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«Le Conseil constitutionnel préfère protéger la liberté d'étrangers dangereux à celle de citoyens innocents»
FIGAROVOX/TRIBUNE - Les décisions rendues jeudi dernier sur la loi Duplomb et sur la rétention administrative des étrangers dangereux montrent que les membres du Conseil constitutionnel sont déconnectés du réel, regrette l'avocat Jean-Philippe Delsol. Jean-Philippe Delsol est avocat, président de l'Institut de Recherches Économiques et Fiscales et essayiste. Son dernier ouvrage paru est Libéral ou conservateur ? pourquoi pas les deux ? (Manitoba/Les Belles Lettres, 2024). À découvrir PODCAST - Écoutez le club Le Club Le Figaro Idées avec Eugénie Bastié Deux décisions du Conseil constitutionnel en date du 7 août 2025 relancent la question des limites des pouvoirs des membres du Conseil constitutionnel par rapport à ceux des représentants du peuple. Un système jurisprudentiel, du type de celui de la common law, dans lequel la décision des juges forge peu à peu le droit à partir de lois de principe, peut apparaître plus juste et efficace pour traiter des cas individuels que notre système de droit civil qui voudrait que la loi, générale par définition, prévoie tous les cas de figure et s'impose à l'esprit des juges. Mais il en va sans doute autrement du rôle des juges constitutionnels comme de ceux du Conseil d'État quand ils s'arrogent le droit de remettre en cause les lois de manière politique, voire idéologique. Publicité Un article de la loi Duplomb, adoptée le 9 juillet dernier, permettait, sous certaines conditions, de déroger par décret à l'interdiction d'utiliser des produits phytopharmaceutiques contenant des néonicotinoïdes ou autres substances assimilées, ainsi que des semences traitées avec ces produits. La ré-autorisation provisoire de cet insecticide devait permettre aux exploitants, notamment aux betteraviers, d'avoir le temps de trouver des substituts pour protéger leurs plantations. Mais par une décision (n° 2025-891 DC) du 7 août 2025, le Conseil constitutionnel a considéré que «le législateur, en permettant de déroger dans de telles conditions à l'interdiction des produits phytopharmaceutiques contenant des néonicotinoïdes ou autres substances assimilées, a privé de garanties légales le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé garanti par l'article 1er de la Charte de l'environnement ». Les parlementaires français qui ont voté, en Congrès, cette loi du 1er mars 2005 constitutionnalisant le principe de précaution sont les premiers coupables de sottise et de démagogie En effet, la Charte de l'environnement, intégrée dans la loi constitutionnelle n° 2005-205 du 1er mars 2005 «proclame» que «chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé». Cette sentence vague et générale devait-elle néanmoins habiliter le juge constitutionnel à annuler le vote parlementaire alors que le produit en cause, l'acétamipride, reste autorisé au sein de l'Union européenne jusqu'en 2033 ? Il est possible que cet insecticide ait de mauvais effets sur l'environnement et peut-être sur la santé humaine, mais peut-être moins qu'il ne procure d'avantages pour améliorer la production et réduire le coût du sucre par exemple. Le progrès consiste à retenir les solutions dont la balance inconvénients/avantages est positive. Certes, les parlementaires français qui ont voté, en Congrès, cette loi du 1er mars 2005 constitutionnalisant le principe de précaution sont les premiers coupables de sottise et de démagogie. Les parlementaires d'aujourd'hui en pâtissent. Mais le Conseil constitutionnel lui-même ne se devait-il pas d'appliquer et interpréter le texte avec précaution, intelligence et discernement ? Ce qu'il n'a pas fait. Il ne l'a pas plus fait dans sa décision, rendue également le 7 août 2025 (n° 2025-895 DC), par laquelle il a censuré plusieurs dispositions de la loi visant à étendre les cas dans lesquels la durée maximale de la rétention administrative des étrangers en situation irrégulière et condamnés pour des faits particulièrement graves puisse être portée à cent quatre-vingts jours voire, dans certains cas, deux cent dix jours, ainsi qu'à instituer de nouveaux cas dans lesquels l'appel contre une décision mettant fin à la rétention administrative d'un étranger est suspensif et l'intéressé maintenu à la disposition de la justice jusqu'à ce qu'il soit statué sur le fond. À lire aussi Loi Duplomb : «Avec la Charte de l'environnement, le législateur d'aujourd'hui est piégé par celui d'hier» Tout en reconnaissant qu'«en adoptant ces dispositions, le législateur a poursuivi l'objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l'ordre public et l'objectif de lutte contre l'immigration irrégulière, qui participe de cet objectif», le Conseil constitutionnel a annulé ces dispositifs. Il a argué notamment que la période de rétention prévue était trop longue pour des crimes ou délits qui pouvaient ne pas représenter une particulière gravité. Il aurait fallu selon lui attendre que les individus concernés par ces mesures constituent une menace actuelle et d'une particulière gravité pour l'ordre public pour leur appliquer de telles mesures. Il aurait fallu, en quelque sorte, que ces gens commettent d'abord l'irréparable, comme le meurtre en septembre 2024 de la jeune Philippine. Publicité Comme l'a fait remarquer Bruno Retailleau, l'attitude du Conseil constitutionnel est d'autant plus insensée que déjà la «Directive européenne 'Retour' autorise une durée de 6 mois dans tous les cas, pouvant être prolongée de 12 mois supplémentaires en l'absence de perspective d'éloignement immédiat». «Je rappelle, a-t-il ajouté, que 14 pays, dont l'Allemagne et la Belgique, appliquent ce délai de rétention de 18 mois. Absolument rien dans le droit européen ne s'oppose à cette durée. Mieux encore : le nouveau Règlement européen 'Retour', en cours de négociation, prévoit de porter à 24 mois la durée de droit commun, et sans limitation pour les étrangers en situation irrégulière qui présentent une menace pour la sécurité publique». Les membres du Conseil constitutionnel démontrent une fois de plus qu'ils sont totalement déconnectés du réel. Surpayés en contravention à la constitution elle-même, ils méconnaissent la vraie vie Mais Emmanuel Macron n'a vu que son intérêt personnel à pouvoir promulguer la loi ainsi amputée pour faire du tort à son opposition de droite. Peut-être avait-il manigancé l'affaire avec le président du Conseil constitutionnel qu'il n'a choisi ni pour ses diplômes de droit, ni pour ses compétences ou son expérience constitutionnelle, puisqu'il n'en a guère, mais éventuellement pour sa seule habileté politicienne. Les membres du Conseil constitutionnel démontrent une fois de plus qu'ils sont totalement déconnectés du réel. En considérant que «les dispositions contestées portent une atteinte excessive à la liberté individuelle», ils préfèrent protéger la liberté d'individus qui sont ou restent illégalement sur notre sol et auteurs de crimes ou délits graves à celle des citoyens honnêtes et innocents dont le rôle de l'État est d'assurer la sécurité. Il y a là, de leur part, une erreur manifeste d'appréciation. Certes, le Conseil constitutionnel appuie ses décisions sur des textes ayant valeur constitutionnelle (de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 au préambule de la constitution de 1946), mais il serait peut-être temps de toiletter certains textes et de recadrer les pouvoirs du Conseil constitutionnel dont le premier devoir est de s'assurer du respect de notre démocratie où chacun doit pouvoir vivre en paix, ce que trop d'immigrés agissant en violation de nos lois ne permettent plus. À cette occasion, il devrait être rappelé que le juge n'est pas législateur et ne saurait s'y substituer sans lui-même commettre une atteinte à la démocratie.


Le HuffPost France
4 days ago
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Retailleau n'a (vraiment) pas digéré la décision du Conseil constitutionnel sur la rétention et persiste
POLITIQUE - Bruno Retailleau en a gros sur le coeur à propos du Conseil constitutionnel. Outre la décision de censurer l'article phare de la loi Duplomb, que son parti Les Républicains soutenait, le ministre de l'Intérieur s'est également vu infliger un camouflet par les Sages sur l'allongement de la durée maximale d'enfermement en centre de rétention administrative. Un désaveu qu'il n'entend pas laisser passer. Dans un communiqué diffusé en début d'après midi ce vendredi, le ministre de l'Intérieur dit avoir pris connaissance de la décision du Conseil constitutionnel « avec une extrême préoccupation ». Les Sages ont estimé que le texte, porté par une sénatrice LR, pour allonger de 90 à 210 la durée maximale en CRA des étrangers condamnés pour des faits graves ou présentant un risque majeur pour l'ordre public était contraire à la Constitution et au principe qui veut que « nul ne peut être arbitrairement détenu ». Le coup est rude pour Bruno Retailleau qui se vante de porter, depuis son arrivée à Beauvau, une ligne de fermeté absolue. Et qui n'entend pas en changer. En dépit de cette première censure, le ministre a annoncé s'atteler à la préparation d'un texte « modifié » qu'il va « préparer en demandant son avis au Conseil d'État. » « Je présenterai cette nouvelle version au plus tôt devant le Parlement », indique-t-il. Retailleau s'en prend au Conseil constitutionnel Entre autres arguments, Bruno Retailleau s'appuie sur la législation européenne qui « autorise une durée de 6 mois dans tous les cas, pouvant être prolongée de 12 mois supplémentaires en l'absence de perspective d'éloignement immédiat. » « Notre arsenal juridique décroche désormais complètement du droit européen », s'émeut le ministre. La directive citée par Bruno Retailleau autorise limite bien la durée de rétention administrative à 18 mois. Mais, comme le précise le site Toute l'Europe, cette règle votée en 2008 avait avant tout vocation à imposer une durée maximale aux pays qui n'en avaient pas jusqu'alors. Les États qui prévoyaient déjà des durées plus courtes, dont la France, n'avaient pas d'obligation de s'aligner. Néanmoins, et comme le souligne le ministre, des discussions sont en cours pour la rétention puisse être « être prolongée au-delà des 24 mois normaux sur décision d'un juge » pour les personnes représentant un risque pour la sécurité. En parallèle et demi-mots, Bruno Retailleau en a profité pour régler ses comptes avec le Conseil constitutionnel, accusé d'« entraîner le désarmement de l'État » au nom de « la balance des droits et libertés. » Le texte retoqué est « un texte de bon sens. C'est un texte efficace. Augmenter la durée de rétention pour les étrangers dangereux, c'est augmenter les possibilités de les éloigner. Éloigner ces individus dangereux, c'est empêcher qu'ils menacent notre sécurité », écrit-il. Et le patron des Républicains de revenir à un cheval de bataille de son camp en réclamant que ce soit « au peuple souverain (...) de se prononcer sur les questions essentielles de la sécurité et de l'immigration, par référendum. Le moment venu. » Dixit le ministre ou le président de parti ?