
Au Dîner du Crif, François Bayrou dénonce «la bête délirante et meurtrière» de l'antisémitisme
Quatrième premier ministre en quatre ans. Après Jean Castex (2022), Élisabeth Borne (2023), et Gabriel Attal (2024) avant lui, François Bayrou était ce jeudi soir l'invité d'honneur du 39ème Dîner du Crif, au Carrousel du Louvre (1er arrondissement de Paris). Invité à s'exprimer à la tribune, comme le veut la tradition, le chef du gouvernement a prononcé un discours d'une grosse demi-heure. Son intervention, dont le démocrate-chrétien a teinté l'introduction d'accents théologiques - au risque de céder parfois à l'abstrait - et personnels - il a notamment révélé que ses enfants avaient eux-mêmes tenu à apprendre l'hébreu -, a été ponctuée d'applaudissements, en dépit de la défiance qui règne dans l'assistance vis-à-vis d'Emmanuel Macron.
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De même, les numéros quatre et cinq du gouvernement, Gérald Darmanin (Justice) et Bruno Retailleau (Intérieur), ont eux aussi été salués pour leur action, tout comme la ministre déléguée à la Lutte contre les discriminations, Aurore Bergé, qui a fait de longue date du combat contre l'antisémitisme l'une de ses priorités, matérialisé par les Assises qu'elle a lancées.
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«L'islamisme radical»
Dénonçant «la bête délirante et meurtrière» de l'antisémitisme, il a longuement énuméré la funeste litanie des assassinats et autres attentats qui avaient ciblé des juifs à travers les âges. «La bête nous surprend d'autant plus qu'elle a changé de forme», a déploré le patron du MoDem, estimant que «le monstre a fait pousser d'autres têtes» qui n'ont plus le visage de l'extrême droite mais de «l'islamisme radical». Évoquant le pogrom du 7-Octobre, le centriste a considéré qu'il «ne pourra pas y avoir d'équilibre au Proche-Orient tant qu'Israël ne sera pas reconnu par ses voisins et prémuni contre le feu nucléaire de ceux qui n'ont cessé de proclamer leur unique obsession et intention de le détruire». Et de réaffirmer «l'amitié indéfectible de la France».
Avant lui, Yonathan Arfi, le président du Conseil représentatif des institutions juives de France - fraîchement réélu pour un nouveau mandat - avait lancé un «appel à notre esprit républicain de résistance». Dénonçant «l'obsession, dans le débat public, autour des juifs» et «l'antisémitisme d'atmosphère», il a considéré que, «pour que la violence cesse, il ne suffit pas de la déplorer, mais il faut aussi savoir se battre». «Il y a 40 ans, nous étions traités de 'sales juifs' ; il y a 20 ans, de 'sales sionistes' ; aujourd'hui, de 'génocidaires'», a-t-il poursuivi, regrettant la manière dont certains s'échinent à «nazifier» le seul «État juif» du monde pour «soulager les consciences» de la Shoah. «La cause d'Israël est juste, dans cette guerre qu'il n'a pas choisie», a-t-il jugé, citant notamment la lutte contre l'organisation terroriste du Hamas, et le démantèlement du programme nucléaire de l'Iran.
Dans un discours enlevé et efficace, Yonathan Arfi a renoncé au réflexe pavlovien dans lequel ses prédécesseurs et lui s'enfermaient jusqu'ici, et qui consistait à dresser un parallèle artificiel entre la gauche radicale et le camp nationaliste. Sans s'éterniser sur Marine Le Pen, Jordan Bardella ou encore Éric Zemmour, qu'il n'a même pas cités, Yonathan Arfi a réservé ses flèches les plus acerbes à Jean-Luc Mélenchon. Par son «travail d'hystérisation du débat public», le troisième homme de la dernière présidentielle est «devenu le plus puissant carburant électoral (de l'extrême droite) dans les urnes».
«Populisme mondain»
Évoquant tour à tour les parlementaires Insoumis Rima Hassan, Thomas Portes, David Guiraud ou encore Aymeric Caron, le président du Crif a considéré qu'ils étaient «de faux amis des Palestiniens, et de vrais ennemis de la République». «Notre priorité politique doit être de rendre 'résiduelle' l'influence politique de LFI», a-t-il résumé, dans une allusion à la sortie de Jean-Luc Mélenchon, qui avait jugé bon de qualifier de «résiduel» l'antisémitisme en France. Ce, en dépit de la funeste augmentation, sans cesse documentée, des actes ciblant les juifs, dont le ministère de l'Intérieur a fait savoir jeudi qu'il en avait recensé 504 dans le premier semestre 2025, en baisse de -24% par rapport à la même période en 2024, mais en hausse de +134% par rapport à 2023.
Enfin, Yonathan Arfi a fustigé la récente tournée médiatique de Dominique de Villepin, accusé «d'alimenter le feu, les outrances, et les raccourcis coupables» par son «populisme mondain» et sa «faconde inimitable». «Dominique de Villepin est devenu un Mélenchon des beaux quartiers», a étrillé le président du Crif, avant d'interroger : «Comment un ancien premier ministre peut-il ignorer que son discours sur le 'contrôle des médias' ou la 'finance', quelles que soient ses intentions, résonne pour beaucoup comme une réthorique complotiste ou antisémite ?» «Mesdames et messieurs, vous avez 'le pouvoir de dire non' au projet proposé par Dominique de Villepin», a-t-il conclu à l'adresse de son auditoire. Sous les acclamations nourries de la salle.
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