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Notre critique de Sept jours: l'Iran chevillé au corps

Notre critique de Sept jours: l'Iran chevillé au corps

Le Figaro2 days ago
CRITIQUE - Écrit par Mohammad Rasoulof, mais réalisé par Ali Samadi Ahadi, ce film iranien inspiré de la vie de Narges Mohammadi, Prix Nobel de la paix 2023, décrit le tiraillement d'une femme entre sa lutte pour les droits humains au pays des mollahs et son devoir de mère. Percutant et émouvant.
Ali Samadi Ahadi, Mohammad Rasoulof et Vishka Asayesh ont en commun leur participation au film Sept jours, mais pas seulement. Tous les trois sont nés en 1972, ont souffert du régime iranien et ont quitté leur pays. Trois artistes d'une même génération marqués par les diktats liberticides de la République islamique.
Ali Samadi Ahadi, réalisateur de Sept jours, s'est échappé seul de chez lui quand il avait 12 ans pour éviter d'être tué. Il vit en Allemagne. Le cinéaste Mohammad Rasoulof, scénariste sur ce long-métrage, a été incarcéré plusieurs fois pour avoir critiqué le gouvernement iranien. Il a fini par s'exiler, lui aussi en Allemagne, juste avant le Festival de Cannes 2024 où il a pu défendre Les Graines du figuier sauvage, prix spécial du jury. Vishka Asayesh, héroïne de Sept jours et star en Iran, soutient publiquement le mouvement Femme, Vie, Liberté en 2022, et comprend qu'elle devra désormais jouer sans voile. Elle est réfugiée en France depuis 2024. Trois destins similaires qui ont uni leurs forces pour raconter l'histoire d'une militante des droits humains en Iran.
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Des barreaux de prison comme horizon
Narges Mohammadi est aussi née en 1972 et coche toutes les cases pour faire les mêmes choix que ses compatriotes. Sinon plus. Incarcérée et libérée plusieurs fois pour « propagande contre le système », la scientifique a connu les coups de fouet et son horizon pour les trente ans à venir ne dépasse pas les barreaux de sa prison. Malgré son cœur malade et son prix Nobel de la paix en 2023. Mais plutôt que de rejoindre son mari et ses jumeaux à Berlin, elle milite toujours depuis l'Iran. Son parcours a servi d'inspiration pour Sept jours.
Maryam (Vishka Asayesh) sort de prison pour sept jours. Sept jours pendant lesquels elle a interdiction de manifester et de publier sur les réseaux sociaux. Avec le nombre exact de cachets pour pallier sa faiblesse cardiaque. Sauf que ses proches ont un plan : lui faire rejoindre son mari et ses enfants de l'autre côté de la frontière avant qu'ils s'envolent ensemble pour Berlin où eux sont exilés depuis plusieurs années. Tout a été organisé et payé. Maryam accepte un peu contre son gré, mais elle aussi a son plan.
Des interlocuteurs taiseux
Commence une longue odyssée. Dans un coffre de voiture. Dans un bus où le chauffeur ne réclame pas de ticket et où elle doit échanger un téléphone contre un autre. Dans une Jeep où s'entassent les candidats à l'exil. Et enfin à dos d'âne, dans la neige. S'arrêter et croiser le regard des autres provoque à chaque fois du stress. Maryam est connue, sa présence peut attiser des convoitises. Ses interlocuteurs sont taiseux. Eux aussi prennent des risques. Traverser les montagnes enneigées sera une épreuve physique. Et les retrouvailles n'auront pas le goût d'une réunion de famille classique.
Construit en deux parties, Sept jours colle sa caméra dans chaque pas de Maryam et s'incruste dans chacune de ses réflexions. Le temps de la fuite donne à voir toutes les difficultés pour sortir du pays et décrit une méfiance permanente. Le temps du regroupement familial permet, lui, de mesurer le fossé qui se creuse entre ceux qui sont partis et ceux qui croient à la lutte depuis l'intérieur.
Vishka Asayesh dans Sept jours.
L'Atelier Distribution
Écrit par Mohammad Rasoulof, mais réalisé par Ali Samadi Ahadi, le film fait écho à la fuite du premier en 2024. Et dit beaucoup du dilemme des opposants au régime : peut-on lutter de l'extérieur ou faut-il être sur place ? Mais il montre aussi merveilleusement le tiraillement d'une femme entre son combat et son devoir de mère. D'autant que la barrière de la langue l'a éloignée de ses enfants. Il faut voir le désarroi de Maryam ne comprenant pas son fils et sa fille qui parlent allemand entre eux. Un détail magnifiquement exploité et tellement révélateur.
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Dans le rôle de Maryam, Vishna Asayesh est bouleversante de vérité. Son regard fier et sa profusion capillaire dessinent une femme forte, capable de sentir les timides évolutions entre sa génération et celle de sa fille. Et de déplorer la différence de statut qui persiste entre les hommes et les femmes à la tête de combats idéologiques. Les premiers restent des héros quand les secondes fuient. Narges Mohammadi, elle, en liberté provisoire depuis décembre 2024 pour raisons médicales, a déclaré il y a moins d'un mois être « directement et indirectement menacée d'élimination physique ».
L'avis du Figaro : 3/4.
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