
Jean-Paul Guimond, fournisseur officiel de la musique trad, est mort à 92 ans
Un vieillard qui meurt, c'est une bibliothèque qui brûle. Le proverbe aura rarement sonné aussi vrai que depuis la mort de Jean-Paul Guimond qui, vendredi, n'a pas survécu à une chirurgie de la hanche qu'il devait subir d'urgence. Son décès à l'âge de 92 ans survient alors que se déroule à Saint-Charles-Borromée le festival Mémoire et Racines, une des plus grandes célébrations québécoises pour le milieu du trad, où il avait ses habitudes.
Né en 1933 à Wotton, un village agricole situé à une quinzaine de minutes de Val-des-Sources, le jeune Jean-Paul a 13 ou 14 ans lorsqu'il chante pour la première fois en public, durant une veillée « chez le père Constant ». Son propre paternel avait bien pris soin de réchauffer son fils en lui servant quelques verres de gin. Il ne cessera jamais d'interpréter des airs hérités de ses parents, Hormidas et Alice, qu'il avait appris par cœur en s'échinant avec eux sur la terre familiale, où il a passé sa vie.
PHOTO ANDRE TREMBLAY, ARCHIVES LA PRESSE
Jean-Paul Guimond (au centre), avec le musicien Michel Bordeleau et le conteur Dominique Breau en juin 2009
C'est grâce au violoniste Claude Méthé, qui l'a repéré dans un gala folklorique, que Jean-Paul Guimond est convié au Centre de valorisation du patrimoine vivant de Québec, au début des années 1990, à ouvrir les portes du vaste répertoire consigné dans sa caboche. Plus de 800 chansons.
Dès lors, les musiciens de la scène trad québécoise font le trajet jusqu'à Wotton afin de faire ce qu'on appelle du « collectage » de chansons auprès du Père Guimond. Le Rêve du diable, La Volée d'Castors, Le Vent du Nord, Michel Faubert et La Bottine Souriante se sont tous abreuvés à sa mémoire phénoménale. Il suffisait de nommer un sujet – l'adultère, la boisson, la mort – pour qu'il en extirpe un refrain qui y correspondait. Il concluait systématiquement ses interprétations en poussant un solennel « Domino ».
Un tiroir inépuisable
« C'était un véritable tiroir à chansons, un tiroir inépuisable », résume le musicien sherbrookois Olivier Brousseau, du groupe Musique à bouches, qui a appris à La Presse le départ de « ce monument ». Mais plus qu'un simple dépositaire, Jean-Paul Guimond s'autorisait à réparer des chansons, comme il se plaisait à le dire. Il n'avait pas oublié qu'il y a le mot « vivant » dans l'expression « patrimoine vivant ».
« Sa vision à lui, explique Olivier Brousseau, c'était que si la chanson a des imperfections, s'il y a des parties qui nous parlent moins, on a le droit de la rafistoler, de jouer dans les rimes, d'ajuster certains couplets, d'en ajouter des nouveaux. Il est l'exemple parfait que le folklore, c'est un matériau malléable, qui évolue toujours. »
Extrait de Par un dimanche au soir, m'en allant voir la belle
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En mai 2020, le Conseil québécois du patrimoine vivant l'avait sacré « Maître de traditions vivantes ». En 2016, le Festival Chants de Vielles a inauguré une scène baptisée en son honneur. Il avait reçu au même moment une médaille de l'Assemblée nationale. En 2015, l'organisme Maréemusique a fait paraître le double album Jean-Paul Guimond, fournisseur officiel, regroupant 25 de ses chansons portées par sa voix venue d'un autre temps.
Un rebelle
Personnage truculent, qui pouvait vous accueillir chez lui le samedi matin avec une bouteille de porto, et qui ne savait faire autrement que de dire le fond de sa pensée, Jean-Paul Guimond était « un rebelle, une maudite belle tête de cochon », estime son ami, le chanteur Yves Lambert, qui avait l'habitude de le recevoir à déjeuner chaque année, le dimanche du Festival Mémoire et Racines.
À bas les rideaux, sur l'album Cordial (2001) de La Bottine Souriante ? Ça vient de Monsieur Guimond. On l'entend par ailleurs sur l'album d'Yves Lambert Récidive paru en 2004 (Aura frifri et son coulis de reels) ainsi que sur Tentation paru en 2018 (la bien nommée La poule à Jean-Paul).
Extrait de Aura friri et son coulis de reels
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Au début des années 2000, au moment de quitter La Bottine Souriante et de se réinventer sous son propre nom, Yves Lambert avait « besoin d'authenticité », dit-il. Il invite donc son ami Jean-Paul à l'accompagner en tournée. « Et il m'en a offert de l'authenticité, t'as pas idée », ajoute-t-il en éclatant de rire.
« Jean-Paul, ç'a été une personnage important dans ma vie à moi, », conclut Monsieur Lambert, « mais c'est aussi quelqu'un d'important pour quiconque a la moindre prétention de faire quelque chose en musique traditionnelle au Québec. » Domino.
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