
Relancer la filière du nickel en Nouvelle-Calédonie, l'enjeu majeur de l'accord «historique» signé ce samedi
C'est une richesse inestimable autant qu'un poids lourd à porter. «Ressource stratégique pour le territoire et pour la souveraineté industrielle française et européenne», le nickel - minerai indispensable à la fabrication de batteries rechargeables mais très volatil sur le London Metal Exchange - est une denrée rare dans le monde, devenue un sujet de vives tensions en Nouvelle-Calédonie. Pourtant détenteur de 20 à 30% des réserves mondiales d'«or vert», l'archipel en est le quatrième producteur mondial, derrière l'Indonésie, les Philippines et la Russie. Rien d'étonnant donc à ce que cette matière première soit au cœur de l'«accord historique» signé ce samedi 12 juillet en vue de la création d'un «État de Nouvelle-Calédonie» au sein de la République et l'instauration d'une nouvelle nationalité calédonienne.
Un plan dédié fait même partie du programme. De quoi relancer l'activité de transformation du nickel en province Nord «dans l'objectif d'équilibre du territoire et dans le cadre d'un projet industriel fondé sur la capacité technique et le financement de ses actionnaires». Le texte prévoit aussi de faciliter l'export de minerai dans le cadre d'une «doctrine renouvelée», avec le projet que le nickel calédonien reste «prioritairement transformé dans les usines présentes sur le territoire ou dans l'usine calédonienne offshore». Il mentionne par ailleurs un «accompagnement technique et financier de l'État» ainsi que «la transformation du système énergétique nécessaire à la filière nickel, avec l'objectif d'assurer une meilleure autonomie énergétique et de garantir la continuité de l'approvisionnement».
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Dans le cadre de cet accord toujours, l'État s'est également engagé, en particulier auprès de l'Union européenne, à «intégrer l'approvisionnement en nickel calédonien dans le cadre de la stratégie de souveraineté en matières premières critiques». De quoi permettre une «diversification des débouchés» pour la filière calédonienne. Et l'enjeu est d'autant plus fort que le nickel représente la première ressource économique du territoire et contribue à une part importante du PIB de la Nouvelle-Calédonie. Ce secteur assure en effet un quart des emplois directs et indirects de l'archipel : dans les mines, les usines métallurgiques, les transports, et les services associés. Le minerai est aussi crucial pour l'aval de la chaîne industrielle, puisqu'il entre dans la composition de l'acier inoxydable et des batteries automobiles.
Relancer la compétitivité pour répondre à la forte demande
Or, «la filière mondiale du nickel est aujourd'hui paradoxalement extrêmement fragile» bien que «considéré comme l'un des métaux de la transition énergétique à l'instar du cuivre et du lithium», explique Emmanuel Hache, directeur de recherche à l'IRIS (Institut de relations internationales et stratégiques). Ce spécialiste des questions relatives à la prospective énergétique et à l'économie des ressources naturelles (énergie et métaux) affirmait notamment l'an passé que le nickel - principalement utilisé dans les alliages et l'acier inoxydables - allait ces prochaines années prendre une place de plus en plus importante dans le secteur des technologies bas-carbone et notamment les batteries. Avec un risque de tensions sur son approvisionnement. «À l'horizon 2040, on estime que les besoins pourraient augmenter de 75 % passant de 3,6 millions de tonnes aujourd'hui à plus de 6,2 millions de tonnes», pointait l'expert.
Dans ce contexte, sa production n'est, en Nouvelle-Calédonie, pas à la hauteur des attentes. Alors que l'archipel «pourrait jouer un rôle important pour la sécurisation des approvisionnements de l'UE», la filière n'a malheureusement «pas démontré sa viabilité économique», tranchent les rédacteurs d'un rapport sur le sujet, réalisé par l'Inspection générale des finances en juillet 2023 à la demande d'Élisabeth Borne, alors première ministre. En visite dans l'archipel, Emmanuel Macron avait - à cette même époque - souhaité «bouger la 'doctrine nickel'». «La réalité, cruelle, c'est qu'aujourd'hui, la Nouvelle-Calédonie ne peut pas être compétitive parce qu'elle produit du nickel qui est beaucoup plus cher que celui de l'Indonésie ou d'autres», avait-il avancé, refusant d'investir dans ce secteur «pour financer des modèles improductifs».
Relancer la compétitivité de la filière calédonienne de nickel est donc un véritable enjeu d'avenir, et répondre à la forte demande de cette matière première pourrait véritablement servir de tremplin économique pour l'archipel. Pour la première fois depuis longtemps, cet accord donne donc de l'espoir à tous les acteurs concernés. À commencer par la relance d'une activité de transformation du nickel en province Nord, majoritairement peuplée de Kanak, où l'usine a fermé l'an passé, mettant 1300 salariés au chômage. Déjà en 2016, le directeur de la Maison de la Nouvelle-Calédonie Joël Viratelle estimait que le nickel était «la clé du 'rééquilibrage' et du partage des richesses issus des accords de Matignon puis de Nouméa». «Il porte en lui les précieux ferments du destin commun», écrivait-il. Reste à savoir si l'avenir lui donnera raison.
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