
Bazarder des licornes
J'adore ce bazar, il y a toujours des surprises, et de vrais prix de bazar comme dans le temps, parce que même le seconde main est devenu cher de nos jours. Il est tenu par des dames adorables qui ont de la jasette et qui arrondissent les prix s'il vous manque 25 sous. Tous les profits sont remis à un organisme communautaire qui aide des gens dans le besoin depuis 1976. Je ne révèle pas l'adresse pour que ça reste ainsi, sachant que ce type de bazar est souvent pris d'assaut par des acheteurs qui alimentent les boutiques vintage du Plateau où on te revend ton chandail laid de 1998 le double du prix acheté neuf.
Il y avait donc trois bacs pleins de bibelots de licornes à écouler, d'où le quatre pour une piasse, et j'ai imaginé une personne qui avait largué ça, découragée par l'actualité, qui nous confirme chaque jour qu'on ne vit pas dans un monde de licornes. Une image qui m'a donné le fou rire parce que bazarder une collection de licornes, c'est quand même comique.
Mais quel sale temps pour ceux qui ont le cœur à rire. Où que l'on regarde, il n'y a que scandale, cruauté, indécence et souffrance. Le spectacle du naufrage des USA n'est plus drôle du tout, celui d'Israël, qui poursuit le massacre à Gaza, est atroce.
Tout le monde est anxieux ou de mauvaise humeur, et c'est comme si aucune blague ne pouvait détendre l'atmosphère. Pourtant, je m'accroche à l'humour, cette « politesse du désespoir ».
C'est bien simple : si je ne ris pas, je meurs, et j'ai fait mienne cette phrase de Rabelais : « Mieux est de ris que de larmes écrire, pour ce que rire est le propre de l'homme. »
N'est-ce pas Chamfort aussi qui disait que la plus perdue de toutes les journées est celle où l'on n'a pas ri ? Justement, j'en perds de plus en plus, des journées à me faire de la bile, parce que c'est dur de trouver matière à rigolade ces temps-ci. Par exemple en suivant le procès de Gilbert Rozon, où je n'arrive pas à penser à des jokes.
Dire que cet homme était le manitou de l'humour au Québec. On s'est fait enfoncer dans le crâne le petit bonhomme vert qui criait « maman, c'est finiiiii » pendant des lustres. C'est peut-être ça, le problème. On a fait de l'humour une industrie, détournant la force subversive de cette arme des humbles contre le pouvoir. Après ça, on se demande pourquoi les femmes humoristes ont pris du temps à percer dans cette fabrique qui n'était plus un contre-pouvoir, mais un pouvoir détenu par un type comme Gilbert Rozon. En recevant les verdicts des procès de Diddy ou des cinq joueurs de hockey soupçonnés de viol collectif, ce qui nous vient à l'esprit est plutôt « non, maman, c'est pas fini ».
Une bonne mesure de la sinistrose ambiante est que les caricatures de Donald Trump ne nous font plus rire. On dirait que les humoristes américains ont brûlé tous leurs punchs lors de son premier mandat. C'était presque le bon vieux temps, cette époque où on pouvait encore se moquer de ce président qui, d'ailleurs, a toujours l'air bête, comme tous les autocrates. En fait, aux États-Unis, l'humour devient plus désespéré depuis que CBS a annoncé mettre fin l'an prochain au Late Show de Stephen Colbert, une véritable institution créée en 1993 avec David Letterman.
On soupçonne CBS d'avoir voulu calmer les tensions avec Donald Trump, qui s'est réjoui sur les réseaux sociaux que Colbert soit viré.
« La culture de l'annulation est allée trop loin », a lancé l'animateur, pince-sans-rire. Le message sous-jacent a été bien compris, car les vedettes de talk-shows des États-Unis, parmi lesquelles Jimmy Fallon, Seth Meyers, Jon Stewart et John Oliver, mais aussi des figures comme Adam Sandler, Anderson Cooper, Andy Cohen et Lin-Manuel Miranda sont allées montrer leur soutien envers Colbert sur son plateau. Bref, les gants sont jetés, et l'émission South Park est plus féroce que jamais avec l'actuelle présidence.
Le rire a toujours été craint des puissants qui n'aiment pas le ridicule, parce qu'il signifie qu'on n'a pas peur. Mais la vraie question est de savoir si l'humour a encore le pouvoir de rassembler dans un pays aussi fracturé.
Ce qui est certain, c'est que l'humour du peuple ne passerait jamais à heure de grande écoute ou à la radio publique. On n'a qu'à aller sur la page Facebook ou X de la CAQ pour le constater. En fait, sur les pages de tous les partis politiques. Les gens sont en furie, et quand ils se défoulent, ils feraient passer Mike Ward pour un puritain. Aucun humoriste ne peut accoter ce degré de rage. Au moins, on sait qu'on vit encore en démocratie quand tout le monde peut pousser sa blague, même douteuse, sans se faire coffrer par l'État. Mais ça ressemble de moins en moins à de l'humour et de plus en plus à une immense colère.
Et si l'humour était devenu une licorne ?

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