
Les Aborigènes, venus défendre à l'Unesco un site majeur menacé par des géants miniers, ont eu gain de cause
Un site d'art rupestre aborigène, vieux de milliers d'années, a été inscrit vendredi 11 juillet sur la liste du patrimoine mondial de l'Unesco, devenant le 21e site australien y figurant, au côté de la Grande barrière de corail notamment. Le paysage culturel de Murujuga, dans le nord-ouest australien, abrite, selon les estimations, environ un million de pétroglyphes aborigènes, des gravures qui pourraient dater de 50.000 ans, ce qui en fait l'un des plus importants sites d'art rupestre au monde.
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Murujuga fait l'objet de vives polémiques en Australie, des Aborigènes et environnementalistes accusant des compagnies minières implantées dans la région de contribuer à détruire les pétroglyphes en raison de leurs émissions d'oxydes d'azote et de soufre.
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L'Icomos, une ONG spécialisée partenaire de l'Unesco, estimait «urgent» pour l'État australien de «veiller à l'élimination totale des émissions acides néfastes qui affectent actuellement les pétroglyphes (...) afin de préserver durablement l'intégrité du bien», dans un rapport consulté par l'AFP.
Gardienne
Venus de la péninsule de Burrup, dans le Nord-Ouest australien, jusqu'au siège de l'Unesco à Paris, des Aborigènes australiens ont milité pour la protection du site, nouvelle étape d'un feuilleton qui les oppose à des géants miniers mais aussi à leur gouvernement. Trois membres du peuple Mardudhunera ont parcouru des milliers de kilomètres pour s'entretenir cette semaine avec des délégués du monde entier à Paris, réunis pour la 47e session du Comité du patrimoine mondial jusqu'à dimanche, pour déterminer quels sites seront ajoutés à la liste protégée.
Raelene Cooper, l'une des gardiennes traditionnelles de Murujuga, lutte depuis des années pour protéger ce haut lieu de la culture aborigène, menacé directement par l'exploitation minière. «Regardez», s'inquiète-t-elle en montrant des vidéos de sa région, où émergent des installations industrielles massives au milieu de la terre rouge. «Vous voyez l'ampleur de ce chantier ?»
«Nos ancêtres nous ont laissé ces gravures pour que nous maintenions notre culture à travers ces sites sacrés. Là, à cet endroit, j'emmenais les anciens régulièrement», détaille son fils, Mark Clifton, en pointant du doigt sur une photo une zone désormais recouverte de constructions industrielles. La région du Pilbara, riche en ressources naturelles, attise l'appétit des géants miniers depuis des décennies. Du minerai de fer notamment est exporté via le port de Dampier, à l'entrée de la péninsule. La ville de Karratha, non loin de là, héberge une usine de gaz naturel liquéfié.
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L'entreprise australienne Woodside Energy y exploite en particulier North West Shelf, un complexe industriel comprenant plateformes offshore, pipelines sous-marins et installations de transformation des hydrocarbures. La présence de groupes miniers a déjà fait des dégâts, font valoir des organisations environnementales et autochtones. Benjamin Smith, professeur d'archéologie à l'université d'Australie-Occidentale et spécialiste d'art rupestre, a constaté des dommages. «Des oxydes d'azote et des oxydes de soufre sont émis par l'industrie, attaquent le manganèse et créent des centaines de trous à la surface. Cela provoque la dégradation des surfaces d'art rupestre», explique-t-il à l'AFP.
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Woodside Energy a indiqué à l'AFP avoir «pris des mesures proactives depuis de nombreuses années - y compris des réductions d'émissions, le partage de données et un soutien continu au programme de monitoring d'art rupestre de Murujuga - pour s'assurer que nous gérons nos impacts de manière responsable.»
«Bulldozers»
Fin mai, le gouvernement australien a donné son feu vert - sous conditions - à la prolongation jusqu'en 2070 de l'exploitation de ce site, dont la fermeture était prévue pour 2030. Estimant ne pas être entendue par Canberra, la petite délégation menée par Raelene Cooper est donc venue demander que l'Unesco réclame un moratoire sur tout nouveau dommage comme condition à l'inscription au patrimoine mondial de l'humanité du site de Murujuga. «Nous ne nous opposons pas au classement au patrimoine mondial de l'humanité», précise Raelene Cooper, qui a par ailleurs entamé une action en justice contre le ministre australien de l'environnement. «Cependant, il doit y avoir, au plus haut niveau, des garanties et des mesures de préservation.»
Face à eux, le gouvernement australien a aussi envoyé une délégation, avec également des membres de la communauté aborigène de la région, signe de la complexité du dossier. «L'inscription au patrimoine mondial renforcerait les protections déjà importantes mises en place pour préserver ce site d'une importance capitale», soulignait-il dans une déclaration transmise à l'AFP.
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