
Budget 2026 : ce que coûterait une « année blanche » aux Français
Ces dernières semaines, une piste évoquée avec insistance est celle d'une possible « année blanche » : une opération qui vise à reconduire à l'identique certaines dépenses de l'Etat, sans tenir compte de l'inflation. L'économiste Pierre Madec, de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), a cherché à évaluer les effets d'une telle mesure pour les ménages.
Un effort de 6,2 milliards pour les ménages
Pour réaliser son étude, l'expert a fait l'hypothèse que le gouvernement gèlerait pour un an les retraites, les prestations sociales et le barème de l'impôt sur le revenu. Il s'est appuyé sur les données de revenus de 2023 et a retenu une prévision d'inflation de 1,1 % en 2025 (et 1,3 % entre février 2025 et janvier 2026).
Au total, une année blanche représenterait un effort d'environ 6,2 milliards d'euros pour les ménages français, selon Pierre Madec : 5 milliards d'euros seraient liés au gel de l'ensemble des prestations sociales et 1,2 milliard en raison du gel du barème de l'impôt sur le revenu (IR).
Le dossier est explosif sur le plan politique. Alors que les ministres de Bercy poursuivent leurs consultations politiques sur le budget, l'idée d'une année blanche est fustigée à La France insoumise comme au Rassemblement national. Même chez Les Républicains, pourtant membres du gouvernement de François Bayrou, la mesure laisse sceptique. Le chef de file des députés LR, Laurent Wauquiez, a indiqué qu'il y voyait « un terme pudique pour dire année rouge fiscale ».
Les retraités, les premiers perdants
La question est d'autant plus sensible que les retraités seraient les premiers perdants : entre la non-indexation de leur pension et le gel du barème de l'IR, leur contribution atteindrait 3,7 milliards d'euros, selon les calculs de l'OFCE. L'économie budgétaire liée au gel des prestations sociales est, quant à elle, évaluée à 800 millions, tandis que celle réalisée sur les allocations-chômage serait de 400 millions.
L'étude montre qu'en 2026, les quelque 10 millions de ménages français comptant un ou plusieurs retraités subiraient une amputation de leur revenu disponible de 350 euros par ménage (de 280 euros par unité de consommation, UC). Cela induirait une baisse de 1 % de leur revenu disponible par rapport à une situation « hors gel ».
Sous l'effet du gel du barème de l'impôt sur le revenu et de l'absence de revalorisation des prestations sociales, les 15 millions de ménages dont la personne de référence est salariée seraient également perdants, mais le manque à gagner serait beaucoup moins élevé : de l'ordre de 105 euros sur l'année. Les indépendants seraient moins bien lotis et perdraient 165 euros en moyenne. Enfin, pour 1,3 million de ménages dont la personne de référence est au chômage, la réduction du revenu attendue serait estimée à 180 euros par rapport à une situation « hors gel ».
Sans surprise, l'étude montre que l'impact d'une potentielle « année blanche » serait le plus fort sur les plus aisés. Pour l'expert de l'OFCE, les 5 % de ménages les plus favorisés verraient leur revenu disponible diminuer de 260 euros par UC sur l'année, du fait de pensions plus élevées et de la forte concentration de l'impôt sur le revenu. Pour ceux du bas de la distribution la perte atteindrait 100 euros en moyenne.
Les plus modestes très touchés
Néanmoins, « en pourcentage du niveau de vie, ce sont bien les ménages les plus modestes qui verraient leur revenu le plus réduit par une « année blanche » ». Les 5 % des ménages les plus modestes perdraient ainsi près de 1 % de revenu disponible par rapport à une situation où leurs allocations auraient été indexées. Tandis que pour les plus favorisés, l'impact serait inférieur à 0,3 %.
« Dans les arbitrages politiques, il pourrait y avoir des mesures d'ajustements pour préserver les petites retraites et les plus modestes », relève Pierre Madec. Selon ses calculs, exonérer de l'année blanche les 10 % les plus pauvres ne coûterait que 100 à 150 millions d'euros.
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