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Contamination aux polluants éternels en France : ce que révèle la carte publiée par le gouvernement

Contamination aux polluants éternels en France : ce que révèle la carte publiée par le gouvernement

Le Figaro3 days ago
Selon une carte publiée par le ministère de la Transition écologique, au moins 244 communes sont concernées par des niveaux excessifs de PFAS, dont 16 directement dans l'eau potable.
Des analyses portant sur la présence des PFAS ou «polluants éternels», dans l'eau sur l'ensemble du territoire français sont désormais librement consultables sur une carte en ligne mise à disposition jeudi 31 juillet par le ministère de la Transition écologique. «En totale transparence, cette publication en open data est un geste inédit en France et en Europe», a indiqué le ministère dans un communiqué de presse.
La carte permet notamment d'accéder à des données de surveillance sur la quantité de PFAS présente dans les eaux souterraines, de surface ou distribuées au robinet, ainsi que dans les sites industriels, qui représentent au total plus de 2,3 millions d'analyses. Cette publication fait suite à un plan d'action interministériel sur les PFAS annoncé par le gouvernement en avril 2024.
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Molécules délétères pour la santé humaine
Les PFAS, pour substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées, sont des molécules issues de l'industrie chimique, utilisées depuis le milieu du XXe siècle pour leurs propriétés antiadhésives, imperméabilisantes ou résistantes aux fortes chaleurs. Elles ont été progressivement intégrées dans de multiples biens de consommation du quotidien, comme les poêles, de nombreux vêtements ou les produits de maquillage, par exemple certains rouges à lèvres. Mais ces substances représentent une pollution majeure car elles sont extrêmement persistantes dans l'environnement, raison pour laquelle elles sont nommées «polluants éternels».
En outre, elles peuvent avoir des effets très néfastes sur la santé humaine : augmentation du taux de cholestérol, lésions au foie, cancers du rein et des testicules, maladies thyroïdiennes, effets sur la fertilité et le développement du fœtus. Leur présence conduit parfois à interdire la consommation d'eau du robinet, comme dans 16 communes de la Meuse et des Ardennes après la détection de taux anormalement élevés début juillet.
Les données de la carte publiée par le ministère de la Transition écologique jeudi soir sont synthétisées dans l'infographie ci-dessus réalisée par Le Figaro.
L'outil de visualisation du ministère met en œuvre et anticipe une directive européenne de 2020 portant entre autres sur le contrôle des PFAS pour assurer «la qualité des eaux destinées à la consommation humaine», obligatoire dans tous les pays de l'UE à partir de janvier 2026. Cette directive fixe une liste de 20 PFAS devant faire l'objet d'une surveillance par les États membres. Le texte impose une valeur maximale de 0,1 microgramme par litre pour la somme des 20 PFAS en question, notamment dans les eaux directement destinées à la consommation. Celles-ci sont définies par l'article 2 comme «toutes les eaux, soit en l'état, soit après traitement, destinées à la boisson, à la cuisson, à la préparation d'aliments, ou à d'autres usages domestiques dans des lieux publics comme dans des lieux privés». Si le seuil de 0,1 microgramme/L est dépassé quelque part, les États membres sont tenus d'identifier la cause du dépassement, d'évaluer le risque pour la santé humaine lié à cette contamination et de mettre en place les mesures correctives nécessaires dans un délai approprié pour rétablir la qualité de l'eau (article 14).
Notre infographie a donc retenu les points du territoire français pour lesquels la somme des 20 PFAS mentionnés dans la directive européenne dépasse ce seuil, selon les données les plus récentes récoltées en 2025. Les quatre catégories retenues par le ministère de la Transition écologique sont les suivantes : eaux souterraines (notamment dans les nappes phréatiques), eaux superficielles (dans les lacs, les rivières), eau rejetée par les sites industriels (pompée en amont du site, rejetée vers le milieu naturel ou rejetée vers une station d'épuration), et eau distribuée, c'est-à-dire l'eau potable distribuée aux consommateurs.
16 communes où le taux de PFAS dans l'eau potable est excessif en France
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Parmi les 244 points du territoire français où le seuil est dépassé, 112 sont concernés par des rejets de PFAS vers le milieu naturel, ainsi exposés à une pollution de très longue durée. Quatorze lacs ou cours d'eau sont également exposés à un niveau de PFAS anormalement élevé, tout comme 30 nappes souterraines, c'est-à-dire nos ressources brutes en eau potable. Enfin, on constate une contamination de l'eau potable distribuée dans 16 communes, notamment quatre du département du Haut-Rhin (où les taux mesurés sont particulièrement élevés), trois communes de l'Isère, deux communes du Rhône, deux communes de l'Hérault, et trois villes de plus de 50.000 habitants : Chambéry, Narbonne et Cherbourg.
Le gouvernement a aussi annoncé «le lancement à venir d'une consultation du public sur deux projets de décrets». L'un concerne l'interdiction des PFAS dans des objets de la vie courante (farts pour ski, textiles et cosmétiques) et l'autre l'adoption d'une trajectoire de réduction des émissions industrielles de PFAS. Ces textes feront suite à la loi promulguée le 27 février 2025 «visant à protéger la population des risques liés aux substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées (PFAS)», déposée par le groupe écologiste en 2024. La loi entrée en vigueur propose de viser tous les PFAS, dont le nombre est aujourd'hui estimé «entre 4000 et 12.000» selon l'exposé des motifs, soit bien plus que la liste de PFAS contrôlée dans les analyses actuelles. «L'objectif est de réduire la présence des PFAS dans l'environnement et de réduire notre exposition directe à ces produits dans notre quotidien», assure la ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher dans son communiqué.
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time37 minutes ago

  • Le Figaro

Plainte en diffamation contre des élus opposés aux salles de shoot : «Le débat est devenu impossible»

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La plainte en diffamation déposée par la Fédération Addiction contre une campagne politique — fondée sur des vœux votés au Conseil de Paris, des échanges avec l'ARS et des documents administratifs publics — soulève un paradoxe troublant. Lorsqu'un sujet relève à ce point de la santé publique, ne devrait-il pas faire l'objet d'un débat transparent, pluraliste, contradictoire, et non d'une réponse judiciaire ? Laisser entendre que toute critique des dispositifs en place constituerait une attaque contre les professionnels est une stratégie de dissuasion, non une réponse démocratique. La réduction des risques a été un progrès sanitaire majeur. Grâce à elle, des vies ont été sauvées. Les overdoses ont reculé, les contaminations par le VIH ont été contenues Le droit au débat, à la contestation, à l'évaluation fait partie intégrante de la démocratie. La vérité, lorsqu'elle est documentée, ne peut être diffamatoire. Et le débat sur les politiques publiques ne peut être bâillonné au nom de la sensibilité du sujet. Il faut le dire clairement : la réduction des risques a été un progrès sanitaire majeur. Grâce à elle, des vies ont été sauvées. Les overdoses ont reculé, les contaminations par le VIH ont été contenues. Elle a permis de sortir d'une vision uniquement répressive de la toxicomanie. Mais ce progrès est aujourd'hui devenu, dans certains discours, une fin en soi. Or, réduire les risques ne doit pas signifier renoncer à soigner. Au Canada comme aux États-Unis, des salles de consommation supervisée ferment, incapables de répondre à l'urgence sanitaire de la crise du fentanyl. Le soin et la désintoxication sont remis au premier plan. À lire aussi Minée par la drogue, San Francisco s'effondre Aujourd'hui, en France, moins de 10 % des personnes fréquentant les CAARUD (Centre d'accueil et d'accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogues) sont orientées vers des CSAPA (Centre de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie). Les Haltes Soins Addictions (HSA), présentées comme des structures de lien et d'écoute, n'engagent que très rarement les consommateurs de drogues dans une démarche de sevrage et d'abstinence. Elles normalisent l'usage de drogue. La désintoxication n'est plus un objectif assumé, mais un choix marginal, parfois même perçu comme archaïque. L'idée même de vouloir sortir de l'usage de drogue est jugée suspecte, comme si elle trahissait un refus du réel ou un idéalisme mal placé. Publicité Et pourtant, la science, les témoignages, les pratiques à l'international convergent : lorsqu'un centre de traitement propose, au même endroit, une désintoxication, un accompagnement à l'abstinence, un soutien psychologique, de la thérapie de groupe, les chances de rétablissement durable augmentent. Alors pourquoi ces modèles ne sont-ils pas davantage développés en France ? Il existe déjà, dans d'autres pays, des structures qui articulent soins et réduction des risques : centres de sevrage progressif, hôpitaux de jour, cliniques communautaires... Le véritable débat n'est pas entre les «pro-soin» et les «pro-réduction des risques». Ce clivage est artificiel, stérile et profondément contre-productif. Il dissocie là où il faudrait associer. Il divise là où il faudrait construire ensemble. Ce dont nous avons besoin, c'est d'un modèle d'addictologie intégratif, qui assume de protéger sans renoncer à soigner, de réduire les risques tout en proposant une voie de sortie, de respecter la personne sans renoncer à l'espérance d'un rétablissement. Il existe déjà, dans d'autres pays, des structures qui articulent ces deux approches : centres de sevrage progressif, hôpitaux de jour, cliniques communautaires qui offrent des traitements de substitution tout en accompagnant vers une désintoxication possible. Ces modèles montrent que l'humanisme ne s'oppose pas à l'ambition thérapeutique. On peut croire au rétablissement sans être dans le déni. On peut accompagner sans capituler. Ce que révèle la polémique actuelle, c'est l'urgence d'un changement de cap. Ni retour à la répression pure, ni maintien dans une logique palliative figée. Une autre voie est possible. Elle suppose plusieurs ruptures courageuses. Il faudrait d'abord réaffirmer que le soin, le sevrage, l'abstinence sont des horizons légitimes, qu'ils doivent être rendus accessibles et visibles. Il faut faire de l'évaluation indépendante des dispositifs existants une norme, pour dépasser les récits auto-justifiés. Il s'agirait de favoriser les structures mixtes, capables de proposer à la fois de la réduction des risques et de vrais parcours de soins. Il est également important de respecter les riverains et les citoyens, en ne leur imposant pas des implantations perçues comme brutales et aux effets négatifs. Pour cela, il faut commencer par rétablir le débat démocratique concernant cette question de santé publique. Nous n'avons pas à choisir entre compassion et exigence, entre pragmatisme et espérance. Nous devons refuser cette alternative binaire. Car soigner les consommateurs de drogues, c'est faire en sorte qu'un autre avenir soit possible pour eux. Et débattre, c'est le premier pas vers cette espérance.

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