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Le HuffPost France
3 days ago
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Loi Duplomb, énergies renouvelables, ZFE... Pourquoi l'écologie est toujours la victime idéale
POLITIQUE - Difficile aujourd'hui, à moins d'être un climatosceptique patenté, de nier les effets du réchauffement climatique. Incendies meurtriers sur le littoral médiaterranéen, nouvelle vague de canicule, sécheresse aiguë dans plusieurs départements... Le climat s'affole et les responsables politiques semblent ne pas prendre la mesure de la situation. La loi Duplomb, votée à l'Assemblée nationale le 8 juillet, est même accusée d'aller à contre-sens. Contestée par de nombreuses ONG, scientifiques et militants écologistes, elle prévoit la réintroduction de pesticides dangereux dans l'agriculture (dont l'acétamipride), participant à la fragilisation des sols et nuisant à la santé humaine. « Le vote de cette loi confirme ce que je dis depuis un an : un backlash écologique a lieu aujourd'hui en France, et il prend de l'ampleur mois après mois », constate auprès du HuffPost le doctorant et enseignant à Sciences Po Théodore Tallent. Le terme de « backlash » (« retour en bâton » en français) a été popularisé dans le monde anglosaxon pour caractériser une régression sur des droits précédemment acquis. Née dans les milieux féministes, l'expression s'est étendue bien au-delà. Selon le chercheur, ce phénomène a commencé « il y a quelques années avec des réglementations qui ont été arrêtées, repoussées ou affaiblies ». Mais la loi Duplomb franchit, à ses yeux, « une nouvelle étape ». « On voit un alignement du bloc central sur la droite et sur l'extrême droite pour revenir en arrière sur la protection de l'environnement », développe-t-il. « Chemin inverse» Dans leur grande majorité, les députés Renaissance, Horizons et MoDem n'ont pas hésité à voter en commun avec ceux siégeant sur les bancs LR ou RN. Un nouvel axe centre-droite-extrême droite qui met en danger l'écologie ? La ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher reconnaît que le texte de départ « n'allait pas du tout » mais se félicite qu'il ait été « réécrit entièrement » durant l'examen. « J'ai perdu sur l'acétamipride, mais les conditions de sa réintroduction sont extrêmement encadrées », défend-elle dans une interview au Monde. Ce n'est pas l'avis de Marine Tondelier, patronne du parti écolo, qui accuse le texte d'accéler « l'empoisonnement des enfants et la destruction de la biodiversité ». Le chercheur Théodore Tallent met, lui, l'accent sur le changement de braquet opéré par le camp présidentiel en quelques années. « Des pesticides interdits en 2018 sont réintroduits aujourd'hui par la même famille politique. Ce sont les mêmes qui font et qui défont », pointe-t-il, conscient, « malgré les alertes de beaucoup de scientifiques et d'activistes », qu'on est « en train de faire marche arrière ». Il détaille : « Si on commence à réintroduire des pesticides reconnus comme dangereux et cancérigènes supprimés sous le même Président de la République, on ne s'en sort plus. On devrait prendre le chemin inverse : il y a tant de nouveaux pesticides à interdire ». Une écologie reléguée ? En règle générale, quand un arbitrage politique doit être rendu, il y a très peu de chance pour que l'écologie soit gagnante. Le média Reporterre a signalé que le dernier budget, présenté à l'hiver par François Bayrou, affectait « durement » les politiques écologiques, « avec des crédits en baisse de 2,1 milliards d'euros entre 2024 et 2025 ». Face à la Défense, la Justice ou l'Intérieur, dont les budgets sont en hausse, c'est la transition écologique qui trinque. Et pas seulement à cause de l'arrivée de ministres LR dans le gouvernement, dont le très droitier Bruno Retailleau, qui plaidait dans une tribune au Figaro le 2 juillet pour l'arrêt des subventions publiques aux énergies renouvelables. Selon Théodore Tallent, une part de la réponse est à chercher du côté de la société. « En 2019, on parlait beaucoup d'environnement. C'était un sujet important qui était présent dans la tête des électeurs. Aujourd'hui, il a un peu disparu du débat, ce qui permet aux lobbys et aux acteurs économiques d'être davantage écoutés », explique le chercheur. De fait, le coût politique des députés à voter pour la loi Duplomb a été extrêmement faible. Combien d'électeurs auront ce vote en tête au moment de glisser un bulletin dans l'urne la prochaine fois ? L'enseignant à Sciences Po reconnaît un paradoxe : « La très grande majorité des gens n'est pas contente de la loi Duplomb, mais les députés pensent que ça ne va pas leur coûter très cher parce que ce n'est pas la priorité de leurs électeurs ». Reste une question : quel intérêt pour le camp présidentiel à s'être allié à la droite et à l'extrême droite, sur ce sujet, pour détricoter des avancées écologiques ? Le patron de Renaissance Gabriel Attal avait pourtant tapé du poing sur la table mi-juin, dénonçant « un axe anti-écologie » qui se formait selon lui à l'Assemblée. « Mon groupe parlementaire, EPR, est celui de l'écologie, et il le restera », fanfaronnait-il, alors que LR et RN venait de voter l'arrêt de tous les projets d'énergie renouvelable en France. Mais la loi Duplomb est passée par là, votée... par le même Gabriel Attal. « Rien ne validerait l'idée d'une stratégie électorale payante lorsque des centristes, censés être des libéraux, suivent le mouvement de la droite et de l'extrême droite », analyse Théodore Tallent, qui observe « un abandon de la question écologique » par la macronie ces derniers mois. Dans l'entre-deux-tours de l'élection présidentielle, Emmanuel Macron promettait néanmoins que le second mandat « serait écologique ou ne serait pas ». C'était il y a trois ans. Une éternité.


Le Figaro
4 days ago
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«Des bâtons dans les roues», du «mieux être» : chez les vignerons, la loi Duplomb entraîne des divisions
La loi Duplomb, adoptée ce 8 juillet, divise le monde agricole. Si certains vignerons y voient une chance de «mieux-être» grâce à des règles harmonisées avec l'Europe, d'autres craignent qu'elle favorise les grandes exploitations au détriment des petites. La voici enfin adoptée, cette loi. Celle qui se veut une réponse aux cris d'alarme des campagnes, aux colères des agriculteurs, à l'urgence du climat. La loi Duplomb promet de «lever les contraintes à l'exercice du métier d'agriculteur». Et pourtant, à mesure qu'on la lit, on découvre derrière cette promesse que se cache une série de mesures qui bouleversent discrètement les équilibres du monde agricole, y compris viticole. C'est ce 8 juillet 2025 que l'Assemblée nationale a définitivement adopté, par 316 voix pour, 223 contre et 25 abstentions, la proposition de loi Duplomb, portée par les sénateurs Laurent Duplomb (Les Républicains) et Franck Menonville (Union centriste). Un texte considéré comme «méprisant» par l'ensemble des écologistes, qui facilite l'utilisation de pesticides dangereux, la construction de mégabassines et l'élevage industriel. Publicité «Jouer à égalité avec nos voisins» Il y a pourtant, dans cette loi, quelque chose qui rassure. «Harmoniser avec l'Europe», répètent plusieurs fois différents vignerons. Harmoniser avec l'Espagne, l'Italie ou l'Allemagne sonne comme un soulagement pour eux. Dans ces pays, certains produits sont autorisés quand ils ne le sont pas en France, et en ce sens, la viticulture française se sent désavantagée. «Ce que nous cherchons avec la loi Duplomb, c'est une uniformisation des règles pour ne pas être pénalisés face à nos voisins européens», explique Jean-Marie Fabre, vigneron et président du syndicat des vignerons indépendants. «Nos voisins avaient des autorisations que l'on n'avait pas. Là, au moins, on joue à égalité», abonde Valérie Guérin, qui cultive ses vignes dans le Sud au domaine Les Mille Vignes. Certaines voix sont malgré tout dissonantes. Mikael Hyvert, vigneron en Auvergne et proche de la Confédération paysanne, redoute surtout que «ces réautorisations encouragent les fermes-usines». Pour lui, «on veut une paysannerie à échelle humaine, pas trois énormes exploitations par département». Il soupire : «On se met des normes pour protéger, puis on les retire. C'est dommage». «Pas tous logés à la même enseigne» À la lecture des témoignages de vignerons, la loi ne semble pas bénéficier à tout le monde de la même manière. «Il y a plusieurs sujets dans la proposition de loi Duplomb. Certains sont transversaux, d'autres très sectoriels. Les insecticides, c'est très sectoriel», souligne Jean-Marie Fabre. Valérie Guérin le confirme en précisant que «le sud, ce n'est un petit laboratoire à maladies. Ce n'est pas comme en Bourgogne ou à Bordeaux. Moi, je suis à cinq traitements par an, pas dix». Et puis il y a le sujet brûlant de l'eau. Jean-Marie Fabre raconte ses deux dernières années «plus sèches qu'un désert», avec 20 % de récolte en moins, des vignes au bord de la sécheresse. Alors quand il entend parler de mégabassines, ces vastes réserves qui captent l'eau pendant les périodes humides pour la restituer plus tard, il ne bondit pas au plafond. Il soupire presque. Parce que l'eau, pour lui, «c'est un enjeu central de la pérennité de son domaine». Valérie Guérin, dans sa petite propriété, est sur la même ligne en affirmant que «dans le Sud, il n'y a plus d'eau. S'il n'y a pas d'eau, qu'est-ce qu'on fait ? L'agriculture meurt. Donc oui, les mégabassines, si c'est pour redistribuer intelligemment, ce n'est pas une mauvaise solution». Alors, elle ne rejette pas en bloc la loi Duplomb, qu'elle juge capable d'apporter un «mieux-être» au monde agricole. Mais aussitôt, elle tempère, consciente «qu'il ne faut pas détruire l'environnement». Un modèle qu'on ne veut pas ? «Moi, je suis plutôt proche de la Confédération paysanne, donc forcément, cette loi ne va pas dans mon sens», confie Mikael Hyvert, vigneron en Auvergne. Selon lui, «cette loi, ce n'est pas qu'elle nous met des bâtons dans les roues directement, mais elle encourage petit à petit l'agrandissement des grosses exploitations. Et à force, les petites disparaissent». Il déplore que malgré tous les efforts pour «diversifier, élever, s'adapter», la petite paysannerie ait de plus en plus de mal à suivre. À lire aussi La face cachée du vin bio : ces zones d'ombre qui questionnent l'intégrité du label Publicité Mais pour les vignerons, cette loi ne se limite pas à la question des pesticides. «Ils sont descendus manifester surtout à cause de la surtransposition, des règles d'application différentes, de la suradministration, de l'impossibilité d'exercer leur métier sans surcharge», explique Jean-Marie Fabre pour éclairer les raisons de la mobilisation du monde viticole.


Le Figaro
08-07-2025
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Environnement : le Parlement adopte la loi Duplomb et enchaîne avec le texte Gremillet
Dans une semaine marathon aux allures de sprint final, les députés et les sénateurs se sont penchés mardi sur les questions agricoles et énergétiques. Une fin de session parlementaire aux allures de sprint final. Ce mardi après-midi, deux textes de loi qui ont chacun fait couler beaucoup d'encre étaient débattus au Parlement. Le premier, proposé par le sénateur Laurent Duplomb, vise à «lever les contraintes» des agriculteurs. Il a été adopté dans sa version définitive à l'Assemblée nationale en fin d'après-midi, par 316 voix contre 223. Le second, initiative du sénateur Daniel Gremillet, porte sur la programmation nationale et la simplification normative dans le secteur économique de l'énergie. Il devait normalement être adopté en seconde lecture au Sénat dans la nuit. Les deux propositions de loi, à forts enjeux, avaient connu un parcours pour le moins mouvementé au Parlement ces dernières semaines. À lire aussi Mode de scrutin, audiovisuel public, agriculture: au Parlement, une dernière semaine aux allures de sprint final avant les vacances La loi Duplomb, très décriée par ses détracteurs pour ses «reculs environnementaux», ouvre notamment la voie à la réintroduction dérogatoire de plusieurs insecticides pourtant interdits depuis quelques années, comme l'acétamipride, un produit de la famille des néonicotinoïdes. Le texte révise également le fonctionnement de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation (Anses) sur l'évaluation des produits phytosanitaires. Un scénario improbable avait eu lieu lors de sa première lecture au Palais Bourbon : la loi avait subi une tentative de blocage par la gauche, qui avait déposé des centaines d'amendements, ce qui avait poussé le rapporteur LR, Julien Dive, à riposter en faisant adopter une motion de rejet sur son propre texte, afin d'accélérer la navette parlementaire. À lire aussi Qu'est-ce que la motion de rejet, nouvelle arme préférée des députés à l'Assemblée Publicité En commission mixte paritaire, députés et sénateurs ont finalement trouvé un accord et la loi a pu être largement votée au Sénat dans la foulée. Ce mardi à l'Assemblée, avant sa nette adoption grâce aux voix du RN, de la droite LR et d'une partie des bancs macronistes, la gauche s'est émue d'un «traité de soumission à l'agrochimie», dixit l'Insoumise Aurélie Trouvé. «Les droites et l'extrême droite ont acté la réintroduction de l'acétamipride sans débat», a de son côté regretté la socialiste Mélanie Thomin. «Ceux qui voteront pour la loi Duplomb voteront pour le cancer», a carrément tempêté l'écologiste Benoît Biteau. «Cette loi ne constitue pas un recul environnemental. Sur les huit articles du texte final, sept ont été travaillés avec les parlementaires et avec le ministère chargé de la Transition écologique pour trouver une position équilibrée. C'est la preuve que ce texte est raisonnable», a défendu la ministre LR de l'Agriculture, Annie Genevard. Pendant ce temps, au Palais du Luxembourg, les sénateurs examinaient en seconde lecture de la loi Gremillet. Des débats capitaux en vue de la publication à venir, par le gouvernement, du décret sur la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), censé définir les priorités d'action des pouvoirs publics pour la gestion des formes d'énergie sur le territoire ces prochaines années. Au Palais Bourbon, les discussions avaient été chaotiques. Les députés LR et RN, en surnombre, étaient parvenus, contre la gauche et les macronistes, à modifier de très nombreux points du texte, instituant notamment un moratoire sur le développement des énergies photovoltaïques et solaires. Ils avaient également réussi à faire adopter des amendements visant à remettre en place les tarifs régulés du gaz, à supprimer les objectifs de développement des biocarburants, ou encore à relancer la centrale nucléaire de Fessenheim. Le texte avait finalement été retoqué à l'Assemblée nationale par les macronistes et la gauche et avec l'abstention surprise des LR, qui ne se retrouvaient pas dans toutes les amendements adoptés au cours des débats. En dépit des discussions sur la fin du financement public des énergies renouvelables - notamment réclamée par Bruno Retailleau, en sa double qualité de ministre de l'Intérieur et patron des Républicains, dans une tribune cosignée au Figaro -, les sénateurs n'ont pas remis à l'ordre du jour l'idée de «moratoire» sur le photovoltaïque et le solaire. «Cela aurait été déclaré irrecevable, au même titre que la réouverture de Fessenheim, car en seconde lecture, le débat est restreint aux amendements déjà adoptés lors de la première lecture», décrypte le rapporteur du texte, Patrick Chauvet (Union Centriste). La proposition de loi, «plus resserrée», dixit le même sénateur, misait - avant la fin de son examen au Sénat et sous réserve qu'aucun amendement contradictoire ne soit adopté - d'une part sur la relance massive du nucléaire, avec notamment la construction de 14 nouveaux réacteurs, et d'autre part sur l'essor des énergies renouvelables, avec l'objectif de porter, d'ici à 2030, à au moins 58% la part d'énergie décarbonée de la consommation d'énergie en France (contre environ 40% actuellement). Un sujet qui devrait revenir sur le bureau de l'Assemblée nationale dès la rentrée parlementaire et la probable session extraordinaire qui devrait être convoquée en septembre.