions dans le groupe des poursuivants avec Remco (ndlr: Evenepoel) et on avait Pogacar en ligne de mire, mais personne ne voulait collaborer, chacun préférant tenter sa chance en solitaire pour se contenter de la deuxième place derrière l'intouchable, peste le récent double champion de Suisse. Même en roulant à 80% de nos capacités, on serait facilement revenus sur lui à dix, mais si la moitié n'y croit pas c'est compliqué.» Rejoint par le Danois Mattias Skjelmose et le Belge Remco Evenepoel, le Slovène avait finalement dû se contenter de la deuxième place derrière le surprenant danois. Même scénario quelques jours plus tard sur Liège-Bastogne-Liège , avec une attaque irrésistible de «Pogi» dans la côte de la Redoute, à 34 km d'une arrivée en solo avec une minute d'avance. «Quand il a attaqué, comme souvent, ça s'est arrêté de rouler, beaucoup de coureurs me regardaient pour que j'aille le chercher et c'est dommage de courir avec cette mentalité, confiait Remco Evenepoel, en marge du Tour de Romandie. Moi, je ne roule pas pour une quatrième place…» Dans la meute, il y a aussi ceux qui ne peuvent tout simplement pas suivre le rythme infernal imposé par le patron. «Quand Pogacar attaque, la plupart des coureurs ont déjà atteint leurs limites, lui a encore ce petit truc en plus, donc on préfère parfois le laisser partir plutôt que d'exploser», souffle Stefan Bissegger, qui vise le «chrono» de Caen le 9 juillet. «Bien sûr, quand tu roules à fond dans son groupe, quelques mètres derrière lui, et que tu le vois disparaître si rapidement après son attaque, c'est frustrant, sourit Mauro Schmid. Mais Pogacar n'est pas imbattable, surtout sur des courses d'un jour. Il faudrait peut-être quelques défaites comme à l'Amstel pour que le reste du peloton commence à croire de nouveau à la victoire.» UAE Team Emirates: un budget colossal Selon le Zurichois, «l'extrême confiance en lui» permet au Slovène d'aborder la course «avec l'esprit de la gagne». Parfois proche de l'arrogance. «Il a aussi une équipe extrêmement forte», rappelle le Suisse. Le budget du mastodonte UAE Team Emirates dépasse les 60 millions , c'est quatre fois plus que certaines équipes présentes sur la Grande Boucle. «Les trois premières places sont prises par les plus gros budgets», résume Julien Jurdie, directeur sportif de la formation Decathlon-AG2R La Mondiale dans la dernière saison de la s érie Netflix consacrée au Tour . «Il est difficile de trouver la solution pour rivaliser avec un coureur comme Pogacar, cela devient une énorme frustration pour l'équipe performance, affirme Peter Leo, entraîneur du team Jayco Alula de Mauro Schmid, dans «Vélo Magazine». Nous voyons nos coureurs atteindre ou dépasser leurs records personnels, et ce n'est toujours pas suffisant pour rivaliser avec lui.» Seuls le Danois Jonas Vingegaard et son équipe Visma-Lease a Bike semblent déterminés à trouver le remède contre le «syndrome Tadej Pogacar». Depuis quatre ans, le duo se partage la conquête du prestigieux maillot jaune. Deux victoires chacun et un écart total de 1'25 (!) sur ces quatre dernières éditions. À qui le Tour? En lien avec le Tour de France Newsletter «Euro 2025» Vous ne voulez rien rater de l'Euro? En vous inscrivant à cette newsletter, vous serez informé·e à temps des performances de l'équipe de Suisse et des grands moments de cette compétition. Autres newsletters Sylvain Bolt est journaliste à la rubrique sportive de 24 Heures, de la Tribune de Genève et du Matin Dimanche depuis 2019. Il couvre en particulier le ski alpin et le freeride, mais aussi le cyclisme et l'athlétisme. Plus d'infos @SylvainBolt Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.

Tour de France 2025 : malgré les frictions et les insultes, Pogacar a « beaucoup de respect » pour Vingegaard
Tour de France 2025 : malgré les frictions et les insultes, Pogacar a « beaucoup de respect » pour Vingegaard

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time3 days ago

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Tour de France 2025 : malgré les frictions et les insultes, Pogacar a « beaucoup de respect » pour Vingegaard

Du « fuck you » au « respect ». Principal favori du Tour de France , Tadej Pogacar semble vouloir apaiser les choses avec Jonas Vingegaard, son grand rival, malgré quelques frictions « dans le feu de l'action » l'an dernier. « J'ai beaucoup de respect pour Jonas », a déclaré le Slovène jeudi à deux jours du départ de la 112e édition à Lille, lorsqu'il a été interrogé en conférence de presse sur un passage dans la saison trois de la série Netflix consacrée au Tour de France qui vient d'être mise en ligne. On l'y entend lancer un sonore « Fuck you » au Danois qui avait refusé de collaborer lors de leur échappée commune avec Remco Evenepoel pendant l'étape des chemins blancs en 2024. « Ce n'était pas très sympa mais dans le feu de l'action, on dit parfois des choses qu'on regrette après. Ça arrive tout le temps dans le peloton », a expliqué le champion du monde. « Il y a eu beaucoup de tension l'année dernière entre UAE et Visma (NDLR : leurs équipes respectives). Mais il y a beaucoup de respect entre nous. On donne tout sur le terrain mais après l'étape on se tape dans la main », a-t-il ajouté. Pogacar et Vingegaard ont remporté à eux deux les cinq dernières éditions du Tour, et le Slovène mène 3-2, s'étant imposé en 2020, 2021 et 2024, le Danois en 2022 et 2023. « Notre rivalité a été très intense et je m'attends à plus ou moins la même chose cette année. Il a l'air en bonne forme, ce sera sympa à suivre pour les gens devant leur télé et le long de la route, a insisté Pogacar. Jonas est un des meilleurs grimpeurs du monde sur les longues montées, voire le meilleur. Sur le chrono, il a parfois été meilleur que moi, parfois c'était moi. Il faut voir comment ça se passe cette année. J'espère répondre aux attentes. » Le Slovène, qui est âgé de 26 ans, se méfie de la première semaine qui sera « l'une des plus intenses et nerveuses de l'année où on peut facilement perdre le Tour » mais y voit aussi « des opportunités » pour déjà s'illustrer.

Tour de France : «Beaucoup de respect» pour Vingegaard, le passage à Montmartre... Pogacar s'exprime avant le grand départ
Tour de France : «Beaucoup de respect» pour Vingegaard, le passage à Montmartre... Pogacar s'exprime avant le grand départ

Le Figaro

time3 days ago

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Tour de France : «Beaucoup de respect» pour Vingegaard, le passage à Montmartre... Pogacar s'exprime avant le grand départ

Le tenant du titre de la Grande Boucle, Tadej Pogacar, a répondu aux questions des médias à 48 heures du départ de la 112e édition à Lille. Principal favori du Tour de France, Tadej Pogacar assure éprouver «un grand respect» pour Jonas Vingegaard, son grand rival, malgré quelques frictions «dans le feu de l'action» l'an dernier. «J'ai beaucoup de respect pour Jonas», a déclaré le Slovène jeudi à deux jours du départ de la 112e édition à Lille, lorsqu'il a été interrogé en conférence de presse sur un passage dans la saison trois de la série Netflix consacrée au Tour de France qui vient d'être mise en ligne. À découvrir Le classement du Tour de France 2024 On l'y entend lancer un sonore «Fuck you» au Danois qui avait refusé de collaborer lors de leur échappée commune avec Remco Evenepoel pendant l'étape des chemins blancs en 2024. «Ce n'était pas très sympa mais dans le feu de l'action, on dit parfois des choses qu'on regrette après. Ça arrive tout le temps dans le peloton», a expliqué le champion du monde. «Il y a eu beaucoup de tension l'année dernière entre UAE et Visma (leurs équipes respectives, NDLR). Mais il y a beaucoup de respect entre nous. On donne tout sur le terrain mais après l'étape on se tape dans la main», a-t-il ajouté. Publicité Pogacar et Vingegaard ont remporté à eux deux les cinq dernières éditions du Tour, et le Slovène mène 3-2, s'étant imposé en 2020, 2021 et 2024, le Danois en 2022 et 2023. «Notre rivalité a été très intense et je m'attends à plus ou moins la même chose cette année. Il a l'air en bonne forme, ce sera sympa à suivre pour les gens devant leur télé et le long de la route», a insisté Pogacar. «Jonas est un des meilleurs grimpeurs du monde sur les longues montées, voire le meilleur. Sur le chrono, il a parfois été meilleur que moi, parfois c'était moi. Il faut voir comment ça se passe cette année. J'espère répondre aux attentes.» «Depuis que j'ai arrêté de suivre les médias et que je suis moins sur les réseaux sociaux, ma vie s'est améliorée» Après sa victoire mi-juin au Critérium du Dauphiné, Pogacar a peaufiné sa forme en stage d'altitude à Isola 2000 avant de passer «quatre jours et demi à la maison». «C'était cool de retrouver une vie un peu plus normale avant que tout ce bazar ne commence», a-t-il souligné. La vie sous un microscope, il dit s'y être habitué. «Les gens ont leur avis, peu importe ce que vous dites ou ce que vous faites. On ne peut pas plaire à tout le monde et c'était difficile pour moi au début. Mais depuis que j'ai arrêté de suivre les médias et que je suis moins sur les réseaux sociaux, ma vie s'est améliorée», a-t-il dit. Le Slovène, qui est âgé de 26 ans, se méfie de la première semaine qui sera «l'une des plus intenses et nerveuses de l'année où on peut facilement perdre le Tour» mais y voit aussi «des opportunités» pour déjà s'illustrer. La butte Montmartre, «juste un peu plus de stress» L'incursion sur la butte Montmartre lors de la dernière étape du Tour de France offre «juste un peu plus de stress», a par ailleurs estimé jeudi Tadej Pogacar, moins critique que ses principaux rivaux. «Quand j'ai entendu que la dernière étape allait emprunter le parcours des Jeux olympiques, la première chose à laquelle j'ai pensé était que beaucoup de coureurs ne seraient pas contents. Moi personnellement je ne vois pas trop de différence, c'est juste un peu plus de stress», a dit le Slovène en conférence de presse Le champion du monde était la dernière star du cyclisme à ne pas s'être exprimé sur le sujet. Publicité Jonas Vingegaard, Remco Evenepoel et Wout Van Aert ont tous estimé que c'était «une mauvaise idée» de rajouter cette triple boucle dans Montmartre qui viendra épicer une dernière étape traditionnellement tranquille pour les principaux leaders. «Il fallait quand même rester concentré sur les Champs-Élysées, mais là il y aura encore plus de pression, ce sera comme une classique», a estimé Pogacar. «On peut estimer que les coureurs vont se respecter et ne pas y aller comme des malades, mais on ne sait pas. Le Tour peut aussi se décider sur cette dernière étape.»

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