
Comment l'Inde mise sur une peinture spéciale pour résister aux températures invivables?
Emmanuel Derville - Correspondant à New Delhi Publié aujourd'hui à 10h00
La chaleur extrême, qui frappe l'Inde désormais chaque année, est un véritable défi pour les habitants des bidonvilles. Ici, à Mumbai (Bombay).
Getty Images
En bref:
C'est une maisonnette de briques, plantée dans une ruelle, coincée entre deux bâtisses de même facture, mais plus haute. Ranil, une mère de famille d'une trentaine d'années, s'entasse là avec ses deux fils et son mari. L'unique pièce du logis de 18 m² peine à contenir le mobilier: un grand lit, une table de machine à coudre, un frigidaire, un évier. Avec quatre occupants, le logement situé dans le bidonville de J J Colony, dans l'ouest de New Delhi , devrait être un four en ce mois de juillet. Il fait 32 degrés dehors, même si la mousson a fait chuter le thermomètre de dix degrés. Sitôt à l'intérieur, la fraîcheur de l'air saisit le visiteur. Il n'y a pourtant pas de climatisation. Seul un ventilateur vrombit au plafond.
Ranil se souvient de l'époque où la canicule étouffait son existence. Les températures franchissent les 40 degrés dès le mois de mai dans la capitale indienne avec des pointes à 45. «On ne pouvait pas fermer l'œil de la nuit avant qu'il fasse moins chaud vers 3 ou 4 h du matin. C'était impossible de travailler. J'arrivais à peine à faire un costume par jour», raconte cette couturière. Une peinture anticanicule qui se développe
Il y a deux ans, une ONG indienne, Mahila Housing Trust ( MHT ), lui a proposé de repeindre son toit avec un revêtement blanc antichaleur. Cette peinture dite SRI (solar reflective index) est conçue pour renvoyer le rayonnement solaire au lieu de l'absorber. MHT prend en charge 80% des coûts, le reste est à la charge du bénéficiaire. «On a vu la différence en un mois. Je dors mieux. Désormais, je peux terminer deux costumes par jour», explique Ranil.
La peinture anticanicule fait son chemin depuis une petite dizaine d'années en Inde. En Suisse aussi, des entreprises ont commencé à en vendre. Pendant la canicule de l'an dernier, l'aéroport de Genève a fait repeindre le toit du satellite 20 avec cet enduit. Mahila Housing Trust s'y est mise dès 2016. «La ville d'Ahmedabad, dans l'ouest du pays, préparait un plan contre la canicule et ils ont fait appel à nous pour qu'on repeigne les toits des quartiers pauvres. Trois mille maisons ont été couvertes en 2017, puis on est passé à 15'000 en 2019», explique Bhavna Maheriya, l'ingénieure en charge du projet. Qui poursuit: «La ville de Jodhpur a repris cette initiative en 2023. Nous en avons fait bénéficier 110 maisons d'un bidonville.» MHT est également intervenue sur plus de 200 habitations pauvres à New Delhi.
Plusieurs études ont confirmé l'efficacité de la peinture anticanicule. Le Centre pour les renouvelables et les économies d'énergie (KAPE), un organisme rattaché au Ministère grec de l'nvironnement, a testé son efficacité dans un rapport paru en 2017. Les chercheurs ont appliqué une couche de peinture sur le toit d'une école à Athènes en juillet 2015 et constaté une baisse de la température intérieure de 1 à 2% dans les dix jours. L'école étant équipée de ventilateurs, la consommation électrique a diminué de 30%. La peinture a toutefois rendu le bâtiment plus difficile à chauffer en hiver. Des bidonvilles qui vivent mieux
Une autre étude, parue il y a deux ans et réalisée sur une usine textile du Bangladesh par l'Université de Griffith, basée en Australie, a constaté un recul de deux degrés dans le bâtiment, mais pas que. «Le pouvoir réfléchissant des toits peints en blanc permet de réduire la température aux alentours et de minimiser les îlots de chaleur urbains», précisent les auteurs.
À New Delhi, l'ONG écologique Chintan a fait repeindre 1000 habitations dans deux quartiers pauvres, il y a deux ans. Elle a constaté, dans un rapport sorti en mai, que le revêtement anticanicule avait réduit les variations de températures dans les logements dans une fourchette de quatre degrés contre six degrés pour ceux dont le toit n'avait pas été traité. «On est intervenu sur des maisons d'un seul étage. La température intérieure avait baissé de deux degrés», indique la directrice de Chintan, Bharati Chaturvedi.
En Europe, les professionnels du secteur avertissent que cette peinture fonctionne mieux sur des bâtiments d'un étage comme les supermarchés ou les entrepôts. Sinon, la baisse de température se fait plutôt sentir au niveau supérieur. Une peinture encore chère pour les bidonvilles
Chintan s'est aussi aperçue, après avoir inspecté 200 toitures traitées il y a deux ans, que la peinture s'était écaillée pour la totalité d'entre elles. «Il faut appliquer une couche tous les ans avant l'été», estime Bharati Chaturvedi. Le rapport de Chintan met en cause l'humidité, mais aussi le fait que beaucoup de foyers utilisent leur toit comme un espace de stockage, par manque de place, voire y installent leurs toilettes. Les allées et venues abîment le revêtement plus vite.
La qualité compte aussi. Kiran, une femme de 30 ans, qui a refait son toit grâce à MHT en 2023 à J J Colony, en a fait l'expérience. «La température a baissé très vite et les enfants étaient devenus beaucoup plus calmes. On dormait mieux. On travaillait mieux. Hélas, ça n'a duré qu'un mois. D'après MHT, la peinture utilisée était périmée.» Kiran et son mari n'ont pas les moyens d'acheter un nouveau pot. «Elle coûte deux à trois fois plus cher qu'une peinture conventionnelle», pointe Bhavna Maheriya. MHT paie le pot de 5 litres 1800 roupies (17 francs) et il en faut jusqu'à deux par toiture alors que les logements ne dépassent guère les 40 m2.
Bharati Chaturvedi estime que l'État doit intervenir pour développer l'usage de la peinture anticanicule: «C'est un produit de niche et les magasins n'en ont pas toujours en stock. Les entreprises doivent aussi travailler avec les instituts de recherche publics pour mettre au point des produits low cost.» Car en Inde, les vagues de chaleur extrême sont devenues un enjeu de santé publique. De plus en plus de grandes villes préparent des mesures avant la saison chaude pour aider la population à s'adapter. «Il y a vingt ans, les gens dormaient sur le toit en été, se souvient-elle. Ce n'est plus possible aujourd'hui. Les pouvoirs publics vont devoir réfléchir à élargir la protection sociale à des mesures d'aide contre la canicule.»
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Heureusement pour lui, les bouteilles françaises et italiennes représentent l'essentiel de son activité. Il n'empêche. «De tels droits de douane seront un obstacle majeur pour agrandir le marché du vin suisse, qui est petit aux États-Unis. D'autant que le dollar a beaucoup baissé, ce qui complique les achats», regrette-t-il. Frustration des importateurs de produits suisses Sa frustration est partagée par de nombreux importateurs de produits suisses outre-Atlantique à l'approche de la date couperet. La présidente Karin Keller-Sutter s'est rendue à Washington mardi 5 août pour trouver un accord de dernière minute. Une chose est sûre: quel que soit le scénario, Donald Trump se déclarera vainqueur. Si les 39% entrent en vigueur, cela générera des recettes pour les États-Unis au moment où le Républicain doit financer les réductions d'impôts pour les ménages les plus riches contenues dans sa «grande et belle loi» adoptée début juillet. 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D'après MHT, la peinture utilisée était périmée.» Kiran et son mari n'ont pas les moyens d'acheter un nouveau pot. «Elle coûte deux à trois fois plus cher qu'une peinture conventionnelle», pointe Bhavna Maheriya. MHT paie le pot de 5 litres 1800 roupies (17 francs) et il en faut jusqu'à deux par toiture alors que les logements ne dépassent guère les 40 m2. Bharati Chaturvedi estime que l'État doit intervenir pour développer l'usage de la peinture anticanicule: «C'est un produit de niche et les magasins n'en ont pas toujours en stock. Les entreprises doivent aussi travailler avec les instituts de recherche publics pour mettre au point des produits low cost.» Car en Inde, les vagues de chaleur extrême sont devenues un enjeu de santé publique. De plus en plus de grandes villes préparent des mesures avant la saison chaude pour aider la population à s'adapter. «Il y a vingt ans, les gens dormaient sur le toit en été, se souvient-elle. Ce n'est plus possible aujourd'hui. 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24 Heures
14-07-2025
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Économie: le peuple n'aura pas le dernier mot sur l'accord avec l'Inde
Exportations suisses – Le peuple suisse n'aura pas le dernier mot sur l'accord avec l'Inde À l'issue du délai référendaire, personne n'a contesté ce traité de libre-échange. Les Verts préfèrent concentrer leurs forces sur le Mercosur. Florent Quiquerez Une vue de Mumbai, la ville la plus peuplée de l'Inde. AFP Abonnez-vous dès maintenant et profitez de la fonction de lecture audio. S'abonnerSe connecter BotTalk En bref : L'accord de libre-échange avec l'Inde devrait entrer en vigueur cet automne déjà. Le traité supprimera 95% des droits de douane sur les exportations industrielles suisses. Les Verts ne l'ont pas contesté, mais menacent de lancer un référendum contre l'accord avec le Mercosur. Son impact environnemental inquiète en effet davantage que celui de l'accord avec l'Inde. L'événement est majeur pour l'économie, mais il est passé inaperçu. L'accord de libre-échange avec l'Inde va pouvoir entrer en vigueur. Le délai pour le dépôt d'un référendum a expiré le 30 juin et personne n'a décidé de le saisir. Pour le conseiller fédéral Guy Parmelin, c'est un succès, après 16 ans de négociations. À terme, 95% des droits de douane sur les exportations de produits industriels suisse seront supprimés. Le potentiel d'économie? 166 millions par an. «Un accord de libre-échange avec le pays le plus peuplé du monde arrive au bon moment», réagit EconomieSuisse, qui rappelle les «actuelles tensions géopolitiques et incertitudes en matière de politique commerciale». Allusion aux taxes de Donald Trump. Le Mercosur est un autre accord «géant» Mais la faîtière ajoute une dimension politique à l'affaire. L'absence de référendum montrerait «que l'opinion publique reconnaît l'importance de l'accord». L'allusion porte cette fois-ci sur la politique intérieure. Car un autre traité de libre-échange est sur toutes les lèvres: le Mercosur (Brésil, Argentine, Paraguay et Uruguay). 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À moins qu'ils ne le fassent par pure stratégie politique.» Il serait en effet plus facile de polémiquer «sur le bœuf aux hormones ou la forêt amazonienne» que d'attirer l'attention sur l'Inde, qui – comme pays «non aligné et démocratique» à quelque chose de «sympathique». Une analyse que ne partage pas le vice-président des Verts, Nicolas Walder (GE). «L'accord avec l'Inde n'a que peu à voir avec celui du Mercosur. Le premier n'est pas parfait, mais on peut vivre avec. Même si nous regrettons qu'il n'y ait pas de critère de durabilité dans les investissements prévus, nous saluons la volonté d'investir pour développer l'économie indienne et non pas uniquement d'exploiter ses ressources.» Et d'insister: «Pour le Mercosur, l'impact potentiel en termes de biodiversité et d'environnement est d'une tout autre ampleur, notamment en raison de l'agriculture. Ce secteur n'est pas directement concerné par l'accord avec l'Inde, qui ne cherche pas à exporter à tout prix dans ce domaine. 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